Décret n° 2024-740 du 5 juillet 2024 sur l'exploitation du lithium
Question de :
Mme Clémence Guetté
Val-de-Marne (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Clémence Guetté interroge M. le ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie, sur la publication du décret n° 2024-740 du 5 juillet 2024 qualifiant de projet d'intérêt national majeur l'extraction et la transformation de lithium par la société Imerys dans l'Allier (03). En effet, le statut octroyé par celui-ci a été créé par la loi du 23 octobre 2023 dite « Industrie verte » et simplifie les procédures administratives (à travers des dérogations entre autres) pour certains projets industriels. Cette publication est intervenue alors qu'un débat public organisé par la Commission nationale du débat public (CNDP) ayant réuni plus de 3 000 participants était en cours depuis le 11 mars 2024 et devait se conclure le 31 juillet 2024, soit moins d'un mois après la publication de ce décret. Ce choix de calendrier interroge et coïncide sans grande surprise avec la date du second tour des élections législatives anticipées ayant eu lieu le 7 juillet 2024. En effet, ce projet a suscité et suscite encore de nombreuses contestations et le débat public était grandement attendu et indispensable. Ne pas attendre la fin de ce débat avant d'acter l'accélération de l'exploitation minière constitue une violence anti-démocratique non négligeable vis-à-vis de tous les citoyens impliqués dans ce processus de consultation et ainsi que vis-à-vis de la CNDP dont la mission est « d'organiser les débats publics sur les projets ayant un impact significatif sur l'environnement ». La multiplication des attaques envers celle-ci est par ailleurs préoccupante. Le 4 décembre 2024, un projet de décret Gouvernemental a été mis à consultation du public. Il vise à exclure du champ d'intervention de CNDP l'ensemble des projets industriels. Ceux-ci constituent près de la moitié des projets nécessitant des consultations. Elle souhaite donc l'interroger sur les intentions du Gouvernement vis-à-vis de la CNDP et sur ce qu'il compte mettre en place afin de garantir la place de la concertation citoyenne concernant les projets industriels contestés.
Réponse publiée le 3 juin 2025
La réforme du champ d'application de la Commission nationale du débat public (CNDP) s'inscrit dans la stratégie globale de réindustrialisation portée par le Gouvernement, en particulier sur l'accélération et la simplification des implantations industrielles. En ce sens, cette orientation doit prendre en compte les impératifs, légitimes, de consultation du public. Aussi est-ce la raison pour laquelle la loi Industrie verte du 23 octobre 2023 prévoit que les projets soumis à l'autorisation environnementale sont désormais soumis à une période de consultation plus longue, et plus en amont des projets afin d'améliorer la prise en compte des retours. Dans ce cadre, la proposition de suppression de la saisine obligatoire de la CNDP pour les projets industriels vise à simplifier les démarches des entreprises en évitant qu'un projet soit soumis deux fois à une procédure de consultation, comme c'est le cas actuellement, dans un délai plus proche que par le passé. La loi Industrie verte permet ainsi une meilleure réactivité du porteur, et ce en lui permettant de modifier son projet en réaction à la consultation du public. En effet, les réponses apportées par le pétitionnaire sont désormais réputées faire partie du dossier de demande d'autorisation environnementale, de même que les éventuelles modifications consécutives du projet, sous réserve qu'elles n'en modifient pas l'économie générale (Code de l'environnement, article L. 181-1). En cas d'adoption de la mesure au sein du projet de loi de simplification de la vie économique, les porteurs de projets conserveront cependant la possibilité de solliciter une concertation menée sous l'égide de la CNDP, dès lors que celle-ci leur semblerait pertinente pour l'acceptabilité de leur projet. De même, et à l'initiative de l'autorité compétente, une concertation préalable sous l'égide d'un garant de la CNDP peut intervenir afin d'imposer au maître d'ouvrage l'organisation d'une telle concertation. Le préfet dispose également de cette prérogative, avec l'exercice du droit d'initiative pour les projets répondant aux seuils financiers fixés à l'article R. 121-25 du code de l'environnement. S'agissant du projet Imerys dans l'Allier, il est essentiel de rappeler que la qualification de « projet d'intérêt national majeur » (PINM), introduite par la loi Industrie verte, vise à garantir l'accélération des projets stratégiques pour la transition écologique et la souveraineté industrielle du pays. Ce statut permet d'alléger certaines procédures administratives sans remettre en cause la qualité des débats publics ou des évaluations environnementales. Par conséquent, le décret du 5 juillet 2024 n'a donc pas eu pour effet de réduire la portée du débat public en cours, mais bien de poser un cadre permettant de sécuriser et d'accélérer la mise en œuvre du projet dans un délai raisonnable. Ainsi, le Gouvernement demeure très attaché à la concertation citoyenne et s'assure que les consultations du public, qu'elles soient menées par la CNDP ou dans le cadre de la procédure d'autorisation environnementale, respectent pleinement les exigences de la Convention d'Aarhus. Notre objectif reste la garantie d'un équilibre entre, d'une part, la prise en compte des attentes des citoyens et, d'autre part, la nécessité d'accélérer les projets industriels indispensables à la transition écologique et à la souveraineté énergétique du pays. En somme, la réforme de la CNDP ne vise pas à affaiblir la démocratie participative mais à l‘adapter aux évolutions réglementaires et aux besoins des industriels.
Auteur : Mme Clémence Guetté
Type de question : Question écrite
Rubrique : Mines et carrières
Ministère interrogé : Industrie et énergie
Ministère répondant : Industrie et énergie
Dates :
Question publiée le 21 janvier 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025