Question écrite n° 2795 :
Pollution des eaux potables aux PFAS et contrôle de la qualité

17e Législature

Question de : M. Sylvain Berrios
Val-de-Marne (1re circonscription) - Horizons & Indépendants

M. Sylvain Berrios appelle l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques sur la pollution relative aux per- et polyfluoroalkylées (PFAS) dans les eaux destinées à la consommation humaine, sur les mesures de contrôle existantes ainsi que sur le plan de gestion en cas de dépassement des limites autorisées. Les PFAS sont utilisées dans la production chimique, l'industrie et sont présentes dans certains pesticides. Ces molécules sont ensuite rejetées dans l'environnement où elles persistent et s'accumulent dans les nappes phréatiques et les cours d'eau, y compris la Seine et ses affluents dont la Marne, sur tout le territoire. Or ces molécules comportent des risques pour les écosystèmes et la santé humaine, avec notamment le développement de cancers et des impacts sur le système immunitaire et la fertilité. La révision de directive européenne sur l'eau potable (2020/2184), transposée en 2022 par ordonnance en droit français prévoit la mise en place de contrôles réguliers pour les PFAS dès le 1er janvier 2026 et instaure un seuil de 0,1 µg/L pour la somme de 20 types de PFAS listés particulièrement en raison de leur effet délétère pour la santé. Un autre paramètre plus global mesurant la somme d'un plus grand nombre de types de PFAS, PFAS « totaux », est également introduit avec une limite de qualité de 0,50 µg/L. Cependant, d'autres pays européens, comme les Pays-Bas, ont décidé de renfoncer la directive en établissant des limites plus contraignantes avec des seuils plus bas ou des restrictions spécifiques pour certains types de PFAS. En outre, en raison de la grande variabilité des résultats lors des contrôles, le dispositif actuel prévoit, en cas de contrôle positif aux PFAS, un deuxième contrôle ultérieur de l'eau pour confirmer la pollution, ce qui peut retarder la détection. Enfin, même avec un second contrôle positif et donc une eau déclarée non-conforme et selon la stratégie de gestion actuelle détaillée dans une position interministérielle actuelle établie en 2023, cette non-conformité n'entraîne pas de restriction sur l'usage de l'eau, mais uniquement l'obligation de prendre toute autre mesure nécessaire. Cette situation peut favoriser l'exposition des usagers de sources contaminées à une pollution prolongée aux PFAS. M. le député souhaite donc interroger la ministre, d'une part sur la stratégie adoptée pour garantir la qualité des contrôles relatifs aux PFAS dans les eaux destinées à la consommation humaine dont les moyens qui y sont alloués et la pertinence des seuils retenus pour la non-conformité. D'autre part, il appelle son attention sur la nécessité de mettre en place une réelle stratégie de gestion des cas de non-conformité, en renforcement de la position interministérielle actuelle.

