Question de : M. Hervé Saulignac
Ardèche (1re circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Hervé Saulignac appelle l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur l'inquiétude des gérants, personnels et usagers de micro-crèches quant à l'avenir de ces structures, du fait notamment de l'application de certaines dispositions issues de la loi Plein Emploi. Les micro-crèches, structures majoritairement privées pouvant accueillir un maximum de 12 enfants, se sont beaucoup développées ces dernières années, palliant la baisse des capacités d'accueil des structures classiques de la petite enfance, particulièrement en zone rurale. À l'heure où près de 200 000 places d'accueil manquent en France, les micro-crèches représentent 50 % des créations d'établissements d'accueil du jeune enfant entre 2010 et 2020. Si ce modèle a fait la preuve de sa pertinence, notamment dans les territoires ruraux, les gestionnaires de micro-crèches s'inquiètent de nouvelles contraintes, notamment portées par le projet de décret « réorganisant la politique d'accueil de la petite enfance » issu de la Loi Plein emploi de 2023.  Porté par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), ce projet de décret inscrit l'obligation, d'ici à 2026, de remplacer au moins 40 % des effectifs titulaires de CAP accompagnement éducatif petite enfance (AEPE), formés en 2 ans après la 3e, par des diplômés d'État d'auxiliaires de puériculture ou d'éducateurs de jeunes enfants, en niveau bac + 2 minimum. Les micro-crèches dénoncent le délai extrêmement court de mise en œuvre de cette mesure, alors même que trop peu d'auxiliaires et éducateurs arrivent sur le marché de l'emploi. Le décret prévoit également que les salariés disposant d'un CAP AEPE ne pourront pas accueillir plus de trois enfants, tandis que les assistantes maternelles à domicile ou en maison d'assistantes maternelles peuvent en accueillir jusqu'à six. Les personnels des micro-crèches, mais également les familles qui ont recours à leurs services, sont très inquiets des conséquences que l'application de ces mesures pourraient engendrer. Aussi, il lui demande quelles mesures sont envisagées afin de rassurer les gestionnaires et personnels des micro-crèches et de garantir la pérennité de ces structures.

Réponse publiée le 18 mars 2025

Ce projet de décret, en cours d'examen par le Conseil d'Etat, a notamment pour objet d'aligner les normes d'encadrement des micro-crèches sur les crèches classiques de taille similaire (petites crèches). Il revient sur les dérogations qui s'appliquaient aux micro-crèches et demande que la structure compte au moins un professionnel diplômé d'Etat de rang 1 et la possibilité pour ce professionnel d'accueillir seul jusqu'à 3 enfants. Le texte prévoit qu'un directeur exerce des fonctions de direction pour un maximum de 2 établissements. La priorité de cette mesure est la qualité de l'accueil des enfants et la mise en place des garanties nécessaires pour que l'accueil soit respectueux de leurs besoins et de leurs droits. Cette qualité d'accueil est également la condition primordiale pour restaurer l'attractivité des métiers : les professionnels ne pourront venir et rester dans le secteur de la petite enfance que s'ils sont en mesure d'exercer leur profession d'une façon qui soit conforme à leurs valeurs et à leur formation. La pénurie ne pourra pas se résoudre en dégradant les conditions d'accueil et les conditions de travail pour être en mesure de recruter et de maintenir l'offre : cette dynamique suivie au cours des quinze dernières années a montré toutes ses limites et a conduit à la crise que nous connaissons aujourd'hui. Tout a été mis en place depuis deux ans pour s'engager dans un mouvement positif afin de rétablir la qualité d'accueil comme corollaire et préalable de la réponse aux défis de la pénurie de professionnels. Plusieurs rapports des inspections générales, tant le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de 2023 sur la qualité d'accueil et la prévention de la maltraitance dans les crèches que le rapport IGAS-Inspection générale des finances (