Protection par la France des ressortissants haïtiens
Question de :
Mme Gabrielle Cathala
Val-d'Oise (6e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Gabrielle Cathala alerte M. le ministre de l'intérieur sur la situation dramatique des ressortissants haïtiens en France, qui continuent d'être placés en centre de rétention administrative (CRA) et expulsés vers Haïti, en dépit de la gravité de la situation sécuritaire et humanitaire dans ce pays. Haïti est aujourd'hui plongé dans un chaos sans précédent, comme en attestent les rapports récents des Nations unies. En 2023, la violence des gangs en Haïti a causé près de 5 000 décès et provoqué le déplacement de plus de 700 000 personnes. 80 % de la capitale Port-au-Prince est aujourd'hui sous le contrôle de gangs armés, rendant impossible toute garantie de sécurité pour les personnes renvoyées dans ce pays. Ces groupes perpètrent des actes de violence généralisée contre les populations civiles et s'attaquent également aux institutions. Ce contexte expose les individus renvoyés à des risques certains de persécutions, de violences et, dans de nombreux cas, à la mort. Mme la députée s'étonne que, dans ce contexte, le taux de protection à l'OFPRA des ressortissants haïtiens ne s'établisse qu'à 36,3 % en 2023 et qu'en 2024 douze d'entre eux aient été placés en rétention administrative en vue d'être expulsés du territoire français. En vertu des principes fondamentaux du droit international des réfugiés, consacrés notamment par la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, la France est tenue de garantir le principe de non-refoulement. Ce principe interdit de renvoyer une personne vers un pays où elle risque d'être exposée à des traitements inhumains ou dégradants, ou à des menaces graves contre sa vie ou sa liberté. La jurisprudence récente de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) et de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) confirme le caractère dangereux et inadéquat de ces expulsions. La CNDA a jugé le 5 décembre 2023 que Haïti connaît une situation de violence aveugle justifiant l'octroi de protections subsidiaires. En février 2024, la CEDH a suspendu une expulsion imminente d'un ressortissant haïtien en mettant en avant les risques mortels encourus. Des cas récents montrent pourtant que des préfectures, notamment en Guadeloupe et en Guyane, continuent d'organiser des expulsions vers Port-au-Prince. Des ressortissants haïtiens, dont certains sont arrivés si jeunes en France qu'ils n'ont jamais connu Haïti, se voient refuser le réexamen de leur demande d'asile par l'OFPRA ou la CNDA malgré l'évidence des risques encourus. Mme la députée demande donc à M. le ministre pour quelle raison des expulsions vers Haïti sont régulièrement mises en œuvre en dépit de l'avis unanime des organisations internationales et des jurisprudences convergentes des juridictions européennes et nationales. Elle l'interroge également sur les mesures qu'il compte prendre pour garantir une application stricte du principe de non-refoulement et une prise en compte effective des vulnérabilités particulières des ressortissants haïtiens. Elle souhaite enfin savoir si le Gouvernement envisage d'ajuster les modalités d'instruction des demandes d'asile pour mieux protéger les droits des personnes menacées et mettre fin à des pratiques administratives inadaptées et contraires aux engagements internationaux de la France.
Auteur : Mme Gabrielle Cathala
Type de question : Question écrite
Rubrique : Réfugiés et apatrides
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date :
Question publiée le 10 décembre 2024