Question écrite n° 3371 :
Suggestion d'augmentation des vacations des magistrats à titre temporaire

17e Législature

Question de : Mme Sandra Delannoy
Nord (3e circonscription) - Rassemblement National

Mme Sandra Delannoy interroge M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice, sur le taux d'activité des magistrats à titre temporaire (MTT). Les MTT, souvent issus de la société civile, ou juges, juristes, greffiers, fonctionnaires du ministère de la justice à la retraite, participent aux côtés des magistrats de carrière à l'œuvre de justice. Ancrés dans le monde professionnel, leurs compétences complémentaires ont guidé la création des juridictions de proximité puis l'élargissement des compétences des magistrats exerçant à titre temporaire par la loi organique n° 2016-1090 du 8 août 2016. Leur participation a permis d'étoffer l'équipe autour du magistrat en ouvrant la justice à l'apport de citoyens. Cette fonction présente la particularité de permettre, dans le même temps, l'exercice des fonctions de juge des contentieux de la protection mais aussi celles de l'ensemble des compétences matérielles des chambres de proximité et du tribunal judiciaire et ce à titre temporaire, concomitamment à une activité professionnelle compatible avec les fonctions judiciaires. Selon l'article 29-4 du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993, les MTT peuvent ainsi participer à l'œuvre de justice dans la limite de 300 vacations par an. Cela représente peu ou prou quatre-vingt-dix audiences, soit un équivalent mi-temps. Or il n'est pas rare de constater que de nombreux MTT atteignent ce plafond des 300 vacations par an bien avant que l'année judiciaire ne soit écoulée. Cela induit l'impossibilité de présider ou même d'être assesseur jusqu'à l'année judiciaire suivante. Les MTT représentent donc une force vive mobilisable dont l'aide semble plus que nécessaire eu égard à l'état de la justice et de ses lenteurs dues au volume d'affaires. Mme la députée souhaite connaître l'avis de M. le ministre quant au fait d'augmenter le plafond de 300 à 400 vacations par an afin de permettre aux MTT qui le désireraient d'augmenter leur activité. Cela n'induirait pas une obligation mais bien une possibilité : à la manière des médecins généralistes à la retraite dont on favorise la reprise d'activité, même partielle, pour soulager la pénurie, libre aux MTT de n'effectuer que leurs 300 vacations par an ou d'augmenter leur activité en fonction de leur envie ou de leur disponibilité. Cette proposition de modification de décret viserait donc à désengorger les tribunaux. En effet, plus la participation des MTT est élevée, plus les affaires qui relèvent de leur compétence d'attribution sont tranchées et plus vite le justiciable obtient la décision qui le concerne. Elle lui demande son avis sur le sujet.

Réponse publiée le 8 avril 2025

Le ministère de la Justice est entièrement mobilisé pour le recrutement de magistrats de carrière ou intégrés provisoirement dans le corps judiciaire dont les magistrats à titre temporaire (MTT). Les magistrats exerçant à titre temporaire sont issus de la société civile et participent, au côté des magistrats, à l'œuvre de justice. Les différentes lois organiques prises depuis 2016 (loi organique n° 2016-1090 du 8 août 2016 relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu'au Conseil supérieur de la magistrature, loi organique n° 2019-221 du 23 mars 2019 relative au renforcement de l'organisation des juridictions, loi organique n° 2021-1728 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire, et loi organique n° 2023-1058 du 20 novembre 2023 relative à l'ouverture, à la modernisation et à la responsabilité du corps judiciaire), qui ont étoffé et développé le statut et les compétences des MTT, témoignent de l'intérêt porté par le ministère de la Justice sur la nécessité de recruter des MTT au soutien des juridictions. Depuis sa décision n° 94-355 DC du 10 janvier 1995, le Conseil constitutionnel considère que si les fonctions de magistrat de l'ordre judiciaire doivent en principe être exercées par des personnes qui entendent consacrer leur vie professionnelle à la carrière judiciaire, la Constitution ne fait pas obstacle à ce que, pour une part limitée, des fonctions normalement réservées à des magistrats de carrière puissent être exercées à titre temporaire par des personnes qui n'entendent pas pour autant embrasser la carrière judiciaire. En conséquence, les magistrats à titre temporaire exercent de manière partielle et ponctuelle des fonctions juridictionnelles et sont rémunérés à la vacation pour les tâches qu'ils accomplissent, dans les conditions prévues par l'arrêté du 28 juin 2017, fixant les conditions d'application de l'article 35-6 du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 pris pour l'application de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature. Le plafond annuel de 300 vacations traduit cet équilibre souhaité par le Conseil constitutionnel. Au 31 décembre 2024, 392 MTT étaient en fonction, et 128 candidats aux fonctions étaient en formation en vue de leur nomination, pour exercer tant au siège civil qu'au siège pénal, et même, pour la première fois, au parquet. Les MTT sont, comme rappelé, limités à l'exercice de 300 vacations mais ne sont pas obligés de les effectuer en totalité. Au cours de l'année 2024, les MTT ont effectué en moyenne 156 vacations ; 46 d'entre eux en ont effectué plus de 250. Ces chiffres démontrent bien que la fonction de MTT n'a pas vocation à être exercée à temps plein. Elle peut être exercée parallèlement à une activité professionnelle principale, sous réserve qu'elle soit compatible avec les fonctions judiciaires. Elle est, comme souligné, une activité à mi-temps : c'est pourquoi le pouvoir réglementaire a décidé de la limiter à 300 vacations, comme pour les magistrats honoraires.

Données clés

Auteur : Mme Sandra Delannoy

Type de question : Question écrite

Rubrique : Professions judiciaires et juridiques

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 21 janvier 2025
Réponse publiée le 8 avril 2025

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