Lutte contre la désindustrialisation
Question de :
M. Auguste Evrard
Pas-de-Calais (8e circonscription) - Rassemblement National
M. Auguste Evrard alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la politique du Gouvernement de lutte contre la désindustrialisation en France et plus particulièrement dans le bassin d'emploi de l'Audomarois et du Bassin minier, confronté à une hausse préoccupante des fermetures d'entreprises et d’usines. En dépit des promesses présidentielles et des efforts entrepris par les collectivités territoriales et les acteurs économiques locaux afin de protéger et renforcer la vitalité industrielle de ce territoire, ce dernier continue de perdre des compétences et des emplois industriels à un rythme alarmant. Cette région historiquement industrielle subit depuis plusieurs décennies une succession de restructurations et de fermetures d'entreprises et d'usines qui fragilisent profondément l'équilibre de son tissu socio-économique. À titre d'exemple, la fermeture de la papeterie RDM de Blendecques en septembre 2024 a entraîné la suppression de près de 180 emplois. Par ailleurs, les verreries d'Arques, Arc France et Alphaglass, parmi principaux employeurs de ce territoire, font face à de continuelles difficultés financières et organisationnelles, menaçant la pérennité de milliers d'emplois et le maintien d'une expertise industrielle unique. Ces exemples récents s'inscrivent dans la longue litanie des fermetures et délocalisations d'unités de production industrielle contribuant à une précarisation croissante de milliers de salariés et de leurs familles. Malgré l'existence de dispositifs d'accompagnement et d'initiatives locales visant à diversifier l'économie, l'absence de solutions ambitieuses, pérennes et coordonnées pour soutenir les populations et les entreprises accentue le sentiment d'abandon ressenti par les populations, tout en aggravant les fractures territoriales. Dans ce contexte, M. le député interroge M. le ministre sur les mesures concrètes envisagées par l'État pour anticiper et prévenir les fermetures industrielles. Il lui demande si un plan de réindustrialisation spécifique au Pas-de-Calais pourrait être déployé, en concertation avec les collectivités locales et les acteurs économiques, afin de préserver les savoir-faire locaux, maintenir des emplois industriels et insuffler une dynamique économique durable ; il souligne que ces actions sont nécessaires pour préserver une filière industrielle française d'excellence.
Réponse publiée le 18 mars 2025
Depuis plusieurs années, la politique industrielle menée par l'État vise à anticiper et prévenir les difficultés des entreprises, à les accompagner dans leurs restructurations, à consolider les filières stratégiques et à soutenir la reconversion des salariés pour maintenir un tissu industriel dynamique et résilient. Les services de l'État ont développé des outils pour prévenir et accompagner les entreprises en difficulté afin de préserver l'activité industrielle et les compétences, tout en limitant les pertes économiques et sociales. Cette stratégie repose sur trois grands objectifs. Le premier est de détecter rapidement les entreprises en difficulté grâce à certains signaux, afin d'intervenir en amont. Le deuxième consiste à accompagner ces entreprises en trouvant les meilleures solutions pour éviter les fermetures, préserver les emplois et le savoir-faire. Enfin, le troisième objectif est de consolider les filières stratégiques pour renforcer leur résilience et favoriser l'émergence d'entreprises plus solides. Pour rappel, le Baromètre industriel de l'État mis en place l'année dernière permet de mesurer directement l'évolution de la réindustrialisation en France. Les services déconcentrés de l'État sont mobilisés pour le suivi de cet indicateur, coordonné et élaboré par la direction générale des Entreprises (DGE). L'écosystème local participe également activement au suivi de cet indicateur. Les Hauts-de-France, dont les secteurs historiques sont confrontés à des difficultés majeures, voit un solde négatif au S1 2024 comme en 2022 et 2023. Les 8 ouvertures et extensions significatives d'usines au premier semestre 2024, ne compensent pas les 11 fermetures ou réductions significatives qui ont eu lieu sur le territoire. L'indicateur s'intéresse aux unités industrielles sans tenir compte de la valeur ajoutée du site concerné. Ainsi, une gigafactory ou une première industrialisation de taille