Question de : M. Jean-Luc Warsmann
Ardennes (3e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires

M. Jean-Luc Warsmann attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la crise que traverse l'agriculture ardennaise dans la suite de l'entrevue qu'elle a réservée aux acteurs ardennais le 12 novembre 2024, ce dont il tient à la remercier. Le contexte spécifique des Ardennes fait apparaître plusieurs éléments forts : un très grand nombre d'exploitations de culture élevage ovins accompagnant dans plus de 9 exploitations sur 10 des bovins allaitants ; une forte présence de la FCO 3 dans les départements frontaliers de l'Aisne à la Moselle, le département des Ardennes étant très fortement impacté tant par la mortalité et la baisse de production ou les avortements, avec parallèlement une production laitière avec un recul semble-t-il non constaté ailleurs à ce stade ; un taux d'élevages infectés très conséquent, 760 au 12 novembre 2024, avec une mortalité représentant un tiers des pertes actuelles, ce qui signifie que les pertes indirectes sont deux fois plus importantes que la totalité de la mortalité constatée, qu'il s'agisse de jeunes animaux ou d'adultes. Dans ce contexte, le monde agricole ardennais constate en l'état et à ce jour la non-adaptation du plan d'indemnisation à la situation vécue sur le territoire. Par exemple, en ce qui concerne l'indemnisation de la mortalité uniquement à partir de l'âge d'un an, alors que la majorité des mortalités sont constatées sur des animaux âgés de quelques jours ou de quelques semaines, la non-prise en compte des pertes indirectes tel le lait non produit des conséquences des avortements. Il en résulte que de nombreux éleveurs fortement touchés n'ont droit à ce jour à aucune aide. Très concrètement, sur ces 546 élevages déclarés comme foyers infectés fin septembre 2024, seuls 151 dossiers ont été ouverts et seuls 55 seraient à ce jour éligibles pour un acompte maximum de 5 000 euros, alors que dans l'étude qui a été remise à Mme la ministre apparaissait déjà un montant de pertes estimé à 15 millions d'euros, dont 5 millions de mortalité. Le monde agricole ardennais souhaite que le système d'indemnisation soit revu, par exemple en s'inspirant du système d'indemnisation des premiers départements touchés par la MHE en 2023, avec un accroissement considérable de l'acompte beaucoup trop faible à hauteur de 30 %, avec l'indemnisation des bovins et ovins de moins d'un an, avec une vaccination massive et suffisamment précoce pour limiter la reproduction de cette situation en 2025. Enfin, de nombreux éleveurs considèrent que l'agrément rapide du laboratoire départemental d'Hagnicourt permettrait de réduire les délais d'obtention des résultats. Il souhaite connaître sa position sur l'ensemble de ces questions.

