Sobriété dans la recherche spatiale
Question de :
M. Arnaud Saint-Martin
Seine-et-Marne (1re circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Arnaud Saint-Martin interroge M. le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la sobriété dans les activités de recherche spatiale. L'impact écologique des activités spatiales est aujourd'hui largement méconnu et sous-estimé. Depuis la fin des années 1970, des scientifiques ont alerté sur les dérèglements liés à la surpopulation d'artefacts en orbite, comme l'astronome Donald Kessler de la NASA, mais ces alertes sont longtemps restées inaudibles. Si les risques liés à la croissance exponentielle des déploiements de systèmes orbitaux sont à présent bien connus, notamment grâce aux alertes des Nations unies, du CNRS, des communautés professionnelles des sciences de l'univers ou des associations « Pour un Réveil écologique » et AéroDécarbo, les moyens donnés à la recherche sur ce sujet sont dérisoires. On constate même une diminution de la place accordée à la recherche fondamentale publique. Pourtant, la soutenabilité des opérations dans le milieu exo-atmosphérique nécessite un soutien fort aux recherches des organismes de recherche spatiale, en particulier dans la collecte des données, la capacité souveraine de suivi de la pollution orbitale (dans un espace de plus en plus congestionné au moment où se déploient les « méga-constellations »), les recherches sur des lanceurs plus propres et celles pour limiter le nombre de lancements et, plus critique encore, l'arsenalisation des forces spatiales. Disposer de connaissances consolidées et établies par des experts du domaine de la durabilité spatiale est particulièrement indispensable pour garantir la poursuite des opérations à long terme. La France, déjà en pointe via sa loi relative aux opérations spatiales (2008), pourrait être fer de lance en la matière. Ainsi, puisque le Gouvernement a voté contre son propre projet de loi de finances, empêchant ainsi le débat de se mener en hémicycle et annulant donc la discussion des amendements concernant son ministère, M. le député interroge M. le ministre : est-il aujourd'hui envisageable de soutenir de façon significative sur le plan budgétaire un domaine de la recherche spatiale consacré à l'étude des conditions à réunir pour assurer la durabilité des opérations spatiales, renforcer l'évaluation de l'impact et les risques liés aux développements incontrôlés des activités spatiales et lutter contre la pollution ? Ce groupe de recherche permettrait de poser les jalons d'un programme international de dépollution de l'orbite basse et géostationnaire, qui s'engagerait à poser les conditions techniques de la dépollution des activités spatiales, à travers une régulation contraignante des usages de l'espace sous les auspices de l'ONU. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.
Réponse publiée le 1er juillet 2025
Les activités spatiales ont deux types d'impact environnemental : l'encombrement de l'orbite basse (démultiplié par les débris issus de collision entre objets en orbite), et les conséquences pour la Terre et le vivant de la pollution générée par les activités spatiales dans leur ensemble. Concernant le premier aspect, la France est moteur dans le développement de cadres normatifs et réglementaires adaptés, et elle développe des capacités de connaissance de l'environnement orbital. Dès 2008, elle s'est dotée d'une loi sur les activités spatiales qui vise à assurer la sécurité et la viabilité à long terme des activités spatiales (notamment en imposant la désorbitation des satellites en fin de vie). Elle soutient dès lors fortement le projet de loi spatiale de l'Union européenne, et promeut en outre une coordination normative et de bonnes pratiques au niveau international, via l'ONU. Par ailleurs, l'accroissement des capacités françaises de connaissance des objets en orbite fait l'objet d'un effort significatif de la France, notamment dans le cadre du volet spatial de France 2030, mais également au sein du consortium EU SST dédié à la surveillance de l'espace dont la France est leader. La recherche française a sa place dans ces actions. Concernant le second aspect, le Centre national d'études spatiales (CNES) a présenté en juin au salon du Bourget une feuille de route « décarbonation de la filière spatiale » élaborée avec l'ensemble des acteurs à la demande du Gouvernement. Elle a pour objectif de proposer des scénarios visant à s'aligner sur les objectifs de réduction des émissions fixés pour l'industrie dans la Stratégie nationale bas carbone (SNBC 2). Les acteurs de la recherche ont été sollicités pour participer à l'élaboration de cette feuille de route. Par ailleurs, dans le cadre de l'exercice quinquennal de prospective scientifique du CNES, un groupe transverse a travaillé sur l'impact environnemental du spatial sans se limiter au seul impact carbone. Il en ressort des recommandations et des propositions d'actions qui devront pour certaines s'appuyer sur des travaux de recherche. La programmation de ces travaux de recherche et leur financement sera piloté par le CNES, via son appel à proposition de recherche et ses bourses (doctorat et post-doctorat). Une première thèse vient de démarrer sur la contamination de l'atmosphère par le lancement et la réentrée.
Auteur : M. Arnaud Saint-Martin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Espace et politique spatiale
Ministère interrogé : Enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Enseignement supérieur et recherche (MD)
Dates :
Question publiée le 3 décembre 2024
Réponse publiée le 1er juillet 2025