Question écrite n° 3556 :
Activation du plan grand froid en Haute-Garonne et ailleurs

17e Législature

Question de : M. François Piquemal
Haute-Garonne (4e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

M. François Piquemal interroge Mme la ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement sur la question de l'activation du plan grand froid en Haute-Garonne et ailleurs. Le plan grand froid est un dispositif d'hébergement d'urgence, en cas de températures nettement inférieures aux normales saisonnières et régionales, à l'impact conséquent sur le plan social et sanitaire pour les populations les plus fragiles. L'agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes précise que ce plan est activé par les préfets lorsque cette période « constitue un danger pour les populations précaires, sans domicile ou isolées, du fait de leurs conditions de vie ou de travail et potentiellement pour l'ensemble de la population » et qu'il peut l'être du 31 novembre au 1er mars. Le plan grand froid est activé à partir du deuxième niveau de vigilance froid signalé par Météo France : on dénombre ainsi le niveau 1 (temps froid), niveau 2 (grand froid) et niveau 3 (froid extrême). En fonction du niveau d'alerte départemental et de la situation locale, plusieurs mesures du plan grand froid peuvent être mises en œuvre : renforcement des équipes du 115, du SAMU social et des équipes mobiles (maraudes), ouverture plus large des lieux d'accueil de jour (horaires élargis), renforcement du dispositif d'hébergement d'urgence et ouverture de places supplémentaires d'hébergement de nuit, voire de places exceptionnelles (gymnase, lieux publics...), organisation des services hospitaliers et de toutes les structures de santé pour préparer l'accueil de personnes nécessitant des soins suite à la vague de froid (traumatismes dûs aux chutes, hypothermies, complications de pathologies existantes, maladies hivernales, intoxications au monoxyde de carbone...). Depuis 2004, Météo France intègre le risque de grand froid dans ses prévisions et depuis 2002, l'organisme contribue au « plan grand froid » visant à porter assistance aux personnes sans-abri. Sur son site, Météo France précise qu'un épisode de grand froid dure au minimum deux jours et que, tout comme une canicule, il représente un danger pour la santé de toutes et tous, le froid pouvant réduire « les capacités de résistance de l'organisme ». Les risques varient également en fonction de l'âge, de la région et des pathologies. Les conséquences les plus graves étant : « une hypothermie ou des engelures qui doivent être signalées aux secours dès que possible ». Ces effets sont encore plus destructeurs pour des personnes vivant dans la rue ou des logements insalubres. Cette année, contrairement à plusieurs autres départements, la préfecture de Haute-Garonne n'a pas déclenché le plan grand froid, décision prétextée par le fait que la région n'est pas en vigilance orange. Pourtant, la Haute-Garonne a été touchée par des épisodes de grand froid, qui mettent en danger la vie des personnes à la rue et des plus fragiles, avec des températures négatives depuis la mi-janvier 2025. Le plan hivernal a été lancé seulement mi-décembre, alors qu'il l'est en novembre d'habitude, conséquence de coupes budgétaires et de manque d'anticipation selon la fédération des acteurs de la solidarité. Comme le rappelle une membre du collectif Toulouse anti-précarité : « Aujourd'hui, avec le froid qu'il fait, même des gens qui ont l'habitude de se débrouiller, d'avoir de l'autonomie et qui ne craignent pas les hivers classiques ont peur de s'endormir et de ne pas se réveiller. Ils souffrent tellement du froid qu'ils font appel à de l'aide alors qu'ils n'en ont pas l'habitude. ». Les critères du plan grand froid sont bien trop rigides ; des températures négatives, même au niveau 1, peuvent toujours avoir des conséquences mortelles. La mort d'une personne sans-domicile fixe au pied de la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse, le 30 décembre 2024, nous l'a démontré. Pour des milliers d'autres, le risque de connaître le même sort est une sombre réalité. Le froid tue et il devient urgent d'activer le plan grand froid en Haute-Garonne et partout où il est nécessaire, c'est un dispositif vital sous-utilisé. Le collectif d'entraide et d'innovation sociale de Toulouse rappelle qu’« il y a un certain nombre d'années, il y avait un déclenchement systématique lorsqu'il y avait au moins deux nuits consécutives durant lesquelles il y avait des températures négatives ressenties. L'administration française semble considérer que les températures négatives comme celles qu'on connaît actuellement à Toulouse ne relèvent pas du froid. C'est probablement lié à des logiques budgétaires, qui ont encore plus de poids dans le contexte actuel. C'est juste inhumain, rien qui ne puisse justifier cette situation ». Par conséquent, M. le député souhaite interpeller Mme la ministre sur les actions envisagées pour remédier à cette situation préoccupante. Il l'interroge sur les mesures qui seront prises pour adapter les critères d'activation du plan grand froid aux réalités du changement climatique et du danger du froid, afin de faciliter sa mise en place. L'année 2023 a tristement enregistré un record de 826 décès de personnes vivant à la rue, portant à plus de 4 352 le nombre de victimes depuis 2017. Il lui demande si le Gouvernement envisage d'instaurer des mécanismes contraignants obligeant les préfectures à déclencher le plan grand froid en s'appuyant sur les remontées des associations et des agents de l'État présents sur le terrain. Il est à noter qu'en dépit de l'urgence, le préfet de Haute-Garonne n'a, cette année, pas organisé de concertation avec les associations à l'approche de l'hiver pour établir un bilan de la situation. Il l'interroge sur les actions concrètes qui seront conduites pour permettre l'ouverture de places d'hébergement d'urgence partout dans le pays, alors que 93 % des demandes au 115 restent sans réponse à Toulouse. Le code de l'action sociale et des familles (CASF) consacre le droit inconditionnel à un hébergement d'urgence continu pour toute personne sans-abri et en situation de détresse. Il l'alerte sur le fait qu'il est plus que temps de respecter ce principe.

