Question orale n° 304 :
Développement du trafic de stupéfiants en Meurthe-et-Moselle

17e Législature

Question de : M. Anthony Boulogne
Meurthe-et-Moselle (6e circonscription) - Rassemblement National

M. Anthony Boulogne appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le développement du trafic de stupéfiants en Meurthe-et-Moselle. En février 2025, un vaste réseau de narcotrafiquants a été démantelé dans l'agglomération nancéenne (Nancy, Laxou, Maxéville), donnant lieu à quatorze interpellations, la saisie de 90 kilos de stupéfiants, d'armes à feu, dont une arme de guerre et de 90 000 euros en espèces. À Moivrons, la police a découvert un laboratoire de coupe et de conditionnement de l'héroïne. La Meurthe-et-Moselle, en plus d'être gangrénée par le trafic de drogues, devient également un lieu de production à part entière, témoignant de l'emprise territoriale des narcotrafiquants. De nombreuses petites communes rurales sont touchées, notamment dans le bassin mussipontain. Il lui demande donc de lui détailler quelles mesures il compte prendre afin de renforcer la lutte contre le trafic de stupéfiants, assurer le démantèlement des réseaux existants et rétablir la sécurité des habitants du département.

Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025

LUTTE CONTRE LE TRAFIC DE STUPÉFIANTS EN MEURTHE-ET-MOSELLE
M. le président . La parole est à M. Anthony Boulogne, pour exposer sa question, no 304, relative à la lutte contre le trafic de stupéfiants en Meurthe-et-Moselle.

M. Anthony Boulogne . Ma question s'adresse au ministre de l'intérieur, qui avait déclaré que la lutte contre le trafic de stupéfiants était une priorité nationale, la France étant désormais gangrenée par ce trafic au même titre que certains pays d'Amérique latine. Dans ma circonscription, je reçois des témoignages toujours plus nombreux à ce sujet. Vous le savez, nos villages sont de plus en plus concernés.

Depuis le début de l'année, plusieurs points de deal ont été démantelés en Meurthe-et-Moselle. En février, dans plusieurs communes de l'agglomération nancéenne, notamment à Maxéville, de la drogue en provenance des Pays-Bas a été saisie, ainsi que d'importantes quantités d'argent et plusieurs armes chargées, dont une de guerre. Il en a été de même à Pont-à-Mousson. Les individus interpellés sont majoritairement – surprise ! – en situation irrégulière.

Dans les campagnes lorraines, les laboratoires de drogue se multiplient. Je ne cite qu'un exemple : dans le village de Moivrons, qui compte 500 habitants, les enquêteurs viennent de mettre la main sur un site de préparation artisanale d'héroïne.

Lors du récent débat sur la proposition de loi relative à la lutte contre le narcotrafic, les Français ont été stupéfaits d'apprendre que des stupéfiants étaient livrés par drone dans les prisons, notamment dans celle de Nancy-Maxéville.

Dans ce contexte, je tiens à saluer le travail accompli par nos forces de police et de gendarmerie ; leur mobilisation en faveur de la sécurité de nos compatriotes est exemplaire. C'est un travail approfondi et minutieux, qui exige de disposer de moyens et d'effectifs importants. Or force est de constater que le compte n'y est pas. Dans mon département, les syndicats estiment qu'il manque environ une cinquantaine d'officiers de police judiciaire.

Comme nombre de nos compatriotes, les Meurthe-et-Mosellans attendent une réponse forte pour lutter contre ce fléau à l'origine de tant de morts. Dans quelle mesure le gouvernement compte-t-il renforcer les moyens dans mon département et dans ma circonscription pour enrayer le développement de ces trafics et rétablir la sécurité des habitants ?

M. le président . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie et du handicap.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et du handicap . Permettez-moi de vous apporter la réponse préparée par le ministre de l'intérieur.

Vous avez raison, les trafics de stupéfiants s'ancrent désormais sur le territoire national, dans les grandes villes comme dans les campagnes. Le développement et la modification des circuits de distribution ont entraîné une extension des trafics depuis les secteurs urbains vers les zones périurbaines et rurales. Plus aucun département de notre pays n'est épargné par le narcotrafic.

