Question écrite n° 264 :
Restrictions chinoises sur les produits laitiers européens

17e Législature

Question de : Mme Hélène Laporte
Lot-et-Garonne (2e circonscription) - Rassemblement National

Mme Hélène Laporte attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur les conséquences pour la filière laitière française des mesures annoncées par la Chine quant à l'importation de produits laitiers d'origine européenne. Le 21 août 2024, le gouvernement de la République populaire de Chine a annoncé ouvrir une enquête sur les subventions de soutien à la production laitière pratiquées dans l'Union européenne, au motif que celles-ci pourraient constituer un acte de dumping justifiant une surtaxe de ces produits pour protéger les producteurs chinois. Intervenant à la suite de l'annonce par l'Union européenne de l'imposition de droits de douane élevés sur les véhicules électriques de fabrication chinoise, cette enquête revêt évidemment un caractère de mesure de rétorsion, dans le cadre de ce que de nombreux analystes décrivent déjà comme une guerre commerciale. Alors que 40 % de la production laitière française est exportée, la Chine représente un marché de plus en plus important pour les éleveurs et l'industrie agroalimentaire française. En effet, entre 2000 et 2022, les exportations de matières grasses laitières (beurre et crème) françaises vers la Chine (hors Hong Kong) a été multiplié par 100 (de 55 à 5 500 tonnes), représentant aujourd'hui 10 % des volumes exportés hors de l'UE. Les exportations de lait entier en poudre, passant de 42 à 8 400 tonnes, soit une multiplication par 200, représentent quant à elles plus de 10 % des volumes totaux exportés par la France, au sein et en dehors de l'UE. En 2023, la France était le deuxième fournisseur de produits laitiers à la Chine et les bénéfices se chiffraient à 1,68 milliard d'euros. Alors que la filière laitière française risque de perdre un débouché d'une importance aujourd'hui capitale, elle doit dans le même temps subir une concurrence croissante de la part d'acteurs tels que la Nouvelle-Zélande, renforcée sur le marché européen par l'accord de libre-échange conclu le 9 juillet 2023 et entré en vigueur le 1er mai 2024, lequel prévoit des réductions majeures de droits de douane pour de larges contingents de produits laitiers néo-zélandais, avec notamment 25 000 tonnes de fromages et 3 500 tonnes de lactosérum totalement exonérés et 15 000 tonnes de beurre taxés à hauteur de 5 %. Ainsi, les producteurs français sont doublement handicapés par la libéralisation des importations vers l'Europe et la restriction des exportations vers des marchés comme la Chine. La filière laitière française, historiquement une des plus grandes forces de l'agriculture nationale, est aujourd'hui dans une crise profonde, comme l'illustre la décapitalisation massive du cheptel bovin laitier à hauteur de 400 000 têtes (soit -11 %) depuis 2015. Par ailleurs, en raison des difficultés croissantes à tirer un revenu digne de cette profession, le nombre d'éleveurs laitiers a diminué de 27 % entre 2010 et 2020. Dans cette conjecture désastreuse, elle la prie de lui faire connaître les actions qu'elle compte entreprendre pour protéger les producteurs laitiers.

Réponse publiée le 11 février 2025

Le 21 août 2024, le ministère du commerce de la République populaire de Chine (MOFCOM) a ouvert une enquête antisubventions couvrant certains produits laitiers européens (crèmes et fromages), qui cible à la fois les entreprises européennes et certains dispositifs nationaux et européens. Cette enquète s'ajoute à celles ouvertes par la Chine sur le « brandy » (catégorie qui inclut le Cognac et l'Armagnac), d'une part, et les produits porcins, d'autre part. En effet, ces enquêtes constituent clairement une mesure punitive contraire au droit commercial international, suite à l'enquête lancée par la Commission européenne sur les véhicules électriques ; elles sont injustifiées et inacceptables. Le Gouvernement accompagne les professionnels depuis l'ouverture de cette enquête afin, notamment, de s'assurer que tous les producteurs concernés puissent répondre aux questions des autorités chinoises dans les meilleures conditions possibles. Il accompagne également la filière pour faciliter les discussions avec les autorités chinoises. Le ministère chargé de l'agriculture est particulièrement mobilisé dans cette tâche, aux côtés du ministère chargé de l'économie et du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. En outre, pour défendre les producteurs français, le Gouvernement appelle systématiquement les autorités européennes à contester fermement ce détournement des instruments de défense commerciale par la Chine. Le Gouvernement a également, à plusieurs reprises, alerté la Commission européenne sur sa grande vigilance compte-tenu des enjeux économiques associés pour la filière. Il est demandé à celle-ci de poursuivre les échanges avec les autorités chinoises, en faisant valoir que l'imposition de ces droits additionnels constituerait une mesure punitive inacceptable, et qu'elle ne saurait donc rester sans réponse de la part de l'Union européenne. Ceci conduirait à une escalade à laquelle la Chine n'a aucun intérêt, au vu de la forte contribution qu'apporte son commerce extérieur à sa croissance économique. La Chine gagnerait donc à se garder de prendre de telles mesures qui, in fine, se retourneraient contre elle. Par ailleurs, les autorités françaises sont mobilisées directement vis-à-vis des autorités chinoises, auprès desquelles elles font systématiquement valoir avec force leurs arguments. Cela a notamment été le cas lors du déplacement de la ministre déléguée chargée du commerce extérieur et des français de l'étranger, du 3 au 6 novembre 2024 à Shanghai, lors duquel elle a pu rappeler avec fermeté aux autorités chinoises la détermination française à défendre les filières françaises contre ces enquêtes infondées en droit. Enfin, plus généralement, cette filière comme l'ensemble des filières d'élevage, fait l'objet d'une attention particulière dans le cadre du plan de reconquête de la souveraineté de l'élevage actuellement déployé par le Gouvernement.

Données clés

Auteur : Mme Hélène Laporte

Type de question : Question écrite

Rubrique : Élevage

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 11 février 2025

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