Réponse publiée le 24 juin 2025

Vous avez appelé mon attention sur la situation des personnes sans-abri dans le département de la Haute-Garonne à l'occasion de l'épisode de froid intense survenu début février. Je tiens à vous assurer que l'Etat, sous l'autorité du préfet, s'est pleinement mobilisé pour faire face à cette situation d'urgence, dans le cadre du déclenchement du plan Grand froid le 8 février dernier.  Afin de répondre au besoin de mise a l abri de personnes vulnérables en période de grand froid, la préfecture a procédé à l'ouverture de 82 places supplémentaires d'hébergement d'urgence temporaires dans des locaux mis à disposition par les collectivités locales, notamment les gymnases Jean Jaurès à Toulouse, Buffebiau à Castelginest, Karben à Colomiers ainsi qu'un centre communal à Ramonville. 50 places additionnelles ont été identifiées et tenues prêtes à être mobilisées si la saturation des premières structures l'exigeait. Ces ouvertures ont été rendues possibles grâce à une coordination étroite entre les services de l'Etat, les opérateurs associatifs en particulier France Horizon et la Croix-Rouge, et les collectivités concernées. La direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités (DDETS) a animé une cellule de crise pour assurer un suivi en temps réel de la situation.  Par ailleurs, les maraudes ont été renforcées, avec une attention particulière portée aux personnes isolées, et une articulation étroite avec le 115 dont les capacités ont été temporairement accrues. Le SDIS 31 et les forces de l'ordre ont été mobilisés pour garantir la sécurité des opérations d'accueil, y compris pour faciliter la mise à l'abri des personnes initialement réticentes. Une attention spécifique a été portée à l'accueil des familles, notamment au sein du Centre d'Hébergement d'Urgence pour Familles (CHUF), qui a fonctionné à pleine capacité durant cette période. Au-delà du contexte propre à la Haute-Garonne, la stratégie Logement d'Abord dans laquelle est engagée la France depuis 2017 vise l'accès le plus rapide possible au logement pour les personnes sans domicile, avec la mise en place d'un accompagnement global et adapté aux personnes, pour faire du logement une clef d'insertion. Il s'agit d'accéder directement au logement en évitant autant que possible un passage dans des solutions intermédiaires dont l'hébergement.  Ce plan repose sur un effort soutenu pour produire et mobiliser du logement abordable pour les ménages sans domicile, avec la priorisation des personnes sans-domicile dans l'accès au logement social, l'investissement dans le logement adapté et le développement de l'intermédiation locative. Cette stratégie repose sur un pilotage par les objectifs, jalonnés dans le temps et suivi en continu, pour évaluer et rendre compte des résultats en matière de lutte contre le sans-abrisme. Le second plan Logement d'abord vise également entre 2023 et 2027 la création de 30 000 nouvelles places d'intermédiation locative, l'ouverture de 10 000 nouvelles places de pensions de famille et l'attribution de 145 000 logements sociaux à des ménages sans domicile. Par ailleurs, la prise en charge des publics sans-abri repose sur l'action d'opérateurs associatifs assurant notamment la gestion des centres d'hébergement dont le fonctionnement est financé par l'Etat. En 10 ans, le parc d'hébergement d'urgence a plus que doublé. Chaque année, l'État consacre plus de 2 milliards d'euros à l'hébergement des personnes sans-domicile. En 2024, plus de 200 000 personnes sont hébergées chaque soir dans l'hébergement généraliste. Les deux plans successifs Logement d'abord et l'augmentation du nombre de places d'hébergement généraliste traduisent une volonté et un renforcement des moyens accordés à la politique de lutte contre le sans-abrisme. Bien que les besoins de prise en charge des situations de précarité restent très significatifs, avec des problématiques croisées impliquant des réponses coordonnées entre administrations (santé, emploi, accès aux droits, justice, etc.), l'investissement de l'État dans le sans-abrisme s'est néanmoins traduit par une forte augmentation des moyens pour le logement adapté (+ 104 %) et la veille sociale (+ 74 %), dans le cadre du déploiement du plan Logement d'abord. Entre 2017 et 2023, la dépense sur le programme 177 « hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » a augmenté de 57 %, en passant de 1 963 M€ consommés en 2017 à 3 076 M€ consommés en 2023. 

Données clés

Auteur : M. François Piquemal

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pauvreté

Ministère interrogé : Logement

Ministère répondant : Logement

Dates :
Question publiée le 28 janvier 2025
Réponse publiée le 24 juin 2025

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