Délabrement de l'infrastructure du quai du commerce de Saint-Pierre
Question de :
M. Stéphane Lenormand
Saint-Pierre-et-Miquelon (1re circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires
M. Stéphane Lenormand alerte M. le ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports, sur le délabrement de l'infrastructure portuaire à Saint-Pierre-et-Miquelon. Tout d'abord, pour rappel, il s'agit du dernier port d'État et d'ailleurs du seul port français en Amérique du nord, qui plus est à proximité de la zone arctique, que les bâtiments de la marine nationale utilisent pour leurs missions de souveraineté, mais surtout qu'il s'agit pour une ile d'une infrastructure vitale, pour assurer son approvisionnement et son développement économique. Depuis plus de 30 ans, il été laissé à l'abandon par l'État. Les derniers rapports d'expertise estiment sa simple remise en état à environ 100 millions d'euros. Aussi, depuis plus de 2 ans, les différents ministres successifs, à savoir des transports, des outre-mer et de l'intérieur, ont été alertés sur l'urgence d'intervenir sur ce quai du commerce de Saint-Pierre, qui est déjà fermé sur une bonne moitié. Alors que l'autre partie fonctionne et reçoit chaque semaine les différents conteneurs, son état est tout autant préoccupant : la différence est de 1,2 millimètre sur l'épaisseur de palplanche. Ainsi les services de l'État à Saint-Pierre-et-Miquelon sont parfaitement informés de la situation et disposent d'un dossier technique complet sur les travaux à réaliser afin d'éviter une catastrophe. Ces travaux d'urgence sont estimés à 19 millions d'euros, répartis sur deux ou trois exercices budgétaires. Pas de quoi plomber le déficit de l'État. Aussi, lors de son audition du 4 février 2025, M. le ministre, en annonçant une somme de 13 millions d'euros affectée à la rénovation de ce quai du commerce, a fait naître enfin un espoir pour tout le territoire et ses élus. Or il s'avère que M. le ministre lui-même et ses services ont confondu ces 13 millions d'euros avec les travaux en cours du port de Miquelon, qui sont inscrits dans le contrat État-région. C'est pourquoi, aujourd'hui, c'est avec colère qu'ils constatent qu'aucune décision n'a été prise après 2 ans de relance. Aussi, ils en déduisent que les gouvernements successifs ont sciemment fait traîner les choses et sont conscients qu'à tout moment ce quai peut lâcher, que le territoire sera alors en grande difficulté pour être approvisionné et que les coûts pour le réparer seront encore plus onéreux. De surcroît, ils estiment que si l'ensemble des dossiers sont suivis de cette façon, cela reste très inquiétant pour la France. D'autant qu'à chaque venue de ministre sur le territoire, il est dit : « Quelle chance pour la France d'avoir les outre-mer et d'être présent sur tous les océans ». Aujourd'hui ils constatent tout simplement que la France n'est pas en capacité de sauver son dernier port d'État à la sortie du Golfe du Saint-Laurent. Aussi, alors qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon les ancêtres étaient bretons, normands et basques, avec une tête dure, les habitants du territoire restent déterminés et aimeraient connaître son analyse de la situation et ses prochaines décisions en la matière. Il souhaite connaître les perspectives à ce sujet.
Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025
PORT DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON
M. le président . La parole est à M. Stéphane Lenormand, pour exposer sa question, no 261, relative au port de Saint-Pierre-et-Miquelon.
M. Stéphane Lenormand . Le port de Saint-Pierre-et-Miquelon est le dernier port d'État estampillé port d'intérêt national. Depuis quarante ans, ses infrastructures portuaires souffrent d'un manque d'investissement de la part de l'État. En 2018, plusieurs rapports d'expertise ont évalué le coût de leur remise en état à plus de 100 millions d'euros. Sur le port de Miquelon, d'abord, un trou est apparu au milieu du quai. Aujourd'hui, j'appelle votre attention sur la situation du quai du commerce de Saint-Pierre. Ce quai est en partie fermé. La partie qui reste ouverte constitue le hub de ravitaillement du territoire : chaque semaine, les conteneurs qui apportent les denrées alimentaires et les équipements l'utilisent.
Entre la partie du quai qui est fermée et celle qui est encore en activité, il existe une différence de 1,2 millimètre dans l'épaisseur de palplanche. Depuis bientôt trois ans, j'ai alerté le gouvernement sur la nécessité d'intervenir – certes, six ministres des outre-mer se sont succédé et il y a eu une dissolution. Il y a urgence : les services de l'État ont estimé le montant des travaux de rénovation à environ 19 millions. J'attends une prise de conscience de la part du gouvernement. Lors de son audition du 4 février 2025, le ministre des transports m'avait donné un espoir en annonçant que 13 millions seraient affectés à la rénovation du quai du commerce. Ses services avaient dû faire erreur, car il n'en est rien.
Je souhaite connaître la position du gouvernement sur ce problème clairement identifié depuis bientôt trois ans par les services de l'État. Rappelons l'importance du port pour ce territoire insulaire peuplé de Bretons, de Normands et de Basques, dont la devise est A mare labor. Il est difficile, pour un territoire doté d'une telle histoire, de voir son quai portuaire fermer progressivement – d'autant qu'à chaque visite ministérielle, on nous bassine avec la grandeur de la France, ses outre-mer, sa présence sur les cinq océans !
J'aimerais que le gouvernement s'engage dès maintenant à agir, car les travaux s'échelonneront sur une durée de presque trois ans. Il faut une décision rapide – la situation a trop duré !
M. le président . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ville.
Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville . Le gouvernement a conscience de l'état des infrastructures portuaires à Saint-Pierre-et-Miquelon. L'enveloppe qui leur est allouée dans le contrat de convergence et de transformation 2024-2027 s'élève à 13 millions d'euros pour ce qui concerne les infrastructures de transport. Ces 13 millions permettront de réaliser au cours de cette période les travaux jugés prioritaires : une intervention sur le quai Avel Mad à Miquelon pour 10 millions, l'entretien nécessaire à l'exploitation des différents sites portuaires et des réparations d'urgence, notamment à Saint-Pierre, pour 3 millions d'euros.
Il ressort des études diligentées en 2018 par les services de l'État avec l'appui du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), portant sur l'ensemble des infrastructures portuaires de Saint-Pierre et de Miquelon, que le coût des travaux de restauration complète des quais du commerce à Saint-Pierre et de la digue de protection associée sont estimés à 19 millions s'ils sont réalisés en une fois et à 32 millions s'ils sont réalisés en plusieurs phases. Ces montants excèdent l'enveloppe totale relative aux infrastructures de transport pour le territoire.
Dans le contexte budgétaire actuel et en l'état des discussions, le programme budgétaire Infrastructures de transport n'a donc pas la capacité de financer ces travaux sur la période 2024-2027. Soyez néanmoins assuré de l'engagement du ministère en faveur de la rénovation des infrastructures de transport. La conférence Ambition France Transports annoncée par le premier ministre permettra d'identifier des leviers de financement plus pérennes.
M. le président . La parole est à M. Stéphane Lenormand.
M. Stéphane Lenormand . Votre réponse ne me satisfait guère compte tenu de l'urgence. Je retiens qu'il faudra attendre 2027 pour voir une avancée. Si le quai s'éventre et qu'il n'est plus possible d'approvisionner le territoire, le gouvernement aura des problèmes beaucoup plus urgents à gérer…
Auteur : M. Stéphane Lenormand
Type de question : Question orale
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Transports
Ministère répondant : Transports
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 mars 2025