Question de : M. Roger Chudeau
Loir-et-Cher (2e circonscription) - Rassemblement National

M. Roger Chudeau interroge M. le ministre de l'intérieur, à la demande du syndicat de police Unité, sur les conséquences du décret n° 2023-1330 du 28 décembre 2023 relatif à la mise en œuvre des systèmes de vidéosurveillance dans les cellules de garde à vue et de retenue douanière. En effet, afin de compenser l'absence de vidéosurveillance systématique et permanente, les policiers doivent effectuer des rondes régulières afin de réaliser des contrôles visuels à l'intérieur des cellules de GAV. Cela engendre une présence humaine accrue et nuit à une efficacité sur le terrain, alors même que la vidéosurveillance avait pour objectif d'alléger leur charge de travail. Le 2 octobre 2024, lors de son audition à l'Assemblée nationale, M. le ministre a réaffirmé sa volonté de « simplifier les choses », notamment en matière de surplus administratif pour les policiers et les gendarmes. En conséquence, la plupart des commissariats français, et plus particulièrement dans le département de Loir-et-Cher, étant déjà confrontés de manière chronique à des problèmes de sous-effectifs, il souhaite l'interroger sur les éventuelles possibilités d'assouplissement de cette réglementation de manière à faciliter le travail des forces de l'ordre.

Réponse publiée le 3 juin 2025

Depuis le 1er octobre 2024, les conditions de vidéosurveillance des personnes placées en garde à vue (ou en retenue douanière) ont changé en application des articles L. 256-1 et suivants du code de la sécurité intérieure. Ce nouveau cadre juridique est issu de la loi du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure. Initialement destiné à combler un vide juridique concernant les dispositifs de vidéosurveillance dans les locaux de garde à vue et à tirer les conséquences d'une décision du Conseil constitutionnel, promu par diverses autorités de contrôle, il a été considérablement encadré et donc alourdi lors de la discussion parlementaire, puis lors de la phase d'élaboration des règlements d'application et aux différentes étapes de l'examen des textes par le Conseil d'État. Décidé « lorsqu'il existe des raisons sérieuses de penser que [la] personne pourrait tenter de s'évader ou représenter une menace pour elle-même ou pour autrui », et devant donc être motivé, le placement sous vidéosurveillance d'un gardé à vue est désormais l'exception. Il s'accompagne de droits pour la personne filmée, dont celle-ci doit être informée, comme doit lui être notifiée la décision de la placer sous vidéosurveillance. Des diligences sont également à accomplir auprès de l'autorité judiciaire. Par ailleurs, des diligences supplémentaires s'appliquent (avocat, médecin) lorsque la personne bénéficie d'une mesure de protection juridique (tutelle, etc.) ou est mineure. Par ailleurs, un registre administratif spécifique doit être mis en place. Des diligences spécifiques sont également à accomplir en matière d'enregistrement des séquences vidéo (habilitation des agents autorisés à consulter les images, application des règles relatives à la protection des données, conservation des images, etc.). La mise en œuvre de ces nouvelles normes impose, en outre, d'équiper de nombreuses caméras d'enregistreurs, ce qui suppose des investissements financiers significatifs. Un pare-vue ou un filtre opacifiant doit également être fixé dans les cellules équipées de sanitaires. Ce nouvel encadrement juridique suscite la préoccupation voire l'incompréhension de nombre de policiers et pèse sur les services de police, qui doivent fréquemment se réorganiser pour y faire face. Il soulève donc de sérieuses interrogations dont le ministre d'État, ministre de l'Intérieur, est conscient. Ce cadre légal alourdit en effet le formalisme de la procédure alors que la simplification est une attente centrale des agents, notamment de ceux exerçant en filière investigation. La simplification de la procédure pénale constitue d'ailleurs, depuis plusieurs années, une priorité affichée par les Gouvernements successifs. Par ailleurs, avec un recours désormais restrictif à la vidéosurveillance, la charge de travail induite par la surveillance physique des cellules détourne nécessairement des policiers de missions opérationnelles, « immobilisés » dans les locaux des commissariats pour effectuer des rondes et procéder à des contrôles visuels directs de l'intérieur des cellules. Alors que les attentes des Français sont très fortes en matière de sécurité, et notamment de présence visible des forces de l'ordre sur le terrain, ce nouveau cadre juridique ne va pas dans le sens souhaité. Il convient de rappeler que le ministre d'État, ministre de l'Intérieur, a fait du renforcement de la sécurité du quotidien une priorité, qui passe par une présence accrue des patrouilles sur la voie publique. Pour la gendarmerie nationale, il convient de mentionner qu'il n'existe pas, à l'heure actuelle, de dispositif de vidéosurveillance de cellules de garde-à-vue. Néanmoins, une expérimentation de la vidéosurveillance a débuté au sein du groupement de gendarmerie du Lot-et-Garonne depuis le 17 février 2025 pour une durée de 6 mois. Elle permettra notamment d'éprouver le cadre légal d'emploi. Face aux conséquences opérationnelles et financières de ce nouveau cadre juridique, des mesures doivent être prises. Le ministre d'État, ministre de l'Intérieur, a donc demandé que soient étudiées toutes les possibilités juridiques pour réviser le cadre légal et permettre de revenir à un fonctionnement plus rationnel sur le plan opérationnel et moins coûteux sur le plan humain.Il convient en outre de rappeler que le ministre d'État, ministre de l'Intérieur, souhaite que soient intensifiés les efforts engagés depuis plusieurs années pour limiter le temps consacré aux actes de pur formalisme et réduire les contraintes administratives et les missions périphériques qui éloignent le policier et le gendarme de leur cœur de métier et notamment du terrain. Il s'agit de lutter contre des contraintes coûteuses et démotivantes et ainsi de redonner du sens au travail et à la vocation des policiers et des gendarmes, qui attendent beaucoup sur ce plan. Au-delà des indispensables évolutions législatives et réglementaires de simplification de la procédure pénale, d'importantes mesures ont déjà été prises ou sont en cours pour simplifier le travail policier : recours accru aux personnels administratifs pour exercer des fonctions non opérationnelles et pour suppléer les enquêteurs dans l'exécution des diligences procédurales, développement de l'amende forfaitaire délictuelle, réduction des missions dites périphériques, etc. Il est également fondamental que les policiers et gendarmes disposent d'outils numériques et d'aide à l'enquête performants et modernes, tant pour les gains de temps et d'efficacité, dont ils sont porteurs, que pour limiter la charge que représente une procédure pénale toujours plus complexe : déploiement progressif du programme « procédure pénale numérique », caméras mobiles, caméras embarquées et aéroportées, terminaux numériques de nouvelle génération NEO 2 et outils de plainte en mobilité, plainte en ligne et projet de visioplainte, développement de logiciels de retranscription, etc. À la demande du ministre d'État, ministre de l'Intérieur, les travaux visant à déployer le nouveau logiciel de rédaction des procédures de la police nationale, qui simplifiera la production des actes de procédure, vont en particulier être accélérés.

Données clés

Auteur : M. Roger Chudeau

Type de question : Question écrite

Rubrique : Police

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 3 décembre 2024
Réponse publiée le 3 juin 2025

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