Financement public des maternités privées
Question de :
Mme Murielle Lepvraud
Côtes-d'Armor (4e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Murielle Lepvraud attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins, sur la question du financement public accordé aux maternités privées. Cette situation soulève des interrogations quant à la répartition des budgets publics et l'équité dans l'accès aux soins. En effet, il apparaît que la maternité de l'hôpital privé de Plérin a reçu de l'ARS des financements publics à hauteur de 300 000 euros pour aider l'établissement à rémunérer le remplacement de 4 pédiatres ayant quitté l'établissement récemment et éviter de fermer la maternité. Cet établissement privé à but lucratif qui se situe à moins de 10 minutes de la maternité publique de Saint-Brieuc a absorbé une partie de l'activité de la maternité de Guingamp dont les accouchements sont suspendus depuis bientôt deux années, faute de professionnels. Comment justifier le subventionnement d'un établissement privé (qui a pour objectif de générer des profits) au détriment d'un établissement public qui garantit une prise en charge équitable sur le territoire ? Pourquoi la priorité n'est-elle pas été donnée à l'hôpital de Guingamp ? Il est à rappeler que l'accès aux soins est un droit fondamental, garanti par à l'alinéa 11 du Préambule de la Constitution française et l'article 35 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Financer des établissements privés pratiquant le dépassement d'honoraire tout en ne donnant pas les moyens suffisants aux établissements de santé publics contrevient à ces principes. L'assurance maladie, via les cotisations sociales des citoyens, finance en grande partie l'ARS. Les subventions allouées par l'ARS devraient donc en priorité bénéficier aux établissements de santé publics. Mme la députée interroge donc M. le ministre sur les critères de sélection des établissements bénéficiant de financements publics, notamment dans un contexte où tous les services de santé publics présentent de grandes difficultés. Elle lui demande également quelles mesures sont envisagées pour garantir une répartition équitable des ressources, afin de soutenir en priorité les maternités publiques et assurer ainsi un accès universel et de qualité aux soins obstétricaux.
Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025
FINANCEMENT DES MATERNITÉS
M. le président . La parole est à Mme Murielle Lepvraud, pour exposer sa question, no 258, relative au financement des maternités.
Mme Murielle Lepvraud . J'appelle l'attention du gouvernement sur le financement public accordé aux établissements de santé privés et sur l'équité dans l'accès aux soins.
La maternité de l'hôpital privé de Plérin a reçu de l'agence régionale de santé (ARS) des financements publics à hauteur de 300 000 euros pour aider l'établissement à rémunérer des intérimaires en remplacement de quatre pédiatres démissionnaires. Ont-ils eux-mêmes cédé aux sirènes de l'intérim ? Je ne sais pas. Mais comment justifier le subventionnement d'un établissement privé qui a pour objectif de générer des profits au détriment d'un établissement public qui garantit une prise en charge équitable sur le territoire ?
L'ARS a récemment demandé au centre hospitalier de Saint-Brieuc de se préparer à une éventuelle fermeture de la maternité privée de Plérin. Cette subvention était-elle dès lors nécessaire et a-t-elle été soumise à conditions ? Le choix de venir au secours d'une maternité privée située à moins de dix minutes de la maternité publique de Saint-Brieuc, tout en fermant la maternité de Guingamp, ne peut que renforcer le sentiment d'abandon que ressent la population vivant en zone rurale.
Afin de garantir une prise en charge équitable sur le territoire, la priorité aurait dû être donnée au recrutement de gynécologues obstétriciens par l'hôpital de Guingamp, par exemple.
La clinique de Plérin étant un établissement privé à but lucratif pratiquant des dépassements d'honoraires, il semble essentiel de s'assurer que l'argent public alloué réponde à une logique d'intérêt général. C'est pourquoi je souhaite obtenir des précisions sur les conditions d'attribution et d'utilisation de cette subvention et connaître l'implication de l'ARS dans le financement de cet établissement. J'ai écrit à l'ARS, mais n'ai toujours pas obtenu de réponse.
Puisque la maternité de Plérin est en difficulté, comment l'ARS anticipe-t-elle son éventuelle fermeture et comment compte-t-elle, dans cette hypothèse, organiser le maillage des maternités des Côtes-d'Armor ? Plutôt que de reporter la charge sur le centre hospitalier de Saint-Brieuc, déjà saturé, ne serait-il pas temps de penser à consacrer les moyens disponibles à la réouverture de la maternité de Guingamp ?
M. le président . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie et du handicap.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et du handicap . Vous interrogez le gouvernement sur le soutien apporté à la maternité de l'hôpital privé de Plérin. Ce soutien exceptionnel de 300 000 euros par l'ARS de Bretagne visait à répondre à une situation d'urgence : la démission de quatre pédiatres menaçait la continuité des soins. Ce financement ponctuel a permis le recrutement temporaire de remplaçants, afin de garantir la sécurité des patientes et des nouveau-nés. Il s'inscrit dans un cadre très strict, avec des rémunérations encadrées.
Ce soutien ciblé ne remet nullement en cause la priorité donnée au service public. En 2024, l'ARS a versé près de 29 millions d'euros d'aides de fin de campagne aux établissements du territoire, dont la très grande majorité appartient au secteur public. À titre d'exemple, le centre hospitalier de Saint-Brieuc, Paimpol et Tréguier bénéficie d'un accompagnement de 18 millions d'euros pour des projets d'envergure. L'hôpital de Guingamp, de son côté, a reçu 2 millions d'euros pour financer une IRM, imagerie par résonance magnétique, en amont d'un projet de modernisation plus large.
En ce qui concerne la maternité de Guingamp, sa suspension est liée à l'impossibilité de garantir la présence médicale nécessaire pour assurer la sécurité des accouchements. L'ARS reste pleinement mobilisée pour accompagner les établissements et les élus dans la recherche de solutions durables.
Parallèlement, le gouvernement se mobilise pour lutter contre la désertification médicale. La quatrième année d'internat de médecine générale commencera à compter de novembre 2026 et concernera environ 3 700 internes. Aussi la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par la territorialisation et la formation permettra-t-elle de moduler l'arrivée des futurs médecins en fonction des besoins des territoires et de rapatrier de nombreux étudiants en médecine à l'étranger.
Enfin, je rappelle que les financements publics ne dépendent pas du statut public ou privé des établissements, mais de leur objectif de garantir un accès sécurisé, équitable et continu aux soins sur l'ensemble du territoire.
M. le président . La parole est à Mme Murielle Lepvraud.
Mme Murielle Lepvraud . J'ai bien compris, mais le problème est que l'ARS a subventionné la maternité privée de Plérin pour pouvoir garder des soignants, des pédiatres, alors qu'on ne mobilise pas tous les moyens pour trouver des médecins pour la maternité de Guingamp, ce qui est tout de même problématique.
En matière de maillage territorial des maternités, quel est l'objectif du gouvernement ? Avez-vous des éléments à nous communiquer sur ce point ? Si la maternité privée de Plérin venait à fermer, il ne resterait que celles de Saint-Brieuc et de Lannion, ce qui serait insuffisant. Comment maintenir des maternités dans les Côtes-d'Armor ?
Auteur : Mme Murielle Lepvraud
Type de question : Question orale
Rubrique : Établissements de santé
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 mars 2025