Question de : M. Philippe Lottiaux
Var (4e circonscription) - Rassemblement National

M. Philippe Lottiaux attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins, sur les contraintes réglementaires pesant sur les micro-crèches, qu'un récent projet de décret de la direction générale de la cohésion sociale viserait visiblement à renforcer. Les micro-crèches, qui relèvent le plus souvent du secteur privé, sont de petites structures collaboratives pouvant accueillir un maximum de 12 enfants. Elles se sont beaucoup développées ces dernières années car elles représentent un mode d'accueil plébiscité par les parents et les collectivités pour répondre à la demande croissante de solutions de garde d'enfants, notamment en zone rurale, ainsi que pour les parents travaillant à temps partiel ou ayant des horaires de travail irréguliers. Alors que la tendance du nombre de places des structures classiques d'accueil de la petite enfance (crèches et assistants maternels) est à la baisse, celle des micro-crèches compense largement cette évolution, faisant de ces structures le seul moteur de hausse ou de maintien des capacités d'accueil des nourrissons et des enfants, alors qu'il manque encore 200 000 places en France. On compte 6 800 micro-crèches en 2024, soit 1 place en crèche sur 5 et 50 % des créations d'établissements d'accueil du jeune enfant (AEJE) entre 2010 et 2020. Ce modèle en plein essor bénéficie d'un allègement de certaines contraintes administratives, sans pour autant que la bonne prise en compte du jeune enfant soit négligée. Or les salariés du secteur sont inquiets d'un éventuel durcissement de ces contraintes. Les mesures qui seraient envisagées, sans concertation préalable, pourraient ainsi conduire à licencier au 31 décembre 2025 a minima 40 % des salariés actuels diplômés de l'éducation nationale pour les remplacer par des professionnels titulaires de diplômes d'État délivrés en un à trois ans, alors même que le secteur manque de personnel. Il serait également question de la fin de l'évolution professionnelle possible vers des fonctions de direction des professionnels disposant d'un diplôme d'auxiliaire de puériculture ou d'un CAP, les privant ainsi de toute perspective, ou encore de l'interdiction pour les salariés disposant d'un CAP AEPE d'accueillir seuls jusqu'à 3 enfants. Si ces mesures se confirmaient, elles pourraient mettre en péril l'emploi de nombreux salariés des micro-crèches et réduire les solutions d'accueil des familles. Or le nécessaire renforcement des solutions d'accueil du jeune enfant passe justement par la diversité des structures et des opérateurs. En l'espèce, si les micro-crèches ont pu parfois se développer au-delà de ce qui était initialement envisagé, cela devrait plutôt conduire à en tirer les enseignements pour le secteur et non à brider leur développement, d'autant qu'elles ne sont pas plus coûteuses pour la puissance publique que les autres modes de garde. Il lui demande donc comment le Gouvernement envisage de rassurer les salariés du secteur et de lui indiquer s'il compte réellement ou non garantir la pérennité des structures et leur développement.

