FCO et difficultés rencontrées par les exploitants agricoles
Question de :
M. Emmanuel Blairy
Pas-de-Calais (1re circonscription) - Rassemblement National
M. Emmanuel Blairy interroge Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les multiples défis exacerbés par la crise sanitaire liée à la fièvre catarrhale (FCO) à laquelle font face les exploitants agricoles français. Cette maladie a provoqué des pertes importantes dans les élevages ovins et bovins, affectant directement la santé animale et la rentabilité des exploitations. Si des mesures comme la vaccination gratuite des ovins et bovins contre la souche FCO3 depuis novembre 2024 et des indemnisations pour les pertes dues à la FCO8 ont été mises en place, plusieurs problématiques persistent. D'abord, le packaging des vaccins est souvent inadapté, avec des doses excédant largement le nombre d'animaux à traiter, ce qui engendre un gaspillage important et une péremption rapide des stocks. De plus, les ports liés aux vaccins (inflammations locales) ainsi que les avortements post-vaccination augmentent les coûts pour les éleveurs. Sur le plan économique, les pertes dues à la FCO représentent environ 1,2 % du chiffre d'affaires des exploitations, ce qui fragilise davantage un secteur déjà sous pression. Les difficultés sont également aggravées par le manque de vétérinaires en zones rurales, notamment dans des « déserts médicaux vétérinaires » où les exploitants peinent à obtenir un suivi adapté pour leurs troupeaux. Les groupements de défense sanitaire (GDS) jouent un rôle crucial en sensibilisant les éleveurs et en les incitant à vacciner, mais leur action doit être renforcée par un plan national incluant des soutiens logistiques et financiers spécifiques. Des efforts permettront de protéger la santé animale tout en assurant la pérennité des exploitations agricoles. Il lui demande quelles mesures concrètes et adaptées le Gouvernement entend mettre en place pour garantir une meilleure gestion des vaccins, assurer des compensations économiques pérennes et déployer une stratégie nationale visant à pallier la pénurie de vétérinaires en milieu rural.
Réponse publiée le 20 mai 2025
La fièvre catarrhale ovine de sérotype 3 (FCO3) apparue aux Pays Bas fin 2023 a impacté très fortement le Benelux et l'Allemagne en 2024. La loi de santé animale européenne classe la FCO dans la catégorie des maladies à programme d'éradication volontaire laissé aux choix des États membres. Les professionnels de l'élevage ont souhaité en 2021 que la France ne porte pas auprès de la Commission européenne un programme d'éradication contre la FCO ce qui a eu pour conséquence de ne pas rendre la vaccination obligatoire. Cette dernière est cependant nécessaire dans le cadre des échanges commerciaux d'animaux entre États membres de l'Union européenne (UE) et le cas échéant pour les exportations. Elle reste autorisée sur une base volontaire pour les éleveurs qui souhaitent protéger leur troupeau. Le ministère chargé de l'agriculture est pleinement mobilisé pour faire face aux cas de FCO, dans le cadre d'une stratégie sanitaire adaptative consistant à anticiper, dialoguer avec les parties prenantes de façon directe et trouver les bonnes solutions à partir des remontées de terrain. À ce titre, dès que la production des vaccins par les laboratoires l'a permise, le Gouvernement a mis à disposition des éleveurs, gratuitement, dès le mois d'août, des doses vaccinales contre la FCO-3 [11,7 millions de doses (M) commandées au total, dont 9,3 M pour les bovins et 2,4 M pour les ovins]. Pour permettre une couverture optimale de tout le territoire également pour les bovins, le Gouvernement a passé une nouvelle commande de 2 M de doses vaccinales en urgence impérieuse. La zone vaccinale FCO-3 a ainsi été étendue à la France entière pour les ovins et les bovins. L'État a ainsi commandé en 2024, 14 M de doses de vaccins pour un montant total d'environ 37 M d'euros (€). Il faut rappeler que la capacité à vacciner est au cœur de tout : - d'abord, lorsqu'une crise démarre plusieurs pays sont touchés en même temps ; - ensuite, les productions de vaccins