Question écrite n° 2843 :
Rapport de la Cour des comptes sur l'Institut du monde arabe

17e Législature

Question de : M. Michel Guiniot
Oise (6e circonscription) - Rassemblement National

M. Michel Guiniot interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'avenir de l'Institut du monde arabe (IMA) à la suite de la publication d'un rapport accablant de la Cour des comptes à son sujet, en prenant en compte le contexte géopolitique des pays fondateurs de cet institut. Le rapport de la Cour des comptes n° S2024-1394, publié le 9 décembre 2024 pointe de graves dysfonctionnements financiers dans la gestion de l'Institut du monde arabe et en particulier un déficit d'exploitation considérable. Pour reprendre les termes du rapport : « La principale raison de ce déficit d'exploitation est le non-paiement par les États arabes fondateurs de leur quote-part dans le financement de l'IMA, qui devait initialement s'élever à 40 %, aux côtés de la France à hauteur de 60 %. Mais les États arabes n'ont pas respecté l'accord fondateur, malgré les demandes répétées formulées par les représentants du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) au conseil d'administration de l'IMA ou par les plus hautes autorités de l'État, ce qui illustre leur manque d'intérêt pour l'équilibre financier de l'IMA ». À plusieurs reprises, depuis 1996, des solutions ont été proposées aux États arabes impliqués pour leur permettre de solder leur créance, mais divers rapports parlementaires et référés de la Cour des comptes établissent que celles-ci n'ont pas été suivies d'effet. La France finance donc un institut visant notamment à la coopération entre la France et le monde arabe, sans que le monde arabe ne cherche à coopérer de quelque façon que ce soit. Cette divergence de points de vue entraîne des créances non réglées de plusieurs dizaines de millions d'euros dont 22 pays arabes sont redevables, en des proportions différentes. Il ne paraît pas concevable que le ministère des affaires étrangères finance aux frais de l'État un organisme issu d'une coopération à laquelle l'autre partie ne participe pas dans le but de promouvoir un monde qui aujourd'hui rejette la culture occidentale. M. le député souhaite savoir si le récent bouleversement de la Syrie entraînera une remise en cause de cet investissement à perte et comment il peut être envisageable d'obtenir le recouvrement des sommes dues par les États arabes fondateurs. En complément, il lui rappelle que dès 2012, la fréquentation était surévaluée par l'institut, ce qui continue d'être le cas avec moins de 200 000 visiteurs annuels aux offres culturelles indiqués par la Cour des comptes pour 750 000 annoncés en 2023 par l'Institut du monde arabe.

Réponse publiée le 11 mars 2025

Si le rapport de la Cour des comptes au sujet de l'Institut du Monde arabe (IMA), publié le 9 décembre 2024, pointe des difficultés financières et un déficit structurel d'exploitation, imputés notamment par la Cour au non-paiement des contributions par les États arabes fondateurs, il évoque également le dynamisme de cette institution, qui a accueilli 750 000 visiteurs en 2023, dont une grande partie de jeunes et de scolaires. Cette fréquentation témoigne du succès de l'IMA dans sa mission pour faire connaître le monde arabe en France, favoriser les échanges culturels et la réflexion commune sur le monde actuel. L'IMA, créée en 1980 dans le cadre d'un partenariat entre la France et 22 Etats arabes, est une fondation française de droit privé reconnue d'utilité publique. Elle est financée chaque année par une subvention du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE), constante depuis 2012 et qui couvre environ la moitié de son budget. L'Institut bénéficie par ailleurs de recettes propres, comme celles générées par la billetterie, mais aussi de dons de pays arabes. Par exemple, l'Irak a versé 1 million d'euros en 2024 et les Emirats arabes unis ont apporté depuis 2021 une contribution de 3 millions d'euros pour financer les activités d'enseignement de la langue arabe, l'une des missions de l'IMA. Initialement, il était prévu que les États arabes assurent 40 % du financement, tandis que la France s'engageait à hauteur de 60 %. Toutefois, comme le souligne le rapport de la Cour des comptes, cette répartition a fait l'objet de nombreuses difficultés. Il a donc été mis fin à cette modalité en 2014, après que tous les arriérés ont été perçus et versés dans un fonds de dotation qui s'élève à plus de 50 millions d'euros et dont les intérêts viennent alimenter chaque année le budget de l'IMA. Il n'y a donc pas d'impayés des Etats arabes qu'il conviendrait de recouvrer. Le rapport de la Cour des comptes n'en fait d'ailleurs pas état. Conscient des difficultés et des enjeux, le MEAE incite toutefois les pays arabes à améliorer leur contribution financière à l'IMA. À plusieurs reprises, les représentants français au sein des instances de gouvernance de l'IMA les ont appelés à contribuer plus régulièrement à son financement. Ce fut encore le cas lors de la dernière réunion du Haut conseil fin décembre 2024.  L'IMA est une institution singulière qui incarne le lien historique que la France entretient avec les pays et les sociétés dans cette région. Le MEAE est attaché à accompagner la réflexion sur son avenir dans un moment de profonds bouleversements, comme récemment en Syrie. L'IMA est non seulement un lieu de dialogue et de compréhension mutuelle, mais aussi un outil diplomatique et culturel et un acteur essentiel dans la diffusion de nos valeurs. Dans ce contexte, le financement et le soutien à l'IMA sont plus que jamais nécessaires pour assurer le succès de sa mission. La France continuera donc à soutenir l'IMA et l'aidera autant que possible à mobiliser des financements auprès des autres membres fondateurs, mais aussi de fonds privés arabes ou de grands donateurs internationaux.

Données clés

Auteur : M. Michel Guiniot

Type de question : Question écrite

Rubrique : Culture

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 17 décembre 2024
Réponse publiée le 11 mars 2025

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