Réponse publiée le 18 mars 2025

Ce projet de décret, en cours d'examen par le Conseil d'Etat, a notamment pour objet d'aligner les normes d'encadrement des micro-crèches sur les crèches classiques de taille similaire (petites crèches). Il revient sur les dérogations qui s'appliquaient aux micro-crèches et demande que la structure compte au moins un professionnel diplômé d'Etat de rang 1 et la possibilité pour ce professionnel d'accueillir seul jusqu'à 3 enfants. Le texte prévoit qu'un directeur exerce des fonctions de direction pour un maximum de 2 établissements. La priorité de cette mesure est la qualité de l'accueil des enfants et la mise en place des garanties nécessaires pour que l'accueil soit respectueux de leurs besoins et de leurs droits. Cette qualité d'accueil est également la condition primordiale pour restaurer l'attractivité des métiers : les professionnels ne pourront venir et rester dans le secteur de la petite enfance que s'ils sont en mesure d'exercer leur profession d'une façon qui soit conforme à leurs valeurs et à leur formation. La pénurie ne pourra pas se résoudre en dégradant les conditions d'accueil et les conditions de travail pour être en mesure de recruter et de maintenir l'offre : cette dynamique suivie au cours des quinze dernières années a montré toutes ses limites et a conduit à la crise que nous connaissons aujourd'hui. Tout a été mis en place depuis deux ans pour s'engager dans un mouvement positif afin de rétablir la qualité d'accueil comme corollaire et préalable de la réponse aux défis de la pénurie de professionnels. Plusieurs rapports des inspections générales, tant le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de 2023 sur la qualité d'accueil et la prévention de la maltraitance dans les crèches que le rapport IGAS-Inspection générale des finances (IGF) sur les micro-crèches de 2024, ont souligné au cours des deux dernières années que les conditions d'encadrement dérogatoires prévues pour les micro-crèches n'étaient pas suffisantes pour garantir cette qualité d'accueil et permettre un accompagnement adéquat des professionnels dans l'exercice de leur métier. Les conclusions de ces rapports, fruits de plusieurs mois d'investigations approfondies des inspections générales, ont été saluées par l'ensemble du secteur pour leur pertinence et leur fidélité à la réalité quotidienne des professionnels et des enfants qu'ils accueillent. Le Gouvernement agit en conformité avec ces recommandations. Les enfants qui sont accueillis dans les micro-crèches et dans les petites crèches sont les mêmes : il n'y a aucune raison acceptable que les conditions prévues pour l'encadrement ne soient pas similaires. Les catégories administratives n'ont pas à avoir d'influence sur la façon dont sont accompagnés les enfants.  Ces orientations ne signifient nullement que l'Etat abandonne les micro-crèches : il finance ces établissements en versant aux parents le complément mode de garde et en accordant aux entreprises qui y réservent des berceaux des crédits d'impôt et des exonérations sociales. A ce jour, le montant global de financement public pour un berceau en micro-crèche prestation d'accueil du jeune enfant peut aller jusqu'à près de 22 000 euros par an (rapport IGAS-IGF). L'Etat agit en faveur des professionnels, qui sont confrontés quotidiennement aux difficultés induites par des conditions d'encadrement fragiles, pour leur donner la même qualité de conditions de travail et d'accompagnement que les salariés de crèches classiques. S'agissant de fonctions de directeur, les professionnels titulaires de diplômes d'Etat, notamment les éducateurs de jeunes enfants et les infirmiers puériculteurs, sont formés pour assurer la direction des structures, accompagner et former leurs équipes, animer le projet pédagogique de l'établissement. Ils permettent à tous les professionnels de la structure de travailler en confiance et en sécurité avec un encadrement formé. Il est de la responsabilité des gestionnaires et des employeurs d'accompagner les professionnels titulaires d'un certificat d'aptitude professionnelle ou d'un diplôme d'auxiliaire de puériculture dans leur parcours de carrière et de leur permettre d'acquérir les diplômes et certifications nécessaires pour progresser vers des emplois de direction.  Pour accompagner cette réforme, des mesures dérogatoires sont prévues pour les personnels déjà en poste et les nouvelles normes ne s'appliqueront aux recrutements qu'à partir du 1er septembre 2026, afin de laisser le temps nécessaire pour s'organiser et pour préserver les structures existantes. Des travaux sont également en cours pour faciliter l'accès à la validation des acquis de l'expérience pour les professsionnels. Le Gouvernement reste néanmoins vigilant quant au modèle économique global de ces crèches. C'est dans cette optique qu'une réforme du financement de l'accueil du jeune enfant est d'ores et déjà engagée. Les élus seront associés à cette démarche et ses effets se concrétiseront pleinement dans la prochaine convention d'objectifs et de gestion de la caisse nationale des allocations familiales, afin de favoriser la création et le maintien de places dans un cadre financier plus sécurisé.

Données clés

Auteur : M. Philippe Lottiaux

Type de question : Question écrite

Rubrique : Institutions sociales et médico sociales

Ministère interrogé : Santé et accès aux soins

Ministère répondant : Travail, santé, solidarités et familles

Dates :
Question publiée le 28 janvier 2025
Réponse publiée le 18 mars 2025

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