sont faibles et reposent sur un très petit nombre de laboratoires ; - par ailleurs, parce que de nouveaux sérotypes se multiplient sans que ne puissent être produits au même rythme des vaccins multivalents ; - enfin, parce qu'il est indispensable de protéger les élevages et les exportations, même en dehors des périodes d'activité vectorielle ; L'enjeu est de pouvoir anticiper l'approvisionnement des élevages en vaccin, dans une approche globale de prévention. C'est tout le rôle du groupe de travail technique dédié aux maladies vectorielles, chapeauté par le ministère chargé de l'agriculture, en collaboration avec tous les acteurs du sanitaire, qui sont chargés de réfléchit aux solutions d'anticipation. Une réunion tripartite entre professionnels, État et laboratoires, sera également organisée très prochainement pour avancer concrètement et collectivement sur le chemin d'une meilleure préparation aux attaques sanitaires. Devant l'ampleur des pertes économiques, le Gouvernement avait arbitré début octobre 2024 comme précisé lors de l'intervention du Premier ministre au salon de l'élevage à Cournon : - pour la FCO-3, la mise en œuvre d'un dispositif d'indemnisation ad hoc des éleveurs affectés par des pertes économiques liées à la seule FCO 3. Il a été précisé que cette indemnisation serait prise en charge dans le cadre d'une enveloppe dont le montant maximum a été arbitré à 75 M€ ; - pour la FCO-8, la mobilisation du fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE), compensé par l'État à hauteur de 65 % des indemnisations versées. Afin de décaisser au plus vite les versements, plutôt que d'attendre comme dans la majorité des cas plusieurs mois, il a été décidé que soit mis en place un volet avance du dispositif d'aide de l'État pour indemniser les éleveurs de bovins et d'ovins (foyers de FCO-3, sérotype émergent, surmortalités parmi les animaux de plus d'un an). Ce volet a concerné les éleveurs dont la confirmation de statut est intervenue du 5 août au 30 septembre 2024 afin de stabiliser les données et d'indemniser les éleveurs ayant connu des pertes tôt. Le téléservice a été ouvert du 18 novembre au 6 décembre 2024. Dans le cadre de cette avance, les surmortalités ont été calculées sur la base d'une estimation des mortalités de référence par catégorie (bovins d'un à 2 ans, bovins de plus de 2 ans, ovins de plus d'un an) par des taux de mortalité de référence (TMR) calculés, à l'échelle de l'ensemble des foyers, du 5 août au 30 septembre 2022, compte tenu du caractère peu représentatif de l'année 2023 pour l'élevage. Un dispositif simple pour les éleveurs, leur demandant très peu de temps de saisie a été mis en place. L'éleveur déclare ainsi, son effectif et les mortalités intervenues au sein de son troupeau. Outre son RIB (relevé d'identité bancaire), il n'a pas à verser de pièce justificative, les services instructeurs s'appuyant sur les confirmations officielles de foyers et les données d'effectifs et d'équarrissage dont l'État dispose. L'avance a été de 30 % de la somme due, à la condition qu'un plancher de 500 € soit respecté, et tient compte de la surmortalité dans les élevages foyers sur la période du 5 août au 30 septembre 2024. Ce guichet entendait répondre à l'urgence de certains élevages afin de leur apporter de la trésorerie dans l'attente du guichet solde, qui a vocation à porter l'essentiel des versements. L'instruction par les DDT (M) s'est faite au fil de l'eau et les premiers dossiers ont été payés avant la clôture budgétaire. De nouvelles réunions du groupe de travail avec les représentants des services déconcentrés et les représentants des organisations professionnelles se sont tenues. Pour la FCO-3, l'État indemnisera les mortalités des éleveurs ovins et bovins dont la confirmation de statut « foyer FCO-3 » est intervenue entre le 5 août et le 31 décembre 2024, que les éleveurs aient demandé ou non une avance, laquelle sera, le cas échéant, déduite de l'aide. Outre le volet FCO-3 (ovins-bovins), et comme indiqué dans le communiqué de presse publié le 14 novembre 2024, le principe de prise en charge de la FCO-8 pour les