Détention arbitraire de l'avocate Sonia Dahmani en Tunisie
Question de :
M. Pierrick Courbon
Loire (1re circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Pierrick Courbon attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation gravement préoccupante de Maître Sonia Dahmani, avocate près la Cour de cassation en Tunisie depuis plus de vingt-cinq ans et journaliste chroniqueuse respectée. Figure engagée dans la défense des droits humains et de la démocratie, Maître Dahmani a été injustement arrêtée le 11 mai 2024 à la Maison de l'Avocat de Tunis par une quarantaine de policiers cagoulés, dans des circonstances indignes d'un État de droit. Cette arrestation brutale s'inscrit dans un contexte de répression croissante contre les avocats et les journalistes en Tunisie, qui subissent des poursuites pour avoir exercé leur droit à la libre expression. Maître Dahmani fait actuellement l'objet de plusieurs procédures judiciaires, notamment sous l'empire du décret-loi liberticide n° 2022/54, pour des déclarations publiques critiquant l'accord de partenariat entre l'Union européenne et la Tunisie, ainsi que le traitement des prisonniers politiques. Le 10 septembre 2024, lors d'une audience expédiée sans débat ni plaidoirie de la défense, elle a été condamnée à huit mois d'emprisonnement. Cette condamnation, rendue en catimini , illustre une justice bafouée et une atteinte manifeste aux droits de la défense. Depuis, une nouvelle condamnation de deux ans de prison ferme lui a été infligée pour avoir dénoncé la discrimination raciale en Tunisie et réclamé le respect de la loi contre le racisme adoptée en 2018. Cette affaire suscite une vive indignation au sein des Barreaux et des organisations internationales de défense des droits humains, qui pointent l'absence d'indépendance de la justice tunisienne et les pressions exercées sur les magistrats depuis la dissolution du Conseil Supérieur de la Magistrature. La France, pays des droits de l'Homme, attachée à la défense des libertés fondamentales, ne peut rester silencieuse face à ces atteintes graves. L'emprisonnement de Maître Sonia Dahmani constitue une entrave inacceptable à la liberté d'expression et au droit de défendre des causes justes. Il lui demande alors ce que la diplomatie française envisage afin de réclamer la libération immédiate de Sonia Dahmani et de dénoncer ces atteintes aux droits de l'Homme et à la justice en Tunisie.
Réponse publiée le 27 mai 2025
L'arrestation de Maître Dahmani, le 11 mai 2024, au sein de la Maison de l'avocat de Tunis, devant les caméras de France 24, avait suscité une indignation et une inquiétude légitimes quant à la dégradation des libertés publiques en Tunisie. La France est attentive au respect des droits de l'Homme et des libertés fondamentales en Tunisie comme partout dans le monde. La liberté d'expression et la liberté d'association, comme l'indépendance de la justice et les droits de la défense, sont des principes garantis par la Constitution tunisienne ainsi que par les conventions des Nations unies auxquelles la Tunisie comme la France ont souscrit. La France suit donc avec attention l'évolution du contexte intérieur tunisien et s'est exprimée à plusieurs reprises à ce sujet. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) a exprimé à plusieurs reprises sa préoccupation face à la vague d'arrestations et d'interpellations en Tunisie, dont ont fait l'objet plusieurs avocats, journalistes et membres d'associations. La situation de Maître Sonia Dahmani, en particulier, a fait l'objet d'un suivi étroit. Le porte-parole adjoint du MEAE a spécifiquement exprimé la préoccupation de la France face à l'arrestation dont elle a fait l'objet. Le 23 avril dernier, la France a notamment fait part publiquement de sa préoccupation à la suite des lourdes condamnations prononcées en première instance à l'encontre de nombreuses personnes accusées de « complot contre la sûreté de l'État », dont des ressortissants européens. L'absence de conditions nécessaires à la tenue d'un procès équitable est particulièrement regrettable. L'engagement de la France en faveur de la défense et de la promotion des droits de l'Homme est constant. Les sociétés française et tunisienne sont liées par une profonde amitié. C'est cette relation qui nous permet d'entretenir avec les autorités tunisiennes un dialogue régulier, franc et constructif, y compris sur les droits humains, avec toute l'exigence que permet notre partenariat.
Auteur : M. Pierrick Courbon
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 28 janvier 2025
Réponse publiée le 27 mai 2025