Accord tripartite État, Sanofi et CD&R
Question de :
M. Olivier Marleix
Eure-et-Loir (2e circonscription) - Droite Républicaine
M. Olivier Marleix appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'accord annoncé par communiqué de presse conjoint de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et M. le ministre délégué chargé de l'industrie en date du 20 octobre 2024 entre l'entreprise Sanofi, le fonds d'investissement américain CD et R et le Gouvernement français à l'occasion de la cession d'Opella. Cet accord prévoit que pour disposer d'informations exhaustives, non seulement sur l'activité d'Opella, mais également sur la stratégie industrielle de l'entreprise en France à moyen et long terme, l'État a obtenu une participation de Bpifrance au capital d'Opella, associée à un siège avec droit de vote au conseil d'administration de l'entreprise. Cette mesure est présentée comme le moyen d'être alerté si une orientation non conforme aux engagements pris venait à être proposée et de permettre à l'État d'infléchir toute décision contraire à ses intérêts sanitaires et industriels. Compte tenu de ses éléments, M. le député s'interroge sur la pertinence du montage retenu afin de préserver l'intérêt national, notamment en matière de santé publique et de sécurité sanitaire. La procédure de contrôle des investissements étrangers en France (IEF) prévoit en effet la possibilité d'émettre un refus concernant l'opération de rachat, mais cette possibilité est circonscrite aux cas dans lesquels il est prouvé que les conditions qui pourraient être imposées dans le cadre d'un avis favorable à l'opération ne permettent pas d'assurer la préservation des intérêts nationaux. Or de telles garanties de préservation de l'intérêt national auraient pu être obtenues sans participation capitalistique de la BPI, notamment au travers des engagements prévus par ladite police des investissements étrangers en France (IEF) énoncée aux articles L. 151-3 et suivants du code monétaire et financier. C'est pourquoi il lui demande de préciser la plus-value d'un tel montage financier par rapport à une décision d'autorisation assortie d'engagements qui auraient été pris conformément à la procédure IEF. Il lui demande également de préciser le montant chiffré (valeur et pourcentage) de cette participation au regard de l'opération d'investissement réalisée par CD et R dans Opella. Enfin, il souhaite connaître la nature juridique de cet accord tripartite, notamment s'il est susceptible de recours et si compte tenu de l'utilisation d'argent public apporté en l'espèce par la BPI, cette décision doit être validée par un acte administratif publié au journal officiel.
Réponse publiée le 20 mai 2025
En octobre 2024, Sanofi a fait part de son entrée en négociations exclusives avec le fonds américain Clayton Dubilier & Rice - CD et R – pour lui céder 50 % du capital de sa filiale Opella. Afin d'assurer la préservation des intérêts nationaux, au-delà du champ strict du contrôle IEF (ordre public ou défense nationale), ce projet d'investissement a fait l'objet d'un contrat unilatéral irrévocable, conclu le 20 octobre 2024 entre l'État, l'investisseur étranger et le cédant. Ce contrat prévoit divers engagements à la charge de l'investisseur, permettant de concourir au développement industriel, au maintien de l'emploi, à l'approvisionnement local et à la protection de l'environnement. L'État a acquis une participation minoritaire de Bpifrance au capital d'Opella (entre 1 à 2 %, pour 100 à 150 M €), associée à un siège avec vote au conseil d'administration. Elle donnera à l'État un accès intégral aux informations relatives à l'activité et à la stratégie de l'entreprise, ce qui lui permettra d'être alerté de manière précoce sur toute orientation ou décision non conforme aux engagements et plus globalement de pouvoir influencer la stratégie de l'entreprise dans la durée – dans un sens favorable à la souveraineté économique de la France. La participation de l'État au capital d'Opella vient donc asseoir la portée du contrat et renforcer les moyens de contrôle de l'État pour assurer le respect des engagements pris. Cet acte unilatéral, qui ne résulte pas de l'exercice d'une prérogative de puissance publique, est distinct de la procédure de contrôle des investissements étrangers en France (IEF) dans ses objectifs, et ne fait pas obstacle à la mise en œuvre par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique des pouvoirs qui lui ont été confiés par le législateur au titre de la police spéciale des IEF, visant à garantir l'ordre public et la sécurité publique, notamment par la protection de la santé publique. En tout état de cause, les principes qui régissent l'action des autorités titulaires d'un pouvoir de police s'opposent à ce que celles-ci renoncent à l'exercer dans le cadre d'engagements contractuels. Par ailleurs, l'article L. 151-3 du code monétaire et financier (CMF) prévoit que l'autorisation préalable accordée par le ministre chargé de l'économie peut être assortie, le cas échéant, de conditions visant à assurer que l'investissement projeté ne portera pas atteinte aux intérêts nationaux. Les finalités de ces conditions sont strictement encadrées et limitativement énumérées à l'article R. 151-8 du CMF. Celles-ci doivent, en vertu de cet article et dans le respect du principe de proportionnalité, viser principalement à assurer la pérennité et la sécurité des activités objet de la procédure des IEF, à garantir le maintien des savoirs et savoir-faire de l'entité-cible ou encore à fixer les modalités d'information de l'autorité administrative chargée du contrôle. L'État a déployé sur cette opération une stratégie de protection globale, qui permet d'inscrire le maintien et le développement de l'activité d'Opella en France dans une approche plus large de souveraineté sanitaire et industrielle.
Auteur : M. Olivier Marleix
Type de question : Question écrite
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Dates :
Question publiée le 28 janvier 2025
Réponse publiée le 20 mai 2025