moindre compteront comme une même unité industrielle. De fait, si la région est bien confrontée à une transformation de son tissu industriel traduite par un nombre important de fermetures, il est important de souligner que les sites de production qui ouvrent participent fortement à la dynamique de réindustrialisation du pays en raison de la forte valeur ajoutée de leurs activités de production. Pour détecter et prévenir les difficultés, l'État a mis en place la plateforme numérique « signaux Faibles », qui croise les données des différentes administrations et utilise un algorithme d'intelligence artificielle. Cet outil permet d'identifier environ 100 entreprises fragiles par département chaque trimestre. Par ailleurs, le Gouvernement prolonge jusqu'en 2025 la prise en charge des audits pour les petites entreprises qui en ont besoin. En matière d'accompagnement, une task force réunit des acteurs au niveau local, régional et national, comme les Commissaires aux restructurations et prévention (CRP) et le Comité interministériel aux restructurations industrielles (CIRI). Ce dispositif permet de proposer des solutions financières adaptées, notamment par le biais du Fonds de développement économique et social (FDES), qui offre des prêts aux entreprises en restructuration et rencontrant des difficultés d'accès au crédit bancaire. L'État s'attache également à soutenir les secteurs stratégiques, comme l'aéronautique et l'automobile, en créant des fonds spécifiques, notamment en soutenant les sous-traitants, en favorisant leur croissance, leur internationalisation et leur adaptation aux enjeux climatiques. L'accompagnement s'étend au-delà des entreprises et bénéficie également aux salariés pour maintenir et adapter leurs compétences face aux mutations économiques. Le Fonds National de l'Emploi-Formation (FNE-Formation) finance des formations permettant d'accompagner les grandes transitions, comme celles liées au numérique ou à l'écologie. En 2025, 80 000 salariés de l'industrie devraient bénéficier de ce dispositif. Enfin, l'État travaille à revitaliser les territoires en orientant les budgets des entreprises vers le développement de l'emploi industriel. Au cœur de la région Hauts-de-France, les services de l'État démontrent un engagement intense pour soutenir les entreprises en difficulté, en mobilisant des financements importants et en mettant en œuvre des dispositifs adaptés aux crises. Arc International, par exemple, a bénéficié d'un soutien significatif avec un prêt FDES de 48,5 millions d'euros en 2015, suivi de 128,5 millions entre 2020 et 2022, de 10 millions en 2023 et de 30 millions récemment en 2025. Lors des inondations dans le Pas-de-Calais, l'État a réagi rapidement en mettant en place une cellule d'urgence pour coordonner la reconstruction du territoire et appuyer les entreprises touchées. Par ailleurs, les papeteries ont bénéficié d'un accompagnement spécifique, notamment pour la renégociation de leurs dépenses énergétiques. Le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a obtenu des assureurs que les entreprises sinistrées ne soient confrontées qu'à une seule franchise, malgré le retour des inondations en janvier. En parallèle, plusieurs initiatives illustrent la mobilisation proactive des services de l'État en faveur de la compétitivité et de la réindustrialisation des territoires. En février 2023, le SGPI a rencontré les représentants locaux pour orienter les projets de transformation des entreprises du bassin d'emploi de Saint-Omer vers les dispositifs France 2030. En outre, le dispositif « Chocs industriels » a été déployé avec succès dans plusieurs zones industrielles. À Béthune-Bruay, entre 2020 et 2021, 165 sites ont été recensés, dont certains ont été identifiés comme relais de croissance et accompagnés vers le plan de relance. À Boulogne-Calais, la même année, 31 projets d'investissement représentant 140 millions d'euros ont été recensés et accompagnés, permettant la création de 400 emplois. En 2022, à Lens-Liévin-Hénin-Carvin, 103 industriels ont été contactés afin de s'engager dans la démarche « Rebond industriel », donnant lieu à 38 projets d'investissement, soit 188 millions d'euros et 354 emplois potentiels.
Auteur : M. Auguste Evrard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Économie, finances et industrie
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Dates :
Question publiée le 3 décembre 2024
Réponse publiée le 18 mars 2025