Répartition de l'IFER et prise en compte du repowering des parcs éoliens
Question de :
M. Philippe Vigier
Eure-et-Loir (4e circonscription) - Les Démocrates
M. Philippe Vigier interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la répartition de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) appliquée aux installations éoliennes. Actuellement, la répartition des recettes de l'IFER pour les éoliennes terrestres favorise principalement les départements et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), au détriment des communes qui accueillent ces infrastructures. En effet, la législation en vigueur prévoit une distinction entre les installations : pour les éoliennes installées avant 2019, l'intégralité de l'IFER est perçue par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ; pour les installations postérieures à 2019, 20 % de l'IFER peuvent être attribués aux communes, à condition qu'une délibération en ce sens soit prise, tandis que 50 % restent aux EPCI et 30 % aux départements. À titre de comparaison, l'IFER photovoltaïque est répartie de manière plus équitable, avec 50 % pour les communes et 50 % pour les départements (article 1519 F du CGI). Or les nuisances générées par les parcs éoliens, notamment les impacts visuels et sonores, concernent au premier chef les habitants et les collectivités locales qui font le choix d'accepter l'implantation de ces infrastructures dans une démarche volontaire de développement durable. En facilitant la transition énergétique, elles contribuent à l'effort national en matière d'énergies renouvelables, tout en supportant les contraintes associées. Il est donc essentiel que la fiscalité tienne compte de cette implication en leur accordant une part plus équilibrée des retombées financières. Contrairement aux installations photovoltaïques, dont l'IFER est répartie équitablement entre communes et départements (50 %-50 %), la fiscalité appliquée aux éoliennes ne reflète pas cette logique de juste répartition. De plus, le développement du repowering, qui consiste à remplacer d'anciennes éoliennes par des modèles plus performants mais plus imposants, accentue ces nuisances pour les riverains. Cependant, le repowering ne constitue pas un « nouveau projet » d'un point de vue fiscal, mais une simple modification d'installation existante. Ce qui entraîne une absence de versement de l'IFER aux communes Ainsi si une éolienne mise en service avant 2019 est remplacée par une nouvelle machine plus performante et plus imposante, aucune IFER n'est générée au profit de la commune, même si l'impact est comparable à celui d'une nouvelle implantation. En conséquence, il lui demande s'il envisage de réformer la répartition de l'IFER éolien afin d'accorder aux communes une part de 50 %, à l'instar de l'IFER photovoltaïque. Il l'interroge également sur la possibilité d'intégrer le repowering dans ce dispositif, de manière à ce que les communes bénéficient de cette fiscalité en proportion des nuisances supportées et en reconnaissance de leur engagement en faveur du développement durable.
Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025
RÉPARTITION DU PRODUIT DE L'IMPOSITION FORFAITAIRE SUR LES ENTREPRISES DE RÉSEAUX
M. le président . La parole est à M. Philippe Vigier, pour exposer sa question, no 277, relative à la répartition du produit de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux.
M. Philippe Vigier . En tant que ministre de l'énergie, vous êtes chargé d'un domaine dans lequel nous avons, chacun le sait, des besoins pour faire tourner le pays. Les entreprises et les ménages sont consommateurs d'énergie et les besoins iront grandissant au fil du temps ; il faut y faire face. C'est la raison pour laquelle la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a instauré la programmation pluriannuelle de l'énergie. La décarbonation est indispensable, d'où la relance du nucléaire et l'accompagnement des énergies renouvelables.
Dans mon département, que vous connaissez bien, monsieur le ministre, les énergies renouvelables, notamment les éoliennes, ont une longue histoire – cela dure depuis plus de vingt ans. Ma circonscription compte plus de 200 mâts. Cependant, développer les énergies renouvelables, installer des éoliennes, un parc photovoltaïque et des méthaniseurs – la méthanisation n'est pas un petit sujet – suppose une acceptation par les populations – il faut convaincre les élus.
Pour atteindre l'objectif d'énergies décarbonées fixé par le gouvernement et faire face aux besoins, il faut être au rendez-vous. Nous rencontrons la difficulté suivante : pour les éoliennes installées avant 2019, l'intégralité de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau, l'Ifer – c'est un nom un peu barbare mais qui reflète bien le contenu de cette taxe –, tombe dans les poches des intercommunalités. Pour les installations postérieures à 2019, 20 % de l'Ifer peuvent être attribués aux communes, à condition qu'une délibération en ce sens ait été prise, tandis qu'une partie est attribuée aux départements et une partie aux intercommunalités.