Réponse publiée le 29 avril 2025

Avec la transposition de la directive (UE) 2020/2184 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020 relative à la qualité des Eaux destinées à la consommation humaine (EDCH) (refonte), la recherche des composés perfluorés ou PFAS est rendue obligatoire dans le cadre du contrôle sanitaire des Agences régionales de santé (ARS), sur l'EDCH et les ressources en eau utilisées pour la production d'EDCH, à partir de janvier 2026. Les capacités analytiques des laboratoires se développent à cette fin. Certaines ARS intègrent d'ores et déjà les PFAS dans les paramètres du contrôle sanitaire. C'est également le cas de certaines Personnes responsables de la production ou de la distribution d'eau (PRPDE) qui tiennent compte des PFAS dans leur programme de surveillance. En parallèle, après une première campagne de mesures sur les PFAS dans les EDCH en 2010-2011, le laboratoire d'hydrologie de Nancy (LHN) de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), laboratoire de référence pour les EDCH, a lancé, à la demande du ministère chargé de la santé, une nouvelle campagne nationale exploratoire sur la période 2023-2026. Dans ce cadre, 34 PFAS sont recherchés sur plusieurs centaines d'échantillons d'EDCH. L'acquisition de l'ensemble de ces données devrait permettre de disposer d'une vision des situations dégradées sur le territoire national d'ici à mi-2025. Par anticipation de la réglementation européenne, les nouvelles limites de qualité (0,1 µg/L dans l'EDCH et 2 µg/L sur l'eau brute), s'appliquent pour la somme de 20 PFAS (liste établie par la directive 2020/2184) depuis le 1er janvier 2023. Ces valeurs permettent aux PRPDE et aux autorités locales de gérer dès à présent les situations de non-conformités pour ces nouveaux paramètres. Afin d'appuyer les décisions en matière de gestion des risques sanitaires, l'Anses a été saisie par le Gouvernement en novembre 2022 afin d'évaluer les risques sanitaires et les expositions liés aux PFAS. L'expertise de l'Anses devrait permettre de guider les acteurs nationaux et locaux en produisant des référentiels sanitaires pour des substances prioritaires et en proposant des mesures d'aide à la gestion des risques (surveillance, contrôle, réglementation, valeurs repères, etc.). De son côté, la Commission européenne a saisi l'Organisation mondiale de la santé en décembre 2023 pour définir une méthodologie de priorisation des PFAS à enjeux sanitaires et établir des valeurs de gestion dans les EDCH. Les résultats de ces travaux sont attendus en 2025/2026. Sur cette base, la Commission européenne pourrait proposer de faire évoluer la directive n° 2020/2184. La gestion des situations de non-respect des exigences de qualité des eaux distribuées au robinet est très encadrée par la réglementation : elle repose sur l'appréciation, en particulier par l'Agence régionale de santé (ARS), de la situation et des risques encourus par la population. En cas de dépassement d'une limite de qualité, la personne responsable de la production et distribution de l'eau doit immédiatement informer le maire et les autorités sanitaires (ARS), procéder à une enquête afin de déterminer les causes du problème. Elle doit également prendre toutes les mesures nécessaires pour rétablir la qualité de l'eau (par exemple, utilisation d'une autre ressource en eau, interconnexion des réseaux, dilution, traitement de l'eau). En cas de risque pour la santé, l'exploitant, en lien avec l'ARS, diffuse des recommandations d'usage à la population, en particulier aux groupes de population les plus sensibles. Selon les situations, il peut aussi recommander aux populations les plus sensibles de ne pas consommer l'eau pour l'alimentation ou pour l'hygiène quotidienne. Dans ce cas, le préfet peut demander la mise en place de mesures de réduction des émissions de PFAS par les activités industrielles productrices au titre de ses pouvoirs de police des Installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) et dans le respect des règles de cette police administrative, notamment l'obligation d'une approche proportionnée et soutenable sur le plan technico-économique. L'évolution des connaissances scientifiques sur les dangers et les risques des PFAS permet de faire évoluer les mesures de gestion, le cas échéant. Les modalités de gestion spécifiques aux PFAS dans les EDCH sont d'ores et déjà précisées par instruction du ministère chargé de la santé aux ARS du 12 mars 2024. Cette instruction sera prochainement actualisée sur la base de l'avis du HCSP publié le 18 décembre 2024 afin de préciser les modalités de confirmation des signaux, d'améliorer la connaissance de la présence des PFAS dans les EDCH et d'engager des actions pour réduire au plus bas possible la contamination aux PFAS par la mobilisation de l'ensemble des acteurs sur le terrain depuis les rejets jusqu'au robinet des consommateurs.

Données clés

Auteur : M. Sylvain Berrios

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pollution

Ministère interrogé : Transition écologique, énergie, climat et prévention des risques

Ministère répondant : Santé et accès aux soins

Dates :
Question publiée le 10 décembre 2024
Réponse publiée le 29 avril 2025

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