Question au Gouvernement n° 30 :
Situation à la Martinique

17e Législature

Question de : Mme Béatrice Bellay
Martinique (3e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 10 octobre 2024


SITUATION À LA MARTINIQUE

Mme la présidente . La parole est à Mme Béatrice Bellay.

Mme Béatrice Bellay . Monsieur le ministre des outre-mer, dans nos pays des océans règnent pauvreté, chômage de masse, empoisonnement environnemental, importations alimentaires par tonnes incommensurables, non-recours au droit, difficultés d'accès aux soins – et j'en passe. Quelle vie nous menons ! Vous le voyez, elle n'a rien à voir avec les bienfaits de la colonisation vantés par votre collègue ministre de l'intérieur. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

Comme l'a précisé mon collègue Jiovanny William, les citoyens ont décidé de se mobiliser afin d'obtenir de la grande distribution une baisse immédiate des prix alimentaires, car ils sont las de payer un pack de bouteilles d'eau plus de 10 euros, las de devoir se priver d'une alimentation saine et équilibrée, las de subir cette captivité commerciale et institutionnelle.

Si depuis le mois d'août les mobilisations ont été plutôt pacifiques, certaines nuits ont été émaillées de détériorations graves de l'espace public, de pillages de magasins – notamment dans le quartier Sainte-Thérèse de Fort-de-France, qui paie le plus lourd tribut à cette colère populaire.

Des négociations ont été entamées, mais votre représentant à la table, le préfet, n'a rien pu dire. Rien, si ce n'est qu'il chercherait des réponses auprès de vous, monsieur le ministre. Peu de temps après, nous avons vu arriver des centaines de gendarmes ainsi que la compagnie républicaine de sécurité n°  8 – la CRS 8, connue pour sa réputation délétère. Est-ce là votre seule réponse à la colère sociale, sourde et bruyante de la Martinique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et GDR.)

Pire, face à la dégradation de toutes les sécurités, vous avez fait le choix de présenter un budget d'austérité, qui prévoit, d'après ce que nous en avons lu, la réduction de 275 millions d'euros dans la mission Outre-mer du projet de loi de finances.

M. Sylvain Maillard . C'est faux !

Mme Béatrice Bellay . Alors que les ultramarins réclament l'engagement de l'État pour assurer le blocage des prix, la continuité territoriale, l'accès aux soins, le développement économique, l'emploi et l'augmentation des salaires, vous rabotez encore et toujours sur ceux qui n'ont déjà rien.

M. Sylvain Maillard . C'est faux !

Mme Béatrice Bellay . Monsieur le ministre, quand prendrez-vous conscience qu'il faut adopter une vision décoloniale de nos territoires et de leurs habitants ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et LFI-NFP.) Quand mettrez-vous en place des mesures d'égalité réelle ? Quelles sont vos réponses aux questions que votre propre préfet… (Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice, dont le temps de parole est écoulé. – Les députés des groupes SOC et LFI-NFP se lèvent et applaudissent. – Les députés des groupes GDR et EcoS applaudissent également.)

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre des outre-mer.

M. François-Noël Buffet, ministre des outre-mer . Dans cette période difficile que traverse la Martinique, et plus généralement les outre-mer, la mesure du propos me paraît essentielle. La façon dont vous avez terminé votre intervention, je ne la partage pas – ni sur le fond ni sur la forme. (Exclamations sur les bancs du groupe SOC.)

M. Jérôme Guedj . On n'est pas à l'école !

M. François-Noël Buffet, ministre . Certes, les choses sont provisoirement rentrées dans l'ordre, mais je reste convaincu qu'au vu des événements en Martinique, il faut d'abord appeler à ce que le calme se maintienne. Je remercie M. le ministre de l'intérieur, qui a permis la présence des forces de l'ordre sur le territoire, alors que des tirs d'armes à feu ont encore eu lieu l'avant-dernière nuit.

Le préfet est au travail et l'État est mobilisé pour apporter une réponse…

Mme Clémence Guetté . C'est n'importe quoi !

M. François-Noël Buffet, ministre . …à la situation ponctuelle de la Martinique.

M. Louis Boyard . Ponctuelle !

M. François-Noël Buffet, ministre . Pourriez-vous avoir la courtoisie de me laisser répondre ?

Le Gouvernement est mobilisé pour répondre rapidement à la situation. Nous savons qu'une importante réunion est prévue jeudi en Martinique ; elle réunira autour du préfet un grand nombre de participants. Nous savons aussi que la problématique de fond est parfaitement identifiée et qu'elle est multifactorielle. Il faudra par la suite s'engager dans un travail beaucoup plus approfondi de réforme. C'est l'une des missions que j'assumerai dans les jours prochains.

Seuls la mesure et le travail en concertation permettront d'aboutir à une solution durable pour les Antilles, si ce n'est pour l'ensemble des outre-mer. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR.)

M. Louis Boyard . C'est honteux !

Données clés

Auteur : Mme Béatrice Bellay

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Outre-mer

Ministère répondant : Outre-mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 octobre 2024

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