Question écrite n° 3632 :
Publication de l'arrêté relatif à la régulation du grand cormoran en eaux libres

17e Législature

Question de : M. Matthias Renault
Somme (3e circonscription) - Rassemblement National

M. Matthias Renault interroge Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur l'absence de publication de l'arrêté ministériel relatif à la régulation du grand cormoran en eaux libres, conformément à la décision du Conseil d'État du 8 juillet 2024. Par cette décision, le Conseil d'État a partiellement annulé l'arrêté du 19 septembre 2022, qui interdisait la régulation du grand cormoran en eaux libres. Il a notamment considéré que si cette espèce n'était pas la cause principale du déclin de certaines espèces piscicoles vulnérables, telles que l'ombre commun, le brochet commun ou l'anguille européenne, sa prédation pouvait néanmoins, dans certains contextes, aggraver leur état de conservation. En conséquence, le juge administratif a enjoint le Gouvernement de prendre un arrêté modificatif dans un délai de quatre mois, afin de fixer des plafonds départementaux de destruction de grands cormorans en eaux libres pour la période 2022-2025. Ce délai est désormais écoulé depuis plusieurs semaines et pourtant aucun arrêté n'a été publié à ce jour. Cette situation préoccupe les acteurs de la pêche et de la protection des milieux aquatiques, qui alertent sur l'impact du retard pris dans l'application de cette décision. L'absence de régulation en eaux libres fragilise davantage des espèces déjà menacées et compromet l'équilibre des écosystèmes concernés. Aussi, il lui demande de préciser les raisons de ce retard et d'indiquer à quelle date l'arrêté modificatif sera publié, afin d'assurer la mise en œuvre effective de la décision du Conseil d'État et de répondre aux enjeux de préservation des espèces piscicoles vulnérables.

Réponse publiée le 8 avril 2025

Le grand cormoran est une espèce autochtone, piscivore, protégée au niveau national. Il bénéficie également au niveau européen du régime général de la protection de toutes les espèces d'oiseaux (directive « oiseaux »). La population de la sous-espèce Phalacrocorax carbo sinensis s'était significativement réduite jusque dans les années 1970. Depuis lors, en raison de sa protection, le nombre moyen de grands cormorans a augmenté jusqu'à atteindre une population de presque 120 000 individus hivernants en 2024, ce chiffre étant relativement stable depuis 2013. Afin de contrôler l'impact que le grand cormoran occasionne sur les piscicultures et, le cas échéant, les poissons sauvages, un système dérogatoire à la protection stricte permet de mener des opérations de régulation depuis les années 1990. Ces moyens d'action font régulièrement l'objet d'ajustements, notamment en lien avec l'évolution de la population sur le territoire et les besoins des acteurs. Ainsi le nouvel arrêté-cadre du 24 février 2025 fixe les nouvelles conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de perturbation intentionnelle et de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant les grands cormorans. Ce texte autorise de nouveau la destruction de grands cormorans au titre de la protection des espèces piscicoles menacées dans les cours d'eau et plans d'eau. Au-delà des consultations obligatoires, il a fait l'objet de nombreux échanges avec l'ensemble des partenaires concernés afin de tenir compte de l'ensemble des remarques des parties prenantes. Il apporte un cadre rénové, plus ambitieux et plus sécurisé juridiquement, visant à la cohabitation du grand cormoran avec les pisciculteurs et à la limitation de son impact sur les écosystèmes aquatiques, dans le respect de la réglementation en vigueur pour la protection des espèces. Dans le nouvel arrêté-cadre du 24 février 2025 figurent des simplifications administratives et des assouplissements importants s'agissant des dérogations à l'interdiction de perturbation intentionnelle et de destruction de l'espèce. Ainsi la période de destruction est étendue de droit jusqu'au 30 juin pour les piscicultures. La mise en œuvre d'opérations complémentaires est permise jusqu'au 31 juillet en pisciculture sur justification (auparavant, les opérations complémentaires devaient s'achever au plus tard le 30 juin). Désormais, les plafonds de destruction autorisés au titre de la protection des poissons menacés seront fixés par les préfets en respectant le seuil maximal de 20 % de la population départementale hivernante recensée lors du comptage national, ce seuil pouvant être porté à 30 % en cas d'absence de plafond sur les piscicultures dans le département. En outre, en cas d'atteinte du plafond accordé au titre de la protection des piscicultures avant la fin de la campagne, le plafond peut être augmenté dans la limite de 10 % du nombre d'individus autorisés à la destruction sur les piscicultures dans le département. De même, afin de piloter au plus près les destructions de grand cormoran, il est ajouté un délai de transmission des comptes-rendus des opérations aux préfets de 72 heures suivant les destructions, via une plateforme en ligne simplifiée qui sera créée. Enfin, tout bénéficiaire d'une dérogation à l'interdiction de destruction pourra réaliser, aux mêmes périodes et sur les mêmes lieux que les tirs, en complément, des opérations d'effarouchement sonores et visuels, sans qu'il soit besoin d'effectuer des démarches administratives supplémentaires. L'ensemble de ces assouplissements doit cependant respecter les enjeux liés aux règlementations en vigueur, et notamment l'exigence que des mesures alternatives aient préalablement été mises en place sans succès, et le nécessaire évitement des impacts sur les autres espèces protégées. Ainsi, le texte a pour ambition d'assurer une meilleure cohabitation entre le grand cormoran et les activités de pêche et de pisciculture, tout en permettant de maintenir un bon état de conservation de l'espèce et de limiter l'impact sur le milieu des opérations menées.

Données clés

Auteur : M. Matthias Renault

Type de question : Question écrite

Rubrique : Aquaculture et pêche professionnelle

Ministère interrogé : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Dates :
Question publiée le 4 février 2025
Réponse publiée le 8 avril 2025

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