Situation des Kurdes en Syrie
Question de :
Mme Danielle Simonnet
Paris (15e circonscription) - Écologiste et Social
Question posée en séance, et publiée le 5 février 2025
SITUATION DES KURDES EN SYRIE
Mme la présidente . La parole est à Mme Danielle Simonnet.
Mme Danielle Simonnet . Dans le cimetière des martyrs de Kobané tués par Daech, puis par la Turquie ou les milices financées par cette dernière, Maya et Beritan m'ont montré la tombe de leur amie, tuée au barrage de Tichrine, la semaine dernière. Bachar al-Assad est tombé mais la guerre continue.
Avec une délégation du Nouveau Front populaire, nous nous sommes rendus à Kobané, à l'occasion des dix ans de la libération de la ville. La communauté internationale tout entière saluait alors le courage des Kurdes qui avaient vaincu Daech. Nous voulons briser le silence de cette même communauté internationale, alors que des milices islamistes payées par la Turquie attaquent le barrage de Tichrine défendu par les forces armées et les populations civiles – en particulier des femmes. La Turquie d'Erdogan doit cesser ces offensives qui sont contraires au droit international et remettent en cause les frontières de la Syrie. Il faut exiger une no-fly zone, un cessez-le-feu et des sanctions.
Les dirigeants que nous avons rencontrés considèrent que la France est l'un des pays qui les a le mieux soutenus, mais ils craignent désormais d'être abandonnés.
Dans le même temps, le nouveau gouvernement syrien demande aux groupes armés – YPG, YPJ et FDS – de rendre les armes, alors même qu'ils font face aux attaques turques. De plus, les déclarations de ce même gouvernement, qui considère que les femmes n'ont pas à faire partie de l'armée et doivent rester à la maison, font craindre de terribles reculs pour les droits des femmes.
Le président de la République française a annoncé la tenue d'une conférence sur la Syrie le 13 février. L'administration autonome du Nord-Est de la Syrie sera-t-elle bien conviée ? La France soutiendra-t-elle, sans ingérence, leurs revendications pour une Syrie unifiée, indépendante de la Turquie, qui respecte l'autonomie de chaque région, en particulier du Rojava ? Son contrat social, basé sur la participation démocratique de toutes les communautés – kurdes, arabes, syriaques –, l'égalité entre les hommes et les femmes et leur implication démocratique dans toutes les sphères de la société et de l'armée, est une chance pour toute la Syrie, pour un processus constituant à construire.
Nous avons tant à apprendre de leur construction politique, démocratique et féministe ! N'oublions pas leur slogan : « Jin, Jiyan, Azadî » – Femme, vie, liberté. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et GDR.)
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères . Je vous remercie d'avoir rendu hommage aux Kurdes. Ce sont des alliés fidèles, des frères d'armes, et nous ne les abandonnerons pas. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC, EcoS et Dem. – M. Stéphane Peu appluadit aussi.)
Votre question me donne l'occasion de rappeler à quel point ce qui s'est joué en Syrie ces treize dernières années a eu des retombées très directes sur le quotidien de nos compatriotes. En effet, la répression sanglante organisée par Bachar al-Assad contre son propre peuple a eu comme conséquence la résurgence du risque terroriste islamiste de Daech, que nous avons combattu inlassablement aux côtés de nos alliés kurdes.
Alors que depuis le 8 décembre un nouvel espoir renaît en Syrie, il va de soi que les Kurdes doivent pouvoir participer pleinement à la réappropriation de leur nation et à la citoyenneté nouvelle qui s'imposera dans ce pays. (M. Olivier Faure applaudit.)
C'est pourquoi, dès les premières heures, nous avons appelé les autorités turques, ainsi que les nouvelles autorités de transition à Damas, à un cessez-le-feu à Kobané, pour éviter que les Kurdes ne soient soumis à une pression insoutenable, en plus du chaos qui risquait inévitablement de surgir après la chute du régime de Bachar al-Assad. Rappelons que dans le Nord-Est du pays, ce sont les Kurdes qui, en plus de combattre Daech, ont gardé courageusement les prisons dans lesquelles sont détenus actuellement plusieurs dizaines de milliers de combattants terroristes, ainsi que leurs familles.
C'est aussi pourquoi nous avons facilité la médiation entre le général Mazloum – avec qui j'ai échangé avant même de me rendre à Damas – et la Turquie, ainsi qu'avec l'autorité de transition. Plus récemment, nous avons également facilité la médiation entre les Kurdes de Syrie et les Kurdes d'Irak, afin qu'ils se renforcent mutuellement.
Enfin, je vous confirme que les Kurdes seront bien présents à la conférence organisée le 13 février à Paris, qui vise à faire entendre nos exigences pour cette transition. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC, EcoS, Dem et GDR.)
Auteur : Mme Danielle Simonnet
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 février 2025