Conditionner les crédits d'impôt à la sauvegarde des emplois
Question de :
Mme Mathilde Panot
Val-de-Marne (10e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Mathilde Panot interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'utilisation des crédits d'impôt par les grands groupes industriels. En octobre 2024, Sanofi annonce la cession de 50 % de sa filiale Opella, qui emploie 1 700 salariés en France, une opération justifiée par la direction de Sanofi France par un souci de croissance. Le même mois, le plan social annoncé en avril 2024 qui vise à supprimer 330 postes en recherche et développement (R et D), dont 288 sur le site de Vitry-sur-Seine, est déposé par la direction de Sanofi. C'est le troisième plan social en cinq ans, après un plan en 2019 visant 299 postes et signant la fermeture du site Sanofi d'Alfortville (Val-de-Marne), puis un plan en 2021 ciblant 363 postes en R et D, entraînant la fermeture du site de Strasbourg (Bas-Rhin) et un arrêt complet des recherches en neurologie. Dans cette continuité, le plan social de 2024 fait des économies sur la recherche en oncologie, désengageant l'entreprise de la lutte contre le cancer, jugée peu rentable. Le 5 novembre 2024, le groupe annonçait son départ de son siège de Gentilly, présenté comme une opération immobilière, alors qu'il s'inscrit en réalité dans la casse sociale orchestrée au sein de la branche « Recherche et développement » de l'entreprise pharmaceutique. Pourtant, Sanofi reste une entreprise qui réalise d'importants bénéfices. Preuve de cette santé financière, Sanofi a réalisé 43 milliards d'euros de chiffres d'affaires et reversé 4,4 milliards d'euros de dividendes à ses actionnaires en 2023, augmentant de 10 milliards son chiffre d'affaire par rapport à 2014 (33,77 milliards d'euros). Comme pour Michelin, Sanofi a été largement soutenu par la puissance publique pour réaliser ces objectifs de compétitivité. Sanofi a ainsi bénéficié depuis 2008 de 125 à 130 millions d'euros par an d'abattements fiscaux au titre du crédit impôt recherche. Malgré cela, Sanofi a supprimé 2 000 emplois dans ce secteur entre 2009 et 2015. Ainsi, fin 2009, il y avait 6 212 salariés en CDI dans la recherche pharmaceutique en France et seulement 4 237 en janvier 2015, alors que la totalité des crédits d'impôt perçus par le groupe en France est passée de 70 millions d'euros en 2007 à 150 millions en 2013. Dans le cadre de la réorientation de l'entreprise, ce sont en tout près de 3 000 emplois concernés par la suppression ou l'externalisation sur 17 000 emplois. Ainsi, la perception de ces crédits d'impôt n'a assuré en rien la sauvegarde de l'emploi à Sanofi mais aussi dans d'autres grandes entreprises comme Auchan ou Michelin. En effet, depuis plus de 10 ans, Sanofi supprime des postes en CDI dans le cadre de sa « réorganisation de ses activités de recherche » alors que l'entreprise a touché près de 1,5 milliard d'euros d'aides publiques depuis 10 ans. Surtout, l'obsession de la rentabilité financière de Sanofi met en jeu la souveraineté sanitaire du pays : 21 centres de recherche et de production ont été fermés en 20 ans et Sanofi a sacrifié la recherche sur le diabète, les maladies cardio-vasculaires, la résistance aux antibiotiques et désormais sur le cancer. Interrogé dans l'hémicycle sur les récentes suppressions de postes menées par des groupes industriels français, M. Michel Barnier, alors Premier ministre, a affirmé que le Gouvernement allait poser des questions aux groupes industriels ayant bénéficié d'argent public pour savoir si « cet argent avait été mal ou bien utilisé ». Mme la députée s'étonne que cette information ne soit pas déjà connue du Gouvernement. Ainsi, elle souhaite savoir si M. le ministre compte communiquer le résultat de ce travail d'enquête aux parlementaires et sous quels délais. Elle souhaite également savoir comment l'État contrôle ou non l'usage que font les entreprises des sommes d'argent public qu'elles touchent, notamment par le biais des crédits d'impôt. Elle souhaite enfin l'interroger quant à l'urgente nécessité de créer un pôle public du médicament, seul à même de passer de l'organisation de la pénurie par le marché à une garantie d'accès pour tout le peuple français.
Auteur : Mme Mathilde Panot
Type de question : Question écrite
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : Économie, finances et industrie
Ministère répondant : Économie, finances et industrie
Date :
Question publiée le 24 décembre 2024