Sanctions contre les constructeurs de véhicules thermiques et hybrides
Question de :
M. François Jolivet
Indre (1re circonscription) - Horizons & Indépendants
Question posée en séance, et publiée le 29 janvier 2025
SANCTIONS CONTRE LES CONSTRUCTEURS DE VÉHICULES THERMIQUES ET HYBRIDES
Mme la présidente . La parole est à M. François Jolivet.
M. François Jolivet . L'industrie automobile se porte mal en France – je le constate dans l'Indre – et en Europe. Pour ne rien arranger, des sanctions financières extrêmement dissuasives sont entrées en vigueur le 1er janvier 2025 : elles consistent en une amende de 95 euros par gramme de dioxyde de carbone émis et par véhicule neuf et risquent de coûter plusieurs milliards d'euros à nos constructeurs de véhicules hybrides ou thermiques. La situation alarme les industriels, leurs salariés et leurs sous-traitants, qui investissent pourtant massivement dans la transition énergétique. Les sommes en jeu sont colossales : on les estime à plusieurs dizaines de milliards d'euros à l'échelle européenne.
Je m'interroge sur ce qui ressemble moins à un impôt qu'à une amende perçue par Bruxelles et dont nous n'avons pas discuté dans cet hémicycle. Les emplois détruits par l'application de ces amendes étant assumés par chacun des États membres : c'est du perdant-perdant.
Je suis d'autant plus inquiet qu'il a été révélé récemment que des fonds publics européens ont financé des ONG, pour qu'elles mènent des campagnes de lobbying auprès de l'administration européenne, des administrations des États membres et des députés européens, pour inciter au soutien du pacte vert pour l'Europe.
En France, 200 000 emplois directs dépendent de notre industrie automobile. La rigueur du calendrier européen, combinée à la pression des importations étrangères à bas coût, met en péril ce secteur stratégique pour la France et l'Europe.
Au même moment, c'est tout l'inverse que nous constatons aux États-Unis : Donald Trump critique les régulations excessives et dénonce leurs conséquences négatives sur l'industrie automobile américaine ; il se libère, par décret, de l'accord de Paris.
Deux salles, deux ambiances, pourrait-on dire.
Dans cette situation, la France soutiendra-t-elle, auprès du Conseil de l'Union européenne, un ajustement du calendrier des sanctions ?
Si la transition écologique est une nécessité, elle ne peut réussir sans équilibre ni accompagnement. Le groupe Horizons & indépendants soutiendra toujours une France puissante dans une Europe puissante et luttera pour que notre pays ne devienne pas une France cliente dans une Europe cliente. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Marc Ferracci, ministre chargé de l'industrie et de l'énergie . Je vous remercie pour votre question sur les conséquences du règlement européen sur les émissions de CO2 pour la filière automobile. Je suis profondément convaincu que la transition écologique de la filière, qui doit se traduire par l'arrêt de la vente des véhicules thermiques neufs en 2035, doit aller de pair avec la progression de l'emploi industriel dans nos territoires. À cet égard, la situation est préoccupante : si les amendes – dont le montant total pourrait représenter plus de 2 milliards d'euros – sont appliquées à nos constructeurs au titre de l'année 2025, la filière dans son ensemble fera face à une situation difficile, voire impossible ; en outre, l'achat de crédits carbone aux concurrents, notamment américains ou chinois, ainsi que la réduction de la production et de la vente de véhicules thermiques pourraient avoir des effets délétères et dramatiques qui affecteraient toute la chaîne de valeur, en particulier les équipementiers.
Dans ces conditions, la position actuelle de la Commission européenne consistant à laisser l'année se dérouler en observant le comportement des acteurs n'est pas tenable, pour une raison simple : les constructeurs automobiles – Toyota, Stellantis, Ford – ont déjà commencé à acheter des crédits d'émission de CO2 à leurs concurrents, et à leur concurrent américain Tesla en particulier, à hauteur de 1 milliard d'euros.
Aussi devons-nous agir. Avec mes collègues Agnès Pannier-Runacher et Benjamin Haddad, nous avons d'ailleurs publié une tribune demandant à la Commission de prendre ses responsabilités et de revenir sur le calendrier des amendes, sans pour autant remettre en cause l'objectif d'électrification de la filière automobile. Agissons de manière responsable afin que l'indispensable transition écologique se conjugue avec une indispensable politique industrielle, plus offensive et moins naïve. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)
Auteur : M. François Jolivet
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Automobiles
Ministère interrogé : Industrie et énergie
Ministère répondant : Industrie et énergie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 janvier 2025