Report de la fusion ASN - IRSN
Question de :
M. Gérard Leseul
Seine-Maritime (5e circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Gérard Leseul attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques, chargée de l'énergie, au sujet de la mise en application de la loi du 21 mai 2024 relative à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire prévoit la fusion de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l'Institut de radioprotection et de sûreté du nucléaire (IRSN). Ce texte prévoit ainsi la création d'une nouvelle institution, l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), le 1er janvier 2025 par fusion des entités précitées. La nature des débats, la mobilisation du personnel de l'ASN et de l'IRSN ainsi que la courte majorité qui a permis l'adoption de ce projet en 1ère lecture à l'Assemblée nationale a bien montré l'ampleur des incertitudes et des inquiétudes sur la pertinence et la faisabilité de ce projet. Dans leurs auditions par la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, les représentants de l'ASN et de l'IRSN ont indiqué que le calendrier de fusion était très contraint. Une analyse a été menée par les directions des deux organismes avec l'appui de la société Euro Group Consulting pour identifier les actions qui doivent être impérativement réalisées avant le 1er janvier 2025. Cette analyse montrait que plusieurs actions sont encore incertaines (risque important) et 4 d'entre elles sont compromises (risque critique). De plus, alors que la date de fusion approche, il faut noter l'absence d'accord entre l'ASNR et l'Autorité de sûreté nucléaire de défense (ANSD) sur l'organisation de la gestion de crise pour les installations nucléaires de base dans le domaine de la défense nationale. M. le député souhaiterait connaître l'état d'avancement de ces actions à risque important ou critique. En outre, le rapport du Gouvernement au Parlement sur l'avancement des travaux préparatoires à la création de l'Autorité de sûreté nucléaire ainsi que la conduite du changement dans le cadre de cette réforme, remis tardivement au Parlement, indique que la dissolution de l'Assemblée nationale a entraîné un report de l'audition et donc de la nomination du nouveau président de l'ASN du 19 juin 2024 au 16 octobre 2024, alors même qu'il tient par nature un rôle important dans la réalisation de la fusion. Ce retard de nomination complique, là encore, le processus de rapprochement et de fusion. La sécurité et la sûreté nucléaires exigent que cette fusion puisse se faire dans les meilleures conditions pour le personnel, mais aussi et surtout en garantissant un haut niveau de protection des installations nucléaires et des populations. Face aux alertes reçues par les acteurs de la sécurité et de la sûreté nucléaire, M. le député a proposé avec des collègues issus de plusieurs bancs de l'Assemblée nationale, via une proposition de loi, de reporter d'un an la mise en application des prescriptions de la loi n° 2024-450 du 21 mai 2024 relative à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire. Il souhaite qu'elle puisse l'éclairer sur la position du Gouvernement sur la capacité opérationnelle de fonctionnement de l'ASNR au 1er janvier 2025, sur la pertinence d'un report d'un an de la fusion effective de ces structures de sécurité et de sûreté nucléaire et sur l'assurance que les installations et les populations bénéficieront d'un très haut niveau de protection.
Réponse en séance, et publiée le 19 décembre 2024
CRÉATION DE L'AUTORITÉ DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE ET DE RADIOPROTECTION
Mme la présidente . La parole est à M. Gérard Leseul, pour exposer sa question, no 29, relative à la création de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection.
M. Gérard Leseul . Ma question porte sur la mise en application de la loi du 21 mai 2024 relative à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Ce texte prévoit la création d'une nouvelle institution, l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), par la fusion, le 1er janvier 2025, des deux autorités actuelles, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Les débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle pendant plusieurs semaines, la mobilisation des personnels de l'ASN et de l'IRSN ainsi que la très courte majorité ayant permis l'adoption du texte en première lecture à l'Assemblée nationale ont montré l'ampleur des incertitudes et des inquiétudes sur la pertinence et la faisabilité de ce projet dans des délais que les anciens présidents de l'ASN et de l'IRSN, Bernard Doroszczuk et Jean-Christophe Niel, ont qualifiés de très – voire trop – contraints.
D'après l'analyse effectuée par les directions des deux organismes, le risque que plusieurs des actions à réaliser avant le 1er janvier 2025 ne puissent être menées à bien est important ; quatre d'entre elles sont même compromises et présentent un risque critique. Où en sommes-nous ?
Le rapport du gouvernement au Parlement sur l'avancement de cette réforme, remis avec trois mois de retard, indique par ailleurs que la dissolution de l'Assemblée nationale a empêché la nomination dès cet été d'un préfigurateur, ce qui a compliqué le processus de rapprochement et de fusion.