ovins a été intégré dans le guichet solde et non plus par le FMSE pour les foyers confirmés avant début septembre. C'est une avancée majeure, au terme d'une négociation interministérielle difficile dans le contexte budgétaire actuel. Les travaux conduits en janvier 2025, en étroite collaboration entre le ministère de l'agriculture et les filières, ont abouti à la nécessité d'élargir les critères d'indemnisation. En quelques semaines, et malgré les mêmes contraintes budgétaires, le Gouvernement a pris les décisions suivantes : - de confirmer la prise en charge par l'État de l'ensemble des surmortalités ovines et bovines « adultes » FCO-3 pour la période prise en compte (et déduction de l'avance versée le cas échéant) ; - de confirmer l'éligibilité des foyers confirmés FCO-8 en ovins ; - d'assurer la prise en charge par l'État des surmortalités caprines FCO-3 et 8 ; - d'intégrer les jeunes bovins de moins d'un mois ; - des jeunes animaux de plus de 1-12 mois pour les ovins, bovins et caprins (1-12 mois) ; - de revaloriser des veaux de 0-6 mois (de 200 à 300 €) ; - d'étendre la période de prise en charge allant du 5 août au 31 décembre 2024 pour la FCO-3 et du 1er juin au 31 décembre 2024 pour la FCO-8 (foyers confirmés et mortalités), soit les périodes de suivi sanitaire pour lesquelles les données sont disponibles ; - de confirmer les modalités de dépôt simplifiées hors cas particuliers (exemple : mortalités en estives, carcasses laissées sur des placettes à nourrissage) pris en charge selon des modalités demandant un faible nombre de pièces justificatives. Le volet solde de ce dispositif a été déployé du 30 janvier au 14 février 2025. Les demandes sont actuellement en cours d'instruction par les DD (TM) (directions départementales des territoires et de la mer) et de paiement par FranceAgriMer. S'agissant des pertes indirectes, l'État ne les prendra pas directement en charge. En revanche, le FMSE travaille sur cette question et en collaboration le ministère chargé de l'agriculture pour objectiver ces pertes. Au regard de l'ensemble de ces éléments, au caractère exceptionnel dans le contexte budgétaire actuel, le Gouvernement respecte ses engagements pris en 2024, pour gérer les maladies vectorielles, en particulier la FCO, et continuera à les respecter en 2025. Plus largement, face à cette nouvelle donne, l'État et les professionnels doivent construire à moyen et long terme une stratégie de surveillance et de lutte qui s'appuiera sur la prévention et placera l'outil vaccinal au cœur du dispositif, permettant de limiter les effets négatifs, dans un contexte du « vivre avec ». Pour cette raison, la ministre chargée de l'agriculture a lancé les assises du sanitaire animal le 30 janvier 2025 devant plus de 200 acteurs du sanitaire. La préparation de ces assises a permis d'établir un diagnostic partagé par tous les acteurs sur les faiblesses et les atouts du dispositif sanitaire actuel dans toutes ses composantes. Les assises du sanitaire contribueront à coconstruire entre l'État et les professionnels, les contrats sanitaires de filières, stratégie de long terme permettant d'impliquer pleinement tous les acteurs. La méthode de travail et le calendrier pour la construction des contats sanitaire de filières ont été validés le 8 avril au CNOPSAV (conseil national d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale), le Parlement du sanitaire, dont la réunion a été présidée par la ministre chargée de l'agriculture. Concernant le maillage vétérinaire, l'État est très impliqué sur le sujet. Dès 2016, le ministère chargé de l'agriculture s'est engagé avec les professions vétérinaire et agricole dans une « feuille de route pour le maintien des vétérinaires en productions animales et en territoires ruraux » pour anticiper les évolutions démographiques du monde vétérinaire et assurer ainsi un maillage suffisant pour la santé animale et la santé publique.
Auteur : M. Emmanuel Blairy
Type de question : Question écrite
Rubrique : Élevage
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire
Dates :
Question publiée le 14 janvier 2025
Réponse publiée le 20 mai 2025