Question orale n° 263 :
Situation de l'usine Sovab de Batilly

17e Législature

Question de : M. Belkhir Belhaddad
Moselle (1re circonscription) - Non inscrit

M. Belkhir Belhaddad alerte M. le ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie, sur la situation de l'usine Sovab de Batilly. M. le député a visité récemment l'usine Sovab de Batilly, lieu d'assemblage de l'utilitaire Renault Master. Les syndicats et le personnel de l'usine ont fait part à M. le député de leurs inquiétudes face aux récentes décisions de la direction. En effet, fin janvier 2025, cette dernière annonçait mettre fin à plus de 700 contrats de travailleurs intérimaires et l'arrêt du travail de nuit. Les conséquences redoutées par les syndicats : une restructuration, qui viendrait notamment toucher en priorité les travailleurs précaires et intérimaires, et une diminution de facto de la rémunération des salariés, réduisant leur pouvoir d'achat et fragilisant davantage l'économie locale. La baisse de production de la Sovab impacterait également les sous-traitants et, potentiellement, les 10 à 12 000 emplois liés à l'usine dans la région. Cela s'inscrit enfin dans un contexte de morosité du marché des véhicules utilitaires, du fait notamment d'un prix élevé de ce type de véhicules ou des nouvelles règles européennes en matière de décarbonation. Les syndicats ont alerté plusieurs ministres sur la situation de l'usine, sur la stratégie de la part de Renault et des conséquences pour l'usine de Batilly. Face à l'avenir incertain de l'usine et de ses salariés et alors que les élus locaux se mobilisent, il lui demande quelles mesures, le Gouvernement envisage de prendre pour soutenir l'activité de la Sovab, préserver les emplois menacés et assurer la continuité de la production des utilitaires Renault à Batilly.

Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025

SOCIÉTÉ DE VÉHICULES AUTOMOBILES DE BATILLY
M. le président . La parole est à M. Belkhir Belhaddad, pour exposer sa question, no 263, relative à la société de véhicules automobiles de Batilly.

M. Belkhir Belhaddad . Je souhaite vous interroger sur la situation de l'usine de la société de véhicules automobiles de Batilly (Sovab), fleuron des départements de la Moselle et de la Meurthe-et-Moselle, et plus largement de notre région.

Située en Meurthe-et-Moselle, cette belle usine est limitrophe de ma circonscription en Moselle, ce qui fait que je côtoie régulièrement ses salariés. Récemment, j'ai eu l'occasion de visiter l'usine Sovab, qui produit l'utilitaire Renault Master depuis de nombreuses années. Les syndicats et le personnel de l'usine m'ont fait part de leurs inquiétudes face aux récentes décisions de la direction. En effet, à la fin du mois de janvier 2025, cette dernière a annoncé mettre fin à plus de 705 contrats de travailleurs intérimaires, soit 70 % des contrats d'intérim, et au travail de nuit. Les syndicats redoutent une restructuration qui toucherait d'abord les travailleurs les plus précaires et les intérimaires, ainsi qu'une diminution de facto de la rémunération des salariés, fragilisant leur pouvoir d'achat et l'économie locale.

La baisse de production de la Sovab affecterait aussi les sous-traitants locaux. Je rappelle que 10 000 à 12 000 emplois sont liés à l'usine dans la région et que nous avons soutenu, à travers le plan France Relance, la production de composants de moteurs électriques par plusieurs de ces sous-traitants. Ce serait donc un formidable gâchis si nous ne soutenions pas cette usine !

La décision de la direction de l'usine s'inscrit dans un contexte de morosité du marché des véhicules utilitaires du fait du prix élevé de ce type de véhicules et des nouvelles règles européennes en matière de décarbonation – on sait que Renault pourrait avoir à payer une pénalité de près de 4 milliards d'euros pour non-respect de ses obligations. Les syndicats ont alerté plusieurs ministres sur la situation de l'usine, la stratégie de Renault et ses conséquences.

Face à l'avenir incertain de l'usine et de ses salariés, alors que les élus locaux se mobilisent, quelles mesures le gouvernement envisage-t-il de prendre afin de soutenir l'activité de la Sovab, dont l'État est actionnaire à hauteur de 15 % ? J'ajoute que, malgré ce contexte, Renault s'en est plutôt bien tiré en 2024, contrairement à Stellantis.

Enfin, permettez-moi d'évoquer la situation des 705 intérimaires, dont beaucoup sont étrangers, venant d'Ukraine, de Somalie, d'Afghanistan et d'Érythrée. Affectés à la chaîne de montage, ils effectuent des tâches d'agents de fabrication de base. Nombre d'entre eux ont le statut de réfugiés politiques. Un service de ramassage de bus a même été mis en place par la Sovab pour les véhiculer. Qu'allons-nous faire pour ces travailleurs étrangers qui ont soutenu l'activité industrielle de notre territoire ?

M. le président . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire . Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence du ministre chargé de l'industrie et de l'énergie, Marc Ferracci.

Je vous remercie pour cette question, qui témoigne de votre engagement au côté de l'usine Sovab et de ses salariés, notamment intérimaires, qui produisent les véhicules utilitaires Renault Master. Votre question fait suite à l'annonce, en janvier 2025, du non-renouvellement de contrats d'intérim. L'enjeu, pour le site de Batilly, est de retrouver des volumes de production suffisants. En effet, le marché français du véhicule utilitaire a subi une baisse de 9 % au début de l'année 2025, ce qui limite le niveau de production. En outre, en ce début d'année, toutes les configurations du nouveau Renault Master ne sont pas encore sorties. Certains clients retardent donc leurs commandes.

Le cabinet de Marc Ferracci a récemment échangé avec les dirigeants de Renault, qui ont confiance dans le succès commercial de ce véhicule utilitaire innovant. Celui-ci assurera des activités pérennes au site de Batilly lorsqu'il aura atteint son régime de croisière, fin 2025. Renault a décidé d'affecter la production de ses véhicules utilitaires à trois de ses usines en France. Une version électrique sera prévue pour chaque modèle. Nous nous en réjouissons.

Cependant, comme vous l'avez rappelé, le marché des utilitaires électriques fait face à des difficultés encore plus importantes que celui des véhicules particuliers. En effet, si le coût total de possession d'un véhicule utilitaire léger électrique est proche de celui de son équivalent thermique, il nécessite un surcroît d'investissement initial. C'est pourquoi la France, par l'intermédiaire de son commissaire européen Stéphane Séjourné, a obtenu de la Commission européenne une flexibilité concernant les amendes auxquelles les constructeurs sont exposés, notamment pour les véhicules utilitaires.

Nous souhaitons cependant que la flexibilité annoncée sur trois ans pour les véhicules particuliers soit étendue à quatre ans pour les utilitaires. Ce report est nécessaire pour limiter le risque que les constructeurs réduisent le volume de production de véhicules thermiques afin d'éviter des amendes. La menace d'une pénalité aurait pu entraver la montée en cadence de la production de véhicules utilitaires Renault Master à Batilly en 2025. Nous pouvons donc collectivement nous réjouir de cette mesure.

Enfin, sachez que le gouvernement restera attentif à l'évolution du marché européen des utilitaires, dont le redressement est important pour les usines françaises de Renault. Il portera aussi une attention particulière à la situation des salariés et des intérimaires de l'usine.

Données clés

Auteur : M. Belkhir Belhaddad

Type de question : Question orale

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Industrie et énergie

Ministère répondant : Industrie et énergie

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 mars 2025

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