Question écrite n° 2555 :
Augmentation des frais de notaire

17e Législature

Question de : Mme Sophie Blanc
Pyrénées-Orientales (1re circonscription) - Rassemblement National

Mme Sophie Blanc attire l'attention de M. le ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics, sur l'augmentation des frais de notaire dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025. Cette proposition qui consiste à relever les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), principale composante des frais d'acquisition immobilière, qui pourraient passer de 4,5 % à 5,5 % du prix de vente des biens immobiliers est une fausse bonne idée. Si cette initiative répond à la nécessité urgente de compenser les pertes financières des départements, confrontés à une baisse significative des recettes due à la diminution des transactions immobilières, elle soulève de nombreuses inquiétudes quant à ses répercussions sur les ménages, le marché immobilier et les dynamiques économiques locales. Les droits de mutation représentent déjà une part importante des frais d'acquisition immobilière, qui oscillent actuellement entre 7 % et 8 % du prix de vente dans l'immobilier ancien. L'ajout d'un point supplémentaire porterait ces frais à environ 9 % du montant total de l'opération, une hausse conséquente. Pour un bien immobilier vendu à 300 000 euros, par exemple, cette augmentation représenterait un surcoût de 3 000 euros pour l'acquéreur. Cette hausse toucherait particulièrement les primo-accédants et les ménages issus des classes moyennes, déjà fortement éprouvés par la montée des taux d'intérêt, qui a doublé voire triplé en deux ans et par une inflation persistante pesant sur leur capacité d'épargne. Ces catégories de population, souvent peu éligibles aux aides au logement, voient dans l'acquisition d'un bien immobilier un moyen de sécuriser leur avenir et de stabiliser leurs dépenses de logement à long terme. En alourdissant le coût d'entrée sur le marché, cette mesure risque de dissuader de nombreux candidats à l'achat, freinant ainsi l'accession à la propriété, un pilier historique de la stabilité sociale en France. Par ailleurs, cette surcharge fiscale aggraverait les inégalités d'accès au logement, particulièrement dans les zones où les prix sont déjà élevés, comme en Île-de-France ou sur la Côte d'Azur. Le marché immobilier traverse une crise profonde, marquée par une baisse significative des volumes de transactions (-32 % en un an) et une chute des prix dans certaines grandes villes comme Paris (-2,2 %) ou Nantes (-2,9 %). Cette conjoncture s'explique par une combinaison de facteurs, incluant la hausse des taux d'intérêt, qui renchérit le coût des crédits immobiliers et la réduction du pouvoir d'achat des ménages. Dans ce contexte, l'augmentation des frais de notaire viendrait alourdir encore davantage la facture pour les acquéreurs, réduisant leur capacité à acheter. Une telle mesure risquerait de provoquer une nouvelle contraction du marché, en particulier dans l'ancien, où les droits de mutation sont les plus élevés. Dans les Pyrénées-Orientales le marché de l'immobilier est en nette régression par rapport à 2023 avec une chute de 28 % sur les transactions, poursuivant ainsi une courbe dangereuse après une année 2023 déjà difficile. Un accroissement de la diminution des transactions aurait des conséquences en chaîne. Paradoxalement, l'objectif de cette hausse - compenser la baisse des recettes des DMTO - pourrait ne pas être atteint si la réduction des transactions se poursuit. Une contraction excessive du marché pourrait aboutir à une perte nette de recettes fiscales pour les départements. L'immobilier joue un rôle central dans l'économie française, avec des retombées importantes sur le secteur du bâtiment, les artisans et les services financiers. Une baisse des transactions pourrait affecter ces acteurs et aggraver les difficultés économiques déjà rencontrées dans certaines régions. Cette proposition s'inscrit dans un schéma récurrent où les collectivités territoriales, confrontées à des difficultés budgétaires, optent pour des augmentations fiscales plutôt que pour des réformes structurelles. Depuis la suppression de la taxe d'habitation, les départements ont vu leurs ressources diminuer, sans que des solutions pérennes soient mises en place pour compenser ce manque à gagner. Les droits de mutation représentent aujourd'hui jusqu'à 20 % des recettes des départements, soit une dépendance préoccupante à une taxe qui fluctue en fonction des cycles immobiliers. Cette situation soulève deux questions fondamentales : pourquoi le Gouvernement n'a-t-il pas anticipé cette crise en proposant une réforme globale de la fiscalité locale, mieux adaptée aux réalités économiques actuelles ? Quelles garanties le Gouvernement peut-il offrir que cette augmentation des DMTO, présentée comme « temporaire », ne deviendra pas une charge fiscale permanente pour les ménages ? En outre, il est regrettable que l'État continue de déléguer aux départements la responsabilité d'assurer l'équilibre budgétaire par le biais d'une fiscalité locale inadaptée, plutôt que de s'engager dans une révision plus large des dépenses publiques et des modes de financement des collectivités. L'impact de cette mesure ne sera pas uniforme sur l'ensemble du territoire. Les zones rurales et les petites communes, déjà fragilisées par la baisse des transactions et le ralentissement économique, pourraient être les plus touchées. En effet, ces territoires dépendent souvent des DMTO pour financer leurs projets locaux, mais ils sont aussi les plus sensibles à une diminution de l'attractivité immobilière. Cette hausse pourrait aggraver les déséquilibres territoriaux en rendant encore plus difficile l'accès à la propriété dans les zones où les revenus des ménages sont limités. Par ailleurs, elle risque de freiner les investissements dans ces régions, accentuant leur déclin démographique et économique. Mme la députée demande à M. le ministre de clarifier les intentions du Gouvernement sur les points suivants. Le Gouvernement a-t-il conduit une étude d'impact approfondie sur les effets de cette mesure, notamment sur les classes moyennes, les primo-accédants et le marché immobilier dans son ensemble ? Pourquoi aucune réforme fiscale ou budgétaire d'envergure n'a été proposée pour rééquilibrer durablement les finances des départements ? Le Gouvernement envisage-t-il d'introduire une fiscalité locale plus juste et moins dépendante des cycles immobiliers ? Quelles autres solutions ont été étudiées pour compenser les pertes des départements, sans alourdir encore la charge fiscale des ménages ? Comment le Gouvernement entend-il protéger les territoires les plus fragiles des effets négatifs de cette mesure ? Elle souhaite obtenir des précisions sur ces sujets.

Données clés

Auteur : Mme Sophie Blanc

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts locaux

Ministère interrogé : Budget et comptes publics

Ministère répondant : Comptes publics

Date :
Question publiée le 3 décembre 2024

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