Face à ce fléau, une mobilisation générale s'impose, bien au-delà des seules forces de l'ordre. C'est donc une riposte globale que nous avons engagée. Les consommateurs, collaborateurs actifs du trafic, doivent eux aussi être mis face à leurs responsabilités. S'il faut frapper sans faiblesse les délinquants, il faut également en finir avec une complaisance trop largement répandue.

Des modes d'action adaptés et mobilisant tous les moyens à la main de l'État doivent être mis en place : investigation, occupation du terrain et contrôles administratifs. C'est dans cet esprit que le ministre de l'intérieur a fixé aux préfets et aux forces de l'ordre une méthode et des objectifs très clairs, offrant toute latitude à leur connaissance des territoires. Dans cette lutte acharnée, État et collectivités doivent agir ensemble. C'est l'objet du plan d'action départemental de restauration de la sécurité du quotidien, présenté le 21 février par la préfète de Meurthe-et-Moselle, où l'héroïne est le produit le plus répandu ; la proximité avec la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas en est la cause.

Dans ce département, la direction interdépartementale de la police nationale s'appuie sur près de 1 100 agents, dont plus de 380 dans les seuls services spécialisés de police judiciaire. Ces policiers sont à l'offensive et traquent les trafiquants vingt-quatre heures sur vingt-quatre. En 2024, trente-quatre opérations visant le démantèlement de points de deal ont été conduites par les forces de l'ordre dans la Meurthe-et-Moselle. Elles ont abouti à près de quatre-vingt-dix gardes à vue, à vingt-six écrous et à la saisie de plus de 200 000 euros d'avoirs criminels. Depuis le début de l'année, trois nouvelles opérations de ce type ont été menées.

Le nombre de points de deal est passé de vingt-huit début 2024 à vingt et un aujourd'hui. C'est encore trop, mais nous portons des coups au trafic. Grâce au travail de la cellule de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (Cross), cinq réseaux de trafiquants ont été démantelés l'an dernier dans la Meurthe-et-Moselle, plus de vingt individus ont été écroués et plus de 40 kilogrammes de cocaïne ont été saisis.

Face aux consommateurs, nos services de police et de gendarmerie ne laissent rien passer non plus : 1 041 amendes forfaitaires délictuelles leur ont été infligées en 2024, et déjà près de 150 cette année.

L'action de la gendarmerie en matière de lutte contre les stupéfiants a elle aussi permis d'obtenir des résultats probants dans le département : soixante-cinq trafiquants ont été mis en cause en 2024. Les gendarmes ont conduit des enquêtes sous pseudonyme pour démanteler les trafics, notamment ceux dits Uber shit, qui comprennent des offres de livraison et des vitrines sur les réseaux sociaux.

Il nous faut enfin des moyens techniques et juridiques adaptés ; nous devons réarmer l'État. La proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic, fondée sur une approche transversale, constitue une avancée majeure dans la lutte contre la criminalité organisée. Ces mesures, qui ciblent à la fois les trafiquants, leurs réseaux et leurs avoirs criminels, renforceront l'arsenal législatif et opérationnel contre le narcotrafic. Le texte a été adopté à l'unanimité par le Sénat le 4 février. Le ministre de l'intérieur souhaite qu'il recueille le même soutien transpartisan lorsqu'il sera soumis au vote de votre assemblée.

M. le président . La parole est à M. Anthony Boulogne.

M. Anthony Boulogne . Merci pour le constat et pour les chiffres que vous venez de nous fournir. S'agissant du texte que l'Assemblée s'apprête à voter, votre gouvernement pourra dire merci au Rassemblement national, car les députés qui vous soutiennent n'ont pas été nombreux dans l'hémicycle pour le défendre. S'il est adopté en l'état, c'est grâce à nous. Les Français nous en remercieront.

Données clés

Auteur : M. Anthony Boulogne

Type de question : Question orale

Rubrique : Drogue

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 25 mars 2025

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