WATTS : une caricature de délocalisation
Question de :
M. François Ruffin
Somme (1re circonscription) - Écologiste et Social
M. François Ruffin interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la délocalisation par Watts de la fabrication des pompes à chaleur. « Nous n'avons pas d'inquiétudes sur les deux années à venir ». C'est ce que déclarait le directeur de l'usine Watts d'Hautvillers-Ouville, dans la Somme, en décembre 2021. L'entreprise américaine, qui revendique un chiffre d'affaires de 370 millions d'euros en Europe, venait de réaliser une année record. Même pas besoin du plan de relance ! Des recrutements allaient être effectués et l'usine de la Somme serait modernisée. Cette usine, régulièrement présentée comme modèle dans le coin, fabrique des pompes à chaleur à destination du marché français. Un produit d'avenir, écologique, dont l'acquisition est subventionnée et dont l'installation est même quasi obligatoire dans les constructions neuves. Depuis le début de l'année 2024 et jusqu'en août, la direction a demandé aux ouvriers de venir travailler le samedi, laissant imaginer un carnet de commandes bien rempli. Mais mardi 2 octobre, cette même direction annonçait aux 98 salariés, aux 25 intérimaires, la fermeture du site, dès le premier semestre 2025. Sans rumeur, sans chômage partiel, sans plan de départ volontaire, cette fermeture est décidée avec brutalité. La production sera notamment délocalisée en Bulgarie. Où le SMIC est de 477 euros ! Des pompes à chaleur pourtant destinées au marché français, désormais fabriquées à 2 500 km de là, simplement parce que la main d'œuvre y est trois fois moins chère. Quel drame pour les ouvriers, pour leurs familles, eux qui à l'arrivée ont fait des heures supplémentaires pour faciliter la délocalisation ! Un drame, aussi, pour la Picardie Maritime qui perd un de ses fleurons. Un drame pour M. Porquet, l'ancien patron, le créateur de l'usine, 103 ans aujourd'hui, qui va assister à la fermeture du site qu'il a vendu au groupe Watts - contre la promesse, l'engagement, de le conserver ici. Un drame pour le pays, qui va perdre un savoir-faire, un produit nécessaire à la transition écologique. Et comment prétendre « ré-industrialiser » quand, en réalité, les délocalisations se poursuivent ? Comment annoncer que l'Europe a changé, alors que c'est la même histoire qui se répète depuis quarante ans ? Aussi, il lui demande s'il compte agir, empêcher cette fermeture, de tout son poids, de toute sa volonté et s'engager à ce qu'aucune pompe à chaleur, produite hors de France, ne soit subventionnée.
Réponse publiée le 3 décembre 2024
Watts Industries France a annoncé le 1er octobre 2024 son projet de fermeture de son site d'Hautvillers-Ouville, occupant 98 salariés spécialisés dans la fonderie de laiton, l'usinage/assemblage de pièces de robinetterie, de plomberie et d'accessoires hydrauliques. Le groupe invoque, à l'appui de son projet, la concurrence accrue des autres pays sur ces types de fabrication, un marché en baisse compte tenu des difficultés du BTP (Bâtiment et Travaux Publics) (neuf et rénovation) entraînant une forte perte de volumes, de profitabilité et de compétitivité et la vétusté de l'outil de production imposant des investissements très lourds pour la remise à niveau. Par ailleurs, les mesures prises auparavant telles que l'intégration de nouvelles fabrications et la fonderie de laiton n'ont pas été suffisantes pour assurer la pérennité du site. Dans le cadre de ce projet, et il faut le souligner, Watts Industries France a décidé de conserver en France les productions « techniques » et « hauts de gamme » pour préserver et renforcer les deux autres sites français de Sorgues et de Virey Le Grand. Seules les productions « basiques » sur lesquelles la concurrence est la plus sévère et les marges les plus faibles seront transférées en Italie et Bulgarie. Il est à noter que l'établissement d'Hautvillers-Ouville ne fabrique pas de pompes à chaleur, ses productions étant destinées à l'ensemble des installations de plomberie/robinetterie des logements individuels/collectifs et des bâtiments industriels/commerciaux/administratifs. Le Gouvernement et les services de l'État regrettent fortement cette décision de fermeture. Ils se sont immédiatement mobilisés, au niveau national (délégation interministérielle aux restructurations des entreprises) et local (Préfecture, direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités (DDETS) de la Somme, commissaire aux restructurations et à la prévention des difficultés des entreprises) pour veiller au respect de la procédure d'information/consultation du comité social et économique (CSE), du dialogue social ainsi qu'à la qualité des mesures d'accompagnement et de reclassement des salariés notamment au regard de leur âge, qualification, mobilité et des perspectives de reclassement sur le bassin d'emploi. L'accord de méthode, négocié actuellement entre l'entreprise et les organisations syndicales, pourra ainsi permettre de préciser les modalités de ce dialogue social et aboutir, ainsi, à la signature d'un accord majoritaire sur le plan de sauvegarde de l'emploi à l'issue de la procédure d'information/consultation du CSE. Cette mobilisation porte également sur les actions engagées par l'entreprise pour rechercher un repreneur de l'activité et/ou du site avec l'appui du cabinet spécialisé ONEIDA en lien avec l'ensemble des acteurs locaux (élus, collectivités territoriales, entreprises, CCI…) afin de permettre la sauvegarde des emplois industriels à Hautvillers-Ouville et, le cas échéant, sur les actions de revitalisation du territoire qui seront initiées par l'entreprise. Un suivi territorial de ce projet est d'ores et déjà mis en œuvre par le Préfet de la Somme et sera poursuivi dans les prochains mois.
Auteur : M. François Ruffin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : Économie, finances et industrie
Ministère répondant : Économie, finances et industrie
Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 3 décembre 2024