Nous sommes à un moment majeur : celui du repowering, qui consiste à remplacer des éoliennes qui pouvaient produire 1 ou 2 mégawatts par des éoliennes capables d'en produire 5, 6, 7, bientôt 8. Cela ne se fait pas tout seul : il faut des mâts plus hauts et il faut déplacer l'éolienne – la nouvelle éolienne n'est pas installée au même endroit que l'ancienne –, donc un nouveau permis de construire.
Dans mon département, nous avons lancé une charte des énergies renouvelables, que nous avons réactualisée il y a quelques jours avec les services préfectoraux. L'acceptation des élus passe par le fait que la fiscalité revienne à un moment ou à un autre dans les poches des communes. Or le repowering n'est pas considéré comme une nouvelle implantation. La fiscalité reste identique à celle d'avant 2019, ce qui suscite l'incompréhension des élus. Il est important que le gouvernement précise les choses. Avec une seule nouvelle éolienne, on produit autant qu'avec quatre anciennes – nous devons l'avoir en tête au moment où tout ce qui pouvait être fait en matière d'encerclement des villages et des directives paysagères l'a été. La réponse du gouvernement est très attendue.
M. le président . La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Marc Ferracci, ministre chargé de l'industrie et de l'énergie. Je vous remercie pour votre question au sujet de l'éolien terrestre, en particulier pour l'attention que vous prêtez au renouvellement des installations existantes. Je tiens à vous assurer de l'engagement du gouvernement en faveur de l'éolien, qui est une composante à part entière de notre stratégie de souveraineté énergétique.
Aujourd'hui, l'éolien terrestre représente 23,5 gigawatts de puissance installée, soit 10 % de notre consommation électrique. La filière connaît un rythme de développement régulier : 1,2 gigawatt de nouvelles capacités ont été raccordées en 2024 et 13,1 gigawatts de projets sont en cours d'instruction. Nous arrivons à un tournant : les premiers parcs, installés il y a une vingtaine d'années, doivent être renouvelés, ce qui offre un potentiel d'amélioration des performances des installations.
Ce renouvellement, loin d'être un simple remplacement, est une opportunité pour accélérer la transition écologique et pour réduire certaines nuisances pour les riverains. Il s'agit de capitaliser sur l'existant, en se concentrant sur les sites déjà marqués par la présence d'éoliennes. Nous souhaitons améliorer les performances grâce à des éoliennes plus puissantes, ce qui permet, dans certains cas, d'en réduire le nombre, donc d'en limiter l'impact visuel. J'entends vos questionnements sur les retombées économiques et le traitement fiscal de ces installations dans le cadre de l'Ifer, en particulier pour les collectivités s'engageant dans un projet de renouvellement.
Nous avons la conviction que les territoires doivent tirer pleinement parti des infrastructures qu'ils accueillent, du point de vue de la fiscalité mais aussi de la création d'emplois et des prix de l'électricité. Nous avons pris des mesures concrètes en ce sens. En février, nous avons élargi par arrêté l'autoconsommation collective aux projets éoliens, ce qui permettra aux collectivités d'accéder à une énergie plus compétitive et produite localement. Nous travaillons aussi avec la filière pour simplifier les procédures de renouvellement afin d'accélérer les projets tout en garantissant un cadre stable pour les territoires. Nous poursuivons enfin le dialogue avec cette dernière sur tous ces sujets tout en veillant à l'impact sur les finances publiques, afin de poursuivre notre cap sur la transition énergétique. Nous sommes à votre écoute pour discuter des recommandations qui peuvent être faites pour améliorer ce cadre.
M. le président . La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier . Vous l'aurez compris, il y a un sujet d'acceptation par les collectivités. Comme vous l'avez très bien dit, pour faire face à la nécessité d'augmenter l'énergie disponible tout en profitant de l'opportunité du repowering, il faut considérer une installation remplacée par une nouvelle machine plus performante comme un nouveau projet, aussi d'un point de vue fiscal – les élus ne comprendraient pas que l'on revienne en arrière.
Auteur : M. Philippe Vigier
Type de question : Question orale
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 mars 2025