Question orale n° 274 :
Étendre l'AFD par la police municipale au délit d'usage illicite de stupéfiants

17e Législature

Question de : Mme Brigitte Barèges
Tarn-et-Garonne (1re circonscription) - UDR

Mme Brigitte Barèges attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur une situation qui entrave l'efficacité de la police dans la lutte contre le trafic de drogue. Selon les données de l'Office antistupéfiants (Ofast), ce trafic génère un chiffre d'affaires de 3 milliards d'euros chaque année et pas moins de 250 000 personnes en dépendent pour leurs revenus. Face à un réseau criminel aussi puissant, structuré et violent que le narcotrafic, les forces de l'ordre sont confrontées à une charge de travail exponentielle. Malgré cet enjeu majeur de sécurité publique, une incohérence législative persiste. Alors que l'amende forfaitaire délictuelle (AFD) peut être délivrée par la police municipale dans le cadre de certaines infractions, comme le délit d'outrage sexiste, elle reste inexplicablement interdite pour le délit d'usage illicite de stupéfiants. Cette restriction engendre une perte de temps et de ressources considérables. Chaque constatation d'infraction liée à la consommation de stupéfiants nécessite le déplacement d'un officier de police judiciaire (OPJ) pour la rédaction d'un procès-verbal, alors que les policiers municipaux, souvent présents sur les lieux, disposent des outils pour le faire. Le temps perdu par la police nationale dans ces déplacements inutiles pourrait être consacré à des investigations plus approfondies pour lutter contre le narcotrafic. Une solution simple et efficace existe : étendre l'application de l'amende forfaitaire délictuelle au délit d'usage illicite de stupéfiants par la police municipale. Cette mesure permettrait non seulement de gagner du temps sur les procédures et d'optimiser les moyens humains de la police, mais aussi de renforcer le rôle des policiers municipaux. Aussi, elle lui demande si le Gouvernement envisage de faire évoluer la loi pour permettre d'étendre l'application de l'amende forfaitaire délictuelle par la police municipale au délit d'usage illicite de stupéfiants.

Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025

EXTENSION DE L'AMENDE FORFAITAIRE DÉLICTUELLE À L'USAGE DE STUPÉFIANTS
M. le président . La parole est à Mme Brigitte Barèges, pour exposer sa question, no 274, relative à l'extension de l'amende forfaitaire délictuelle à l'usage de stupéfiants.

Mme Brigitte Barèges . Monsieur le ministre, nous ne nous sommes pas concertés, mais ma question est assez similaire à celle qui vient d'être posée, puisqu'il s'agit de donner plus de compétences aux policiers municipaux.

L'accès aux fichiers et la mise à disposition de chiens capables de détecter des stupéfiants sont des dispositions qui avaient été proposées dans la proposition de loi sur le narcotrafic pour renforcer les pouvoirs de la police municipale. J'aimerais, pour ma part, centrer mon propos sur les amendes forfaitaires délictuelles : pourquoi ne pas autoriser les policiers municipaux à en délivrer en cas d'usage de stupéfiants ? Je regrette que les amendements que j'avais déposés en ce sens sur la proposition de loi en cours d'examen aient été considérés comme des cavaliers législatifs, mais je reste pleine d'espoir et c'est pourquoi je vous adresse cette question.

La situation s'aggrave et nous devons absolument aider notre police nationale et la justice à lutter contre le trafic de drogue. Selon les données de l'Office français antistupéfiants (Ofast), ce trafic dégage un chiffre d'affaires de 3 milliards d'euros chaque année et pas moins de 250 000 personnes en dépendent pour leurs revenus. Face à un réseau criminel aussi puissant, structuré et violent, nos forces de l’ordre sont confrontées à une charge de travail exponentielle – dont il a beaucoup été question au cours de nos débats depuis une semaine.

Nos polices municipales, notamment celle de Montauban, qui est particulièrement structurée, pourraient être un atout majeur dans cette lutte contre le narcotrafic si elles pouvaient donner cette fameuse amende forfaitaire délictuelle qu'elles infligent déjà pour d'autres infractions, comme le délit d'outrage sexiste. Il est extraordinaire qu'on ait toujours refusé qu'elles puissent en prononcer en cas d'usage illicite de stupéfiants. C'est bien dommage, car cela entraîne une perte de temps et de ressources. À ce jour, en l'état du droit positif, pour constater une infraction, on est obligé d'appeler le commissariat et de requérir le déplacement d'un officier de police judiciaire (OPJ) pour la rédaction d'un procès-verbal, alors que les policiers municipaux seraient à même d'intervenir rapidement s'ils avaient les outils pour le faire.

Je suis contente de vous avoir entendu dire que le Beauvau des polices municipales rendra bientôt ses conclusions : nous les attendons depuis tellement longtemps ! Sur les questions de l'accès aux fichiers, de la mise à disposition de chiens, du continuum de sécurité et des amendes forfaitaires délictuelles, il faut avancer. Si nos policiers municipaux pouvaient délivrer ces fameuses amendes, cela soulagerait considérablement la police nationale.

M. le président . La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur . Comme je l'ai dit tout à l'heure à votre collègue, le Beauvau des polices municipales va enfin se terminer. Vous savez qu'il a subi les affres de la politique, mais j'ai pu organiser assez rapidement, ces derniers temps, des réunions auxquelles vous avez participé et nous sommes au clair sur les premières concertations. Nous sommes actuellement en train de compiler les contributions et l'objectif est d'avoir un texte prêt – pas forcément examiné, mais prêt – avant l'été. Cela devrait donc aller assez vite.

Par ailleurs, nul n'ignore désormais – le cas de Mulhouse n'est pas unique – que les policiers municipaux participent activement au continuum de sécurité et, s'agissant de la sécurité du quotidien, se trouvent en première ligne. Il est certain que, juridiquement – le matériel constituant une autre question –, ils ne sont pas suffisamment équipés pour remplir toutes les missions que nous souhaitons, puisque nous entendons, en matière de stupéfiants, leur donner davantage de pouvoir, notamment celui d'infliger des amendes forfaitaires délictuelles ; s'y ajoutent les saisies et bien d'autres sujets.

Cet aspect juridique, qui découle de l'article 66 de la Constitution, reste l'objet de notre vigilance absolue : pour accomplir certaines missions, il faut être OPJ et agir sous le contrôle du procureur de la République. Nous devons donc, par un texte, faire évoluer la situation afin que le policier municipal reçoive soit la qualité d'OPJ, soit l'autorisation d'exercer de nouvelles capacités. Au moment où je vous parle, je ne peux rien annoncer, les choses n'étant pas encore complètement précisées ; néanmoins, nous allons dans le sens que vous évoquiez – il est d'ailleurs fondamental que vous participiez à ce travail. Je le répète, notre objectif est un texte donnant davantage de pouvoir aux policiers municipaux, que je profite de l'occasion pour saluer une fois de plus.

M. le président . La parole est à Mme Brigitte Barèges.

Mme Brigitte Barèges . Merci, monsieur le ministre. Puis-je simplement vous faire remarquer que, sans avoir la qualité d'OPJ, les policiers municipaux, dans certains domaines, délivrent déjà des amendes forfaitaires délictuelles ? Il nous faudra mettre cela au point ensemble, car je suis partante pour y travailler avec vous.

Données clés

Auteur : Mme Brigitte Barèges

Type de question : Question orale

Rubrique : Drogue

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 mars 2025

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