Extension des dates de péremption des médicaments
Question de :
M. Jean-Luc Warsmann
Ardennes (3e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires
M. Jean-Luc Warsmann interroge M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins, sur les dates de péremption des médicaments mis sur le marché en France. Plusieurs études européennes et américaines portant sur les médicaments les plus usités et faisant l'objet d'achat hors prescription (paracétamol, pommades pédiatriques, sérum physiologique), mais également des antibiotiques régulièrement en rupture de stock comme l'amoxicilline, ont montré qu'ils contenaient souvent plus de 90 % de principe actif après leur date de péremption, parfois plusieurs années au-delà de cette date. La feuille de route de la planification écologique du système de santé, publiée par le ministère en mai 2023, constatait que sur les 50 millions de tonnes équivalent CO2 générés par le système de soins français, 55 % étaient produits par les médicaments et dispositifs médicaux. En outre, trois des champs d'action prioritaires de cette planification peuvent notamment être appliqués à l'usage de médicaments : achats durables, soins écoresponsables et déchets. L'agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) procède parfois à des extensions de péremptions lors de crises sanitaires, par exemple lors de la covid-19, ou à la demande des laboratoires et en informe ensuite les soignants. Il faut saluer cette pratique mais aussi souhaiter qu'elle soit utilisée de manière beaucoup plus massive sur un plus grand nombre de produits. Chaque jour, chaque année, des quantités importantes de médicaments pouvant encore être utilisés sont jetés par des particuliers comme par des établissements de soins. Il s'agit d'un véritable gaspillage qui a un coût économique, sanitaire et environnemental très important. M. le député souhaite savoir quand un allongement plus systématique de la durée de validité des médicaments pourra être mis en œuvre. Il souhaite donc être informé du calendrier des discussions du Gouvernement avec les laboratoires pharmaceutiques et du positionnement de l'ANSM sur ce sujet crucial. Il relève en effet d'un quadruple enjeu de sobriété sanitaire, de santé publique, de budget de la sécurité sociale et de préservation de l'environnement.
Réponse publiée le 15 avril 2025
En France, comme en Europe ou aux Etats-Unis d'Amérique, la date de péremption d'un médicament est proposée par le laboratoire pharmaceutique qui le fabrique en s'appuyant sur des études de stabilité qu'il a réalisées pour démontrer que le médicament reste stable, c'est-à-dire que la quantité de substance active reste identique tout le long de la durée revendiquée, et que des impuretés n'apparaissent pas au cours de la conservation. Cette durée est ensuite approuvée par les autorités compétentes après qu'elles ont procédé à l'évaluation de l'ensemble des données fournies. Ainsi, il n'y a pas de limitation réglementaire ou de cadre plus strict en France au regard d'autres réglementations concernant les durées de conservation des médicaments. En effet, les données fournies par les fabricants de médicaments doivent respecter des normes établies par des recommandations scientifiques internationalement reconnues (guidelines ICH). Dès lors, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) procède à la vérification du respect de ces normes et, le cas échéant, en cas de manquement, refuse la durée de conservation proposée par le fabricant et en autorise une plus courte au regard des éléments fournis. Aujourd'hui, la durée de conservation des médicaments est de 36 mois (3 ans) pour 58 % des médicaments commercialisés en France. Cette durée est plus courte (18 ou 24 mois) pour 30 % d'entre eux et plus longue (5 ans ou plus) pour moins de 10 % d'entre eux. Dans ce contexte, l'ensemble des médicaments commercialisés sur le territoire français possède une date de péremption qui garantit leur qualité et leur efficacité jusqu'au dernier jour du mois de la date indiquée sur l'emballage, sous réserve qu'ils aient été conservés dans les conditions de conservation requises. Ainsi, au-delà de cette date de péremption, l'efficacité et la sécurité du médicament ne peuvent plus être garanties. Plus précisément, lorsque la date de péremption est dépassée, une dégradation des substances entrainant une efficacité moindre du médicament et/ou la formation de produits de dégradation inactifs ou potentiellement néfastes, voire une contamination microbienne, peuvent se produire. Dès lors, la seule mesure d'une quantité résiduelle de matière première après plusieurs années n'est pas suffisante pour attester de la qualité, de l'efficacité et de la sécurité d'un médicament dont la date de péremption indiquée aurait été dépassée. Dans le cadre de ses activités de pharmacovigilance, l'ANSM a reçu depuis 2011, 810 cas mentionnant la prise de médicaments périmés, détériorés ou mal conservés. Parmi ces 810 cas, 177 cas ont présenté un ou plusieurs effets indésirables dont 17 cas mentionnent un risque d'inefficacité ou une suspicion d'inefficacité. Il convient toutefois de noter que, dans le cadre spécifique de la lutte contre les pénuries de médicaments, et afin de permettre à des patients d'accéder à des traitements sans alternatives, l'ANSM peut être amenée à autoriser, après évaluation des données de stabilité fournies par le laboratoire pharmaceutique, l'extension de la durée de conservation de lots encore disponibles sur le marché. Enfin, dans le cadre de la planification écologique du système de santé, l'ANSM a pour projet de proposer des mesures visant à encourager les laboratoires pharmaceutiques à effectuer des études de stabilité et à fournir les résultats correspondants aux autorités réglementaires, afin que celles-ci puissent disposer de l'ensemble des données pertinentes pour pouvoir envisager de prolonger la durée de conservation de leurs spécialités pharmaceutiques, tout en préservant l'efficacité et la sécurité desdites spécialités.
Auteur : M. Jean-Luc Warsmann
Type de question : Question écrite
Rubrique : Pharmacie et médicaments
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Dates :
Question publiée le 31 décembre 2024
Réponse publiée le 15 avril 2025