Question orale n° 283 :
Tour de contrôle de l'aéroport de Colmar

17e Législature

Question de : Mme Brigitte Klinkert
Haut-Rhin (1re circonscription) - Ensemble pour la République

Mme Brigitte Klinkert interroge M. le ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports, sur l'aéroport de Colmar-Houssen, qui est un outil essentiel à la vitalité économique du Centre-Alsace. Il enregistre plus de 35 000 mouvements par an, un volume nettement supérieur à d'autres plateformes pourtant moins impactées par la réforme du contrôle aérien en cours. Il est un levier stratégique pour l'implantation et l'activité de grandes entreprises industrielles, notamment Liebherr, dont l'un des sites majeurs est directement adjacent à l'aéroport. Or il est prévu que la tour de contrôle de Colmar disparaisse d'ici 2028, dans le cadre d'une réorganisation visant à concentrer les moyens sur des sites centraux. Le service AFIS (airfield flight information service) serait alors mis en place pour remplacer le contrôle aérien traditionnel. Lors d'un récent déplacement présidentiel, la DGAC a explicitement écarté le recours à l'AFIS pour assurer la gestion du trafic sur la plateforme, considérant que cette solution ne garantissait pas un niveau de sécurité suffisant Si cette solution n'est pas jugée adaptée à un vol présidentiel, comment pourrait-elle l'être pour un aéroport enregistrant des dizaines de milliers de mouvements chaque année ? L'argument sécuritaire est d'autant plus fondé que Colmar ne ressemble en rien aux autres aéroports où l'AFIS a été déployé. Ici, il s'agit d'un site urbain dense et d'une mixité de trafic complexe, incluant l'aviation d'affaires, le vol à voile, le parachutisme, les entraînements de compagnies suisses et des missions sanitaires. L'aéroport de Colmar est directement lié au dynamisme économique du territoire. Liebherr, qui y a implanté ses infrastructures en partie grâce à la présence de cette plateforme, pourrait réviser sa stratégie d'investissement si son accès aérien venait à être dégradé. Ce sont des emplois et des investissements qui sont en jeu. Lors des échanges avec la DGAC, il a été évoqué la possibilité de faire de Colmar un site pilote dans la transition du contrôle aérien. M. le ministre peut-il préciser comment cela pourrait se traduire concrètement et quelles garanties il apporte aux acteurs économiques pour que cette transition n'entrave pas le développement du territoire ? Elle lui demande enfin quelle est sa position sur le maintien d'un niveau de contrôle aérien permettant de répondre aux exigences de sécurité et aux besoins des entreprises qui dépendent de cet aéroport ; Colmar est un aéroport stratégique et il mérite une solution à la hauteur de son importance.

Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025

AÉROPORT DE COLMAR
M. le président . La parole est à Mme Brigitte Klinkert, pour exposer sa question, no 283, relative à l'aéroport de Colmar.

Mme Brigitte Klinkert . Ma question concerne l'aéroport de Colmar-Houssen, un outil essentiel à la vitalité économique du centre Alsace et à l'attractivité industrielle de notre territoire. Si les usages de cet aéroport sont nombreux – tourisme, loisir, mouvements militaires ou médicaux d'urgence –, c'est surtout son intérêt pour l'aviation d'affaires qui a permis un fort développement industriel à Colmar et dans sa région. C'est donc un outil précieux pour les entreprises qui emploient des milliers de personnes sur notre territoire et qui contribuent à l'équilibre de notre balance commerciale en exportant leur production.

L'ensemble de ces activités représente plus de 35 000 mouvements par an, soit un volume nettement supérieur à celui d'autres plateformes, qui sont pourtant moins touchées par la réforme du contrôle aérien, laquelle devrait aboutir, à Colmar, à la fin du contrôle aérien en 2028. L’Afis – service d'information de vols et d'alerte –, un système automatisé sans contrôle humain remplacerait alors le contrôle aérien traditionnel. Or, lors d'un récent déplacement du président de la République, la direction générale de l'aviation civile (DGAC) a explicitement écarté le recours à l'Afis, considérant que cette solution ne garantissait pas un niveau de sécurité suffisant. C'est donc bien que cette solution n’est pas opérationnelle – donc insatisfaisante.

Colmar ne ressemble en rien aux autres aéroports où l'Afis a été déployé : nous avons un site urbain dense, à proximité de deux chaînes de montagnes, avec une mixité de trafic particulièrement complexe.