Lors de l'examen du projet de loi de fusion au printemps 2024, le gouvernement avait refusé de fournir aux parlementaires le rapport intitulé « Options de réorganisation pour clarifier, simplifier et consolider la gouvernance du nucléaire civil français » rédigé par M. Daniel Verwaerde, qui semble avoir fondé à lui seul la décision du président de la République de fusionner l'ASN et l'IRSN.
Compte tenu des alertes reçues par les acteurs de la sécurité et de la sûreté nucléaire et du flou entourant les raisons de cette fusion, vécue comme une absorption par les salariés de l'IRSN, j'ai demandé à plusieurs reprises, avec des collègues siégeant sur divers bancs de cette assemblée, la communication de ce rapport. Face aux délais trop contraints et aux difficultés de mise en œuvre de la fusion, nous avons proposé de reporter d'un an la mise en application de la loi du 21 mai 2024 et nous avons déposé une proposition de loi en ce sens.
Afin de nous assurer que les installations nucléaires et les populations bénéficieront d'un très haut niveau de protection, je pose trois questions au gouvernement : quelle sera la date de publication du rapport Verwaerde pour éclairer à la fois les parlementaires et l'Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) ? Quel est l'état d'avancement du projet de fusion entre l'ASN et l'IRSN ? Alors que la question de la pertinence du report d'un an de cette fusion des structures de sécurité et de sûreté nucléaires est posée, quelle est la position du gouvernement sur le sujet ? Monsieur le ministre, j'attends vos réponses.
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l’action publique.
M. Guillaume Kasbarian, ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l’action publique . Je vous prie d'excuser ma collègue Olga Givernet, qui ne peut malheureusement vous répondre ce matin. Votre question me permet d'évoquer notre stratégie pour la relance de la filière nucléaire, défi industriel majeur qui soulève des interrogations en matière de compétences et de sûreté. Avec la baisse de la consommation et le développement des énergies renouvelables, relever ce défi constitue l’une des priorités de notre politique énergétique. La création de la future ASNR y concourra. À cette fin, le gouvernement a mené un important travail de concertation depuis juillet 2023 ; il a échangé avec les personnels tout en s’appuyant sur les travaux des parlementaires. Son souhait est que cette instance soit la plus efficiente en termes de sûreté, de radioprotection et de gouvernance.
Mi-octobre, les commissions du développement durable des deux chambres du Parlement ont auditionné M. Pierre-Marie Abadie. Il a insisté sur l’importance de mettre en place la nouvelle structure au 1er janvier 2025 afin de permettre aux personnels de s’y projeter pleinement. Le gouvernement partage son analyse. Le projet d’organisation a été stabilisé le 7 octobre. Sur plus de 2 000 salariés, vingt-sept employés de l’IRSN et quinze de l’ASN voient le périmètre de leur poste évoluer. Ils seront accompagnés dans cette transition. Dès la fin du mois de novembre, tout sera fonctionnel afin que les rémunérations puissent être versées en janvier 2025. Des tests de virement seront effectués en décembre pour vérifier les derniers paramètres.
Tout est prêt pour le 1er janvier 2025. Nous pourrons prendre tous les décrets nécessaires avant la fin de l’année 2024 pour que la nouvelle instance fonctionne pleinement dès le début de l’année prochaine. Au 1er janvier 2025, nous disposerons du meilleur niveau de sûreté des installations nucléaires de base : le centre de crise unique pour les installations civiles est en place et a effectué trois exercices de crise tandis que l'organisation prévue pour les installations intéressant la défense a effectué un exercice national.
Nous devons aux salariés qui, depuis plus d'un an, rendent la création de l’ASNR possible de la faire aboutir. Tel est le souhait du gouvernement.
Mme la présidente . La parole est à M. Gérard Leseul.
M. Gérard Leseul . Vous tentez de nous rassurer sur ce projet de fusion et vous nous dites que tout sera prêt pour le 1er janvier. Je n'en crois pas un mot ! Les informations qui nous parviennent de différentes instances confirment que de nombreux chantiers ne sont pas aboutis. Par ailleurs, vous n'avez pas répondu à ma question relative à la date de communication du rapport Verwaerde, sur lequel le président de la République s'est fondé pour décider de la fusion des organismes.
Auteur : M. Gérard Leseul
Type de question : Question orale
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Énergie
Ministère répondant : Énergie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 novembre 2024