Réponse publiée le 27 mai 2025

La loi de santé animale européenne définit la fièvre catarrhale ovine (FCO) comme maladie à programme d'éradication volontaire par les États membres. Lors de la session du 23 juin 2021 du conseil national d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale dans sa section animale et des nombreux comités de pilotage des maladies vectorielles organisés par la direction générale de l'alimentation (DGAL) en 2024, les professionnels de l'élevage ont souhaité que la France ne porte pas auprès de la Commission européenne un programme d'éradication contre la FCO. Pour respecter ce souhait des professionnels agricoles, l'État n'a pas rendu la vaccination obligatoire. Cette dernière est nécessaire uniquement dans le cadre des échanges commerciaux d'animaux entre États membres de l'Union européenne (UE) et pour les exportations. Elle reste autorisée mais volontaire pour les éleveurs qui souhaitent protéger leur troupeau. En ce qui concerne l'aspect financier, l'État est engagé depuis de longue date dans la prévention et la lutte contre cette maladie. Ainsi, conformément à l'arrêté du 10 décembre 2008 fixant les mesures financières relatives à la FCO, il prend en charge les visites vétérinaires en cas de suspicion ainsi que les analyses de sérotypages. Plus récemment, l'arrêté du 9 août 2024 fixant de nouvelles mesures financières a maintenu la prise en charge financière de ces dispositifs et permis l'achat de vaccins. Le Premier ministre a annoncé, le 4 octobre 2024, la mise en place d'une aide d'urgence pour les éleveurs qui subissent les conséquences sanitaires et économiques de la FCO-3, dont le périmètre a été ensuite élargi le 14 novembre 2024 à celles de la FCO-8 pour les ovins. Cette aide d'État à hauteur de 75 millions d'euros (M€) s'appuie sur le régime exempté de notification relatif aux aides destinées à remédier aux dommages causés par des maladies animales, qui ne permet pas la prise en charge des pertes indirectes. L'aide est mise en œuvre et payée par FranceAgriMer pour le compte de l'État et les dossiers sont instruits par les services déconcentrés en département [DDT (M)]. Cette aide prend en charge de façon forfaitaire 100 % des surmortalités dans les élevages confirmés foyers FCO. Les différents paramètres de cette aide ont fait l'objet d'un cycle de consultation des organisations professionnelles agricoles nationales dans un calendrier contraint. Dans un souci de simplicité et de rapidité, l'aide est, à l'exclusion des cas particuliers come les mortalités en estive ou les évolutions du cheptel de plus de 30 % par exemples, versée sans exiger de pièce justificative (hors relevé d'identité bancaire) sur la base des déclarations des éleveurs vérifiées grâce aux bases de données dont dispose l'État sur la situation sanitaire des élevages [statut de foyer, effectifs et mortalités desquelles sont déduites la mortalité de référence (2022)]. Le dépôt de la demande d'aide prenait à peine quelques minutes.  Le Gouvernement a donc tenu son engagement de réactivité pour aider les éleveurs en déployant deux guichets : d'abord le guichet « avance » qui a permis de répondre à l'urgence en novembre 2024 à hauteur de 30 % ; puis le guichet « solde » ouvert du 30 janvier au 14 février 2025, avec près de 9 425 dossiers déposés, actuellement en cours d'instruction et paiement par les services du ministère de l'agricultue et de la souveraineté alimentaire. De, même, l'État a financé en 2024, l'achat de 13,7 millions de doses de vaccins FCO-3 pour un montant de 23,6 M€. Au total, la campagne de vaccination a engagé l'État à hauteur de 37,8 M€, comprenant l'achat des vaccins, leurs stockage et l'acheminement, ainsi que le paiement des prestations vétérinaires associées. En 2025, L'État va sécuriser l'approvisionnement en vaccins, en raison des tensions qui existent sur le marché. Ainsi des doses de vaccins ont été commandées pour lutter contre la FCO-8 au sein des cheptels d'ovins, considérés comme les plus sensibles puis des vaccins contre la FCO-1 (bovins et ovins) afin de déployer un véritable bouclier sanitaire, notamment dans les secteurs frontaliers de l'Espagne. Toutes ces doses seront à disposition gratuitement, dès cet été. Les éleveurs pourront se les procurer via leur vétérinaire sanitaire. La participation financière de l'État à la gestion de cette maladie est exceptionnelle et limitée dans le temps de manière à apporter un appui aux éleveurs. Pour autant, l'État n'a pas vocation à pallier l'ensemble des pertes supportées par les éleveurs. En effet, et en complément des mesures mises en place par l'État, dans certains départements, les groupements de défense sanitaire (GDS) et les collectivités territoriales peuvent également apporter des aides financières complémentaires. Par ailleurs, les professionnels peuvent s'organiser dans le cadre du fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE) pour la mise en place d'un programme d'indemnisation couvrant une partie des coûts et pertes économiques conformément à l'arrêté du 12 avril 2012. L'État contribue à hauteur de 65 % aux dépenses du FMSE. Enfin, il existe des systèmes assurantiels ou des caisses « coups durs » relevant d'initiatives volontaires qui peuvent aider les éleveurs à mieux supporter les pertes causées par la FCO. Dans ce contexte, l'État et les professionnels doivent construire à moyen et long terme une stratégie de surveillance et de lutte qui s'appuiera sur la prévention et placera l'outil vaccinal au cœur du dispositif, permettant de limiter les effets négatifs dans un contexte de « vivre avec ». Les assises du sanitaire animal souhaitées par la ministre et dont les travaux ont été engagés depuis fin janvier 2025 doivent contribuer à la construction de cette stratégie de long terme, notamment la co-construction des contrats sanitaires de filières, permettant d'impliquer pleinement l'ensemble des acteurs. En ce qui concerne l'agrément des laboratoires départementaux, la décision de mise en place ou d'extension d'un réseau de laboratoires agréés est basée sur les besoins identifiés pour les analyses à réaliser dans le cadre des contrôles officiels conduits par les agents du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, notamment en termes de pérennité, de capacités analytiques et de maillage territorial. Les agréments sont délivrés aux laboratoires d'analyse à l'issue d'une procédure d'appel à candidatures visant à sélectionner les laboratoires compétents tout en dimensionnant les réseaux au plus près des besoins identifiés. Le réseau de laboratoires agréés pour le dépistage virologique de la FCO et de la maladie hémorragique épizootique (MHE) compte 52 laboratoires qui ont permis jusqu'à présent de répondre au besoin national en analyses officielles. Une enquête, réalisée fin 2024 par la direction générale de l'alimentation (DGAL) auprès de ces 52 laboratoires a confirmé que leurs capacités analytiques dépassaient les besoins, y compris en période de pic épidémiologique. Par conséquent, l'extension du réseau de laboratoires agréés pour les analyses officielles de dépistage des virus de la FCO et de la MHE n'est pas prévue en l'état actuel de la situation. À noter que 7 laboratoires sont agréés pour le dépistage de ces deux maladies en région Grand Est et 4 dans les Hauts-de-France. Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire reste donc pleinement engagé aux côtés des acteurs professionnels pour lutter contre ces maladies vectorielles et contre toute maladie émergente.

Données clés

Auteur : M. Jean-Luc Warsmann

Type de question : Question écrite

Rubrique : Élevage

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 14 janvier 2025
Réponse publiée le 27 mai 2025

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