Notre crainte serait que des acteurs économiques de la région révisent leur stratégie d’investissement en cas de dégradation du service, ce qui nuirait à la réindustrialisation de la France – une priorité nationale. Ce sont des emplois et des investissements qui sont en jeu. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous garantir que le contrôle aérien ne sera pas supprimé à Colmar en 2028 et qu’une solution fiable et sécurisée sera trouvée avant toute mise en œuvre de cette réforme ?

M. le président . La parole est à M. le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche . Je vous prie d'excuser le ministre chargé des transports, qui m'a demandé de vous transmettre sa réponse.

La direction générale de l'aviation civile a entamé une transformation de sa direction des services de la navigation aérienne (DSNA), dont l'un des axes consiste à rationaliser son implantation territoriale. En effet, l'implantation très dispersée des services de contrôle aérien – actuellement assuré depuis soixante-dix-neuf sites sur le territoire –, les tensions croissantes sur les effectifs et la nécessité de recentrer les investissements techniques imposent de revoir le périmètre actuel.

L'aérodrome de Colmar, aux côtés de cinq autres terrains, est intégré à la première phase de cette réforme, pour un retrait du service de contrôle aérien à l'horizon 2028. L'objectif de cette réforme est d'adapter le service rendu au trafic d'un aérodrome comme Colmar, sans remettre en cause son activité. En effet, la DGAC comprend parfaitement les enjeux économiques, notamment ceux de l'industrie locale, avec laquelle des échanges réguliers sont menés, mais aussi d'aménagement du territoire, de cet aérodrome.

La DGAC défend ces plateformes de plus petite taille au niveau national mais il est vital, pour en assurer la pérennité, de pouvoir y adapter le service à l'activité ; il ne s'agit aucunement de limiter le développement économique local. La réforme permet en outre de réduire les coûts pour l'ensemble des usagers aéronautiques et d'améliorer la performance, afin de répondre aux attentes des usagers et passagers aériens.

Le retrait du service de contrôle n'implique donc en rien la fin de l'activité des aérodromes concernés, les exploitants pouvant installer un Afis. Il se distingue d'un service de contrôle en ce qu'il ne donne pas d'instructions, ni d'autorisations aux pilotes, mais il leur donne toutes les informations nécessaires pour conduire leur vol en sécurité : conditions météorologiques, état de la piste, situation du trafic environnant, etc.

Des dizaines de services d'information de vols et d'alerte sont déployés en France, sur des aérodromes ayant un volume de trafic parfois supérieur aux six aérodromes concernés par la réforme, une complexité du trafic équivalente et un environnement similaire, comme la proximité d'un milieu urbain dense. C'est par exemple le cas à Angoulême, Arcachon, Vannes, Gap ou encore Valence.

La DGAC confirme que, concernant l'aérodrome de Colmar et compte tenu du niveau et de la complexité du trafic, l'installation d'un service d'information de vols et d'alerte s'avère pertinent, et que la sécurité des vols sera préservée, y compris pour l'accueil d'un avion présidentiel, par exemple.

Mme Brigitte Klinkert . Bonne nouvelle ! (Sourires.)

M. Philippe Baptiste, ministre . Enfin, la moitié des contrôleurs aériens affectés à Colmar partiront à la retraite d'ici 2028, et certains autres sont susceptibles d'effectuer une mobilité vers d'autres aérodromes avant cette date. Il s'agit donc d'aboutir à un accord négocié entre la DGAC et l'exploitant de l'aérodrome pour assurer une transition maîtrisée permettant de préserver la prestation de lutte contre les incendies, cruciale pour l'aviation en général, et pour l'aviation d'affaires en particulier, donc la continuité d'activité.

Des échanges constructifs, y compris concernant l'accompagnement technique et financier de la DGAC pour cette transition, sont d'ores et déjà engagés avec l'exploitant ADC (Aéroport de Colmar).

M. le président . La parole est à Mme Brigitte Klinkert.

Mme Brigitte Klinkert . Je vous remercie de votre réponse et j'entends qu'il est nécessaire de mener cette réforme. Je me permets toutefois de répéter que, sur le site de Colmar, cette solution n'est ni fiable, ni sécurisée. Si elle l'était, l'avion présidentiel aurait pu atterrir sans contrôle aérien. Or ce n'est pas ce qui s'est passé.

M. Philippe Baptiste, ministre . Je transmettrai vos commentaires.

Données clés

Auteur : Mme Brigitte Klinkert

Type de question : Question orale

Rubrique : Transports aériens

Ministère interrogé : Transports

Ministère répondant : Transports

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 25 mars 2025

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