Inscription d'une définition de la consultation juridique dans la loi
Question de :
Mme Marie-France Lorho
Vaucluse (4e circonscription) - Rassemblement National
Mme Marie-France Lorho interroge M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice sur l'opportunité d'inscrire dans la loi une définition de la consultation juridique. À l'occasion de leur rapport d'information n° 216 daté du 18 décembre 2024 sur les effets de l'intelligence artificielle générative sur les métiers du droit, trois sénateurs de la commission des lois ont mis en valeur les bouleversements de l'intelligence artificielle générative dans l'exercice du droit. S'ils soulignent les vertus d'un outil permettant une meilleure accessibilité et intelligibilité du droit, ils mettent toutefois le législateur en garde contre le risque de délaissement progressif de la consultation juridique auprès d'un professionnel à la faveur de supposées consultations dispensées par certaines plateformes. Les rapporteurs suggèrent l'inscription dans la loi d'une définition de la consultation juridique. Elle aimerait savoir si M. le ministre entend donner suite à cette recommandation, qui permettrait de sécuriser ce dispositif.
Réponse publiée le 8 avril 2025
L'actuel article 54 de la loi du 31 décembre 1971, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, fixe le cadre général d'exercice des activités de consultation en matière juridique et de rédaction d'actes sous seing privé, dans un objectif de protection du justiciable. Ainsi, certaines professions ont, de droit, la qualité pour délivrer des consultations juridiques, ce qui est le cas des membres des professions judiciaires et juridiques réglementées, et notamment des avocats, des notaires ou encore des commissaires de justice. D'autres professions réglementées, comme par exemple les experts comptables, peuvent délivrer des consultations juridiques uniquement dans les strictes limites autorisées par la réglementation et dans les domaines relevant de leur activité principale. Pour d'autres personnes ou organismes, tels que les associations, la délivrance de consultations juridiques est subordonnée à un agrément. Les plateformes en ligne ne sont donc pas autorisées à délivrer des consultations juridiques aux internautes. Ce dispositif protecteur, parfaitement délimité, est renforcé par l'article 66-2 de la loi du 31 décembre 1971 précitée qui sanctionne pénalement la pratique d'une activité juridique non autorisée. Dans ce contexte, et bien qu'il n'existe pas de définition légale de la consultation juridique, il existe une définition stabilisée qui résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. 1ere civ., 15 nov. 2010, n° 09-66.319 ; Cass. 1ere civ., 19 juin 2013, n° 12-20.832 ; Cass 1ere civ., 25 janv. 2017, n° 15-26.353). L'introduction dans la loi d'une définition de la consultation juridique, reprenant les critères dégagés par la cour de Cassation, ne modifierait ni l'état du droit, ni le périmètre des personnes et des actes protégés par la loi du 31 décembre 1971, et apparaît, dès lors, inutile. En effet, que la définition soit jurisprudentielle ou textuelle, il existe un risque de contournement de l'interdiction de donner des consultations juridiques par les legaltech via l'utilisation d'intitulés ambigus comme aide, information ou assistance juridique. L'introduction d'une définition textuelle de la consultation juridique pourrait même s'avérer contre-productive dans un objectif de pérennité de notre réglementation face à des technologies toujours plus innovantes, qui nécessite la souplesse rendue possible par la jurisprudence pour assurer une réelle protection du périmètre du droit. Comme indiqué lors des contributions écrites et auditions devant la commission des lois du Sénat dans le cadre du rapport d'information sur l'intelligence artificielle et les professions du droit, le ministère de la Justice reste opposé à l'introduction d'une définition légale de la consultation juridique.
Auteur : Mme Marie-France Lorho
Type de question : Question écrite
Rubrique : Professions judiciaires et juridiques
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 14 janvier 2025
Réponse publiée le 8 avril 2025