Risques de fraudes sur le service « Gérer mes biens immobiliers »
Question de :
Mme Sophie Pantel
Lozère (1re circonscription) - Socialistes et apparentés
Mme Sophie Pantel attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la nécessité de contrôler le nouveau dispositif « Gérer mes biens immobiliers ». Mis en place en 2023, ce dispositif instaure une obligation déclarative à destination des propriétaires de biens immobiliers qui doivent déclarer à l'administration fiscale la situation d'occupation au 1er janvier des logements dont ils sont propriétaires. Or cette évolution administrative s'est accompagnée d'une baisse notoire des bases fiscales des résidences secondaires pour l'année 2024, qui n'est pas sans susciter les interrogations. Alors que la taxe d'habitation sur les résidences principales a été supprimée au 1er janvier 2023, celle sur les résidences secondaires a été conservée et demande donc une déclaration sur la situation d'occupation. Si la Commune ou l'EPCI n'impose pas de taxe d'habitation sur les logements vacants, certains propriétaires ont alors pu découvrir un moyen de contourner l'instrument en déclarant leur résidence secondaire comme vacante pour échapper à la taxe. À l'heure actuelle, il n'existe aucun moyen de contrôle de ces déclarations pour les collectivités territoriales. Pourtant, les pertes financières engendrées par ces fraudes sont lourdes de conséquences et il est urgent de protéger les collectivités de cette nouvelle menace à leur pérennité financière. Face à ces failles du dispositif, Mme la députée l'interroge donc sur la possibilité de fraude au moment de la déclaration et souhaite savoir quelles mesures de contrôle pourront être mises en place pour pallier cette perte de ressources extrêmement préoccupante pour les collectivités.
Réponse publiée le 8 avril 2025
Au niveau national, les bases d'imposition de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS) sont particulièrement dynamiques. Entre 2022 et 2024, les bases d'imposition augmentent de plus de 17 % passant de 11,5 Md€ à 13,5 Md€. Cette hausse trouve son origine dans la prise en compte de l'inflation (l'indice des prix à la consommation retenu pour la revalorisation des bases imposables s'est établi à 11,1 % sur la période) et à la prise en compte des déclarations d'occupation transmises par les propriétaires. La mise en œuvre de la déclaration d'occupation des logements en 2023, qui oblige désormais chaque propriétaire, à chaque changement de situation, à déclarer s'il occupe ses logements à titre principal ou secondaire, s'ils sont loués ou vacants, ne s'est donc pas traduit par une baisse des bases d'imposition de la THRS au niveau national. Pour autant, l'augmentation massive des montants de THRS mis en recouvrement et reversés aux collectivités locales, qui sont passés de moins de 3 Md€ en 2022 à près de 4 Md€ en 2024, est décorrélée de l'évolution réelle du nombre de résidences secondaires imposables à la THRS. En effet, compte tenu des défaillances et erreurs déclaratives des propriétaires, plus de 1,05 Md€ ont ainsi été dégrevés au titre de la THRS 2023 et près de 600 M€ au titre de la THRS de l'année 2024 (situation à mi-mars 2025). Les dégrèvements de THRS et de THLV restant financièrement à la charge de l'État, ces montants indus restent acquis aux collectivités. Pour répondre à la nécessaire fiabilisation des bases d'imposition de la THRS, la direction générale des finances publiques a mis en œuvre plusieurs actions depuis 2023. Tout d'abord, elle accentue ses actions de relance et de communication auprès des propriétaires, par des envois de courriels et de courriers, pour leur expliquer l'utilité et les sensibiliser à l'importance de l'accomplissement de leurs obligations déclaratives, afin de limiter les erreurs ou omissions d'impositions. Ensuite, la loi de finances pour 2025 a introduit plusieurs dispositions qui visent à accroître la fiabilité des bases d'imposition. Elle clarifie le champ d'imposition de la THRS en le recentrant sur les seuls locaux à usage d'habitation et exclue les locaux à usage professionnel. Puis, elle introduit une nouvelle obligation déclarative au III de l'article 1418 du CGI. Aussi, afin d'éviter d'émettre à tort des avis de THRS aux locataires d'une résidence secondaire, les personnes qui louent ou disposent d'une résidence secondaire dont ils ne sont pas propriétaires, pour des raisons professionnelles ou personnelles, doivent désormais la déclarer sur leur déclaration des revenus. Enfin, afin de mieux identifier les raisons de la vacance des logements, la loi de finances pour 2025 impose aux propriétaires de déclarer les motifs de la vacance. L'ensemble de ces mesures législatives doit permettre de mieux identifier les logements imposables à la THRS et aux taxes sur les logements vacants et ainsi fiabiliser les bases d'imposition. Dans le même temps, la direction générale des finances publiques (DGFiP) accentue ses opérations de contrôle et d'émission de rôles supplémentaires au profit des collectivités locales. Ainsi, au titre de la THRS de l'année 2023, plus de 120 000 rôles supplémentaires ont été émis pour un montant mis en recouvrement de près de 155 M€. Au titre de la THRS de l'année 2024, plus de 60 000 rôles supplémentaires ont d'ores et déjà été ordonnancés, à début mars 2025, pour un montant de près de 90 M€. Ces données montrent l'importance des actions de contrôle mises en œuvre par la DGFiP en réponse notamment aux sollicitations des collectivités locales. La DGFiP est en outre attachée aux partenariats noués avec ces dernières. En application de l'article L135 B du livre des procédures fiscales, la DGFiP communique ainsi aux communes la liste des locaux d'habitation recensés comme vacants et la liste des résidences secondaires. La collectivité connaît ainsi le nombre de logements vacants et leur localisation dans la commune et, dans le cas où un logement serait en réalité occupé à titre de résidence secondaire, peut le signaler aux services des finances publiques pour qu'ils mettent à jour le fichier des redevables de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires. Si l'administration des finances publiques dispose d'une compétence exclusive en matière de gestion de l'assiette des impôts directs locaux et de contrôle fiscal, les dispositions législatives actuelles permettent aux collectivités d'intervenir dans le recensement des bases des impositions directes locales en organisant des échanges mutuels d'informations utiles à cette fin entre elles et l'administration.
Auteur : Mme Sophie Pantel
Type de question : Question écrite
Rubrique : Impôts locaux
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Comptes publics
Dates :
Question publiée le 14 janvier 2025
Réponse publiée le 8 avril 2025