Avenir de l'usine Stellantis Douvrin : emplois et souveraineté industrielle
Question de :
M. Bruno Bilde
Pas-de-Calais (12e circonscription) - Rassemblement National
M. Bruno Bilde appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'avenir incertain de l'usine historique Stellantis de Douvrin et sur les conséquences des politiques européennes sur l'industrie automobile française. Depuis plus de cinquante ans, l'usine de Douvrin ancien fleuron de la production de moteurs thermiques incarne un savoir-faire industriel unique dans le bassin minier du Pas-de-Calais. Cependant, sous l'effet des décisions stratégiques du groupe Stellantis, de l'accélération de la transition vers l'électrique et des normes contraignantes imposées par la Commission européenne cette usine emblématique est aujourd'hui menacée de disparition. Avec une réduction massive des effectifs de 5 800 salariés au début des années 2000 à 430 contrats à durée indéterminée actuellement et une chute drastique de la production, l'usine se trouve dans une spirale inquiétante qui conduira à sa fermeture définitive en 2025. Les promesses de reconversion et de transfert des salariés vers la gigafactory voisine de batteries électriques ACC se heurtent à une réalité bien plus préoccupante : des embauches au compte-gouttes, des reclassements insuffisants et un grand nombre de salariés laissés sans perspectives concrètes. Les syndicats unanimes dénoncent une gestion opaque et une stratégie visant à vider l'usine de sa substance sans plan social formel condamnant les salariés à l'incertitude et à une lente agonie professionnelle. Parallèlement, la filière automobile française autrefois un pilier de la souveraineté industrielle nationale est mise à genoux par des normes européennes de plus en plus punitives. L'objectif irréaliste de 100 % de véhicules électriques d'ici 2035 combiné à des amendes exorbitantes et à une concurrence déloyale des véhicules chinois accélère la désindustrialisation du pays menaçant des dizaines de milliers d'emplois et aggravant le déficit commercial. M. le député demande au ministre quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour garantir un avenir à l'usine de Douvrin et à ses salariés dans un contexte de transition écologique qui à ce jour sacrifie la souveraineté industrielle française sur l'autel de décisions idéologiques européennes. Il souhaite également savoir comment le Gouvernement compte agir auprès de la Commission européenne pour infléchir des normes déconnectées des réalités économiques et sociales du pays afin de protéger l'industrie automobile française et ses emplois. Enfin, il demande quelles garanties concrètes peuvent être apportées aux salariés de Stellantis Douvrin concernant leur reclassement, leur rémunération et leurs conditions de travail.
Réponse publiée le 3 juin 2025
L'usine Stellantis de Douvrin est un site important pour la filière automobile française, qui a produit plus de cinquante millions de moteurs. En octobre 2024, la direction du site a confirmé l'arrêt de la fabrication du moteur EP. Cette décision est source de préoccupations légitimes pour les employés du site, avec un fort enjeu en matière d'emplois et de reconversions. Néanmoins, elle intervient également dans un contexte où Douvrin a été choisi pour mettre en place une nouvelle feuille de route industrielle, ambitieuse, avec l'accueil de la gigafactory de batteries exploitées par Automative Cells Company (ACC), co-entreprise en partie détenue par Stellantis. L'implantation de cette nouvelle usine à Douvrin aura des retombées absolument majeures pour l'industrie automobile française et permettra d'équiper les véhicules électriques produits en Europe avec des batteries produites en France. La mise en œuvre de ce projet stratégique pour la filière automobile française repose sur un investissement du groupe et un soutien de l'État tous deux très importants. Par ailleurs, l'implantation ce cette gigafactory à Douvrin ouvre des perspectives importantes en matière d'emploi, y compris aux employés de l'usine historique de Douvrin via une politique de reconversion et de transfert vers la nouvelle usine ACC. Dans le cadre des accords négociés, la réduction des effectifs salariés de l'usine de Douvrin entre 2020 et 2023 s'est faite au travers de mesures sociales, de retraites anticipées, mais aussi de passerelles vers l'usine ACC. Cette politique de reconversion a aussi été rendue possible par l'ouverture du « Battery Training Center » de Douvrin, dont la première promotion a intégré la gigafactory à la fin de l'année 2023. L'État, via le dispositif Transitions collectives (Transco) déployé par la délégation générale à l'emploi et à la formation, a aussi accompagné les salariés désireux d'entamer une reconversion à titre individuel. Un ensemble de solutions ont ainsi été identifiées et mises en oeuvre pour accompagner l'évolution de Douvrin – couplée à la montée en puissance de l'usine ACC. Depuis 2020, l'État est pleinement engagé afin de renforcer et de défendre la compétitivité de la filière automobile française, de garantir l'acceptabilité de la transition et de soutenir la croissance des entreprises du secteur. Avec le plan de relance automobile en 2020, l'État s'est engagé pour soutenir l'ensemble de la filière automobile face aux enjeux de transition industrielle. Un soutien proactif prolongé dans le cadre du plan France 2030, doté d'un budget de 54 milliards d'euros, qui a permis de lancer et de maintenir de nombreux appels à projets afin de soutenir le développement et les activités d'industrialisation de la filière automobile française. Ainsi, l'ensemble de ces instruments ont créé un cadre de soutien transverse doté de moyens exceptionnels pour aider les sites automobiles français de toutes tailles à gagner en compétitivité et à s'inscrire sur les marchés d'avenir. Le Gouvernement a pris note de votre alerte concernant le site de Douvrin et restera vigilant quant à l'évolution de la stratégie du groupe Stellantis à ce sujet. Enfin, concernant l'action auprès de la Commission européenne, la France a demandé et obtenu de la Commission européenne le lancement d'un dialogue stratégique sur la filière automobile, lancé le 30 janvier 2025, qui a permis de dévoiler un plan d'action le 5 mars 2025, afin d'accompagner l'industrie automobile européenne dans sa transformation vers la production de véhicules sans émissions de gaz à effet de serre et plus connectés. Concernant les normes que vous mentionnez, la Commission a justement entendu l'appel de la filière à un lissage des objectifs d'électrification des ventes, pour ne pas pénaliser les constructeurs qui seraient engagés dans l'électrification. La révision du règlement CAFE a été adoptée par le Parlement européen le 8 mai, ouvrant des flexibilités pour les constructeurs, ce dont nous pouvons nous réjouir.
Auteur : M. Bruno Bilde
Type de question : Question écrite
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Dates :
Question publiée le 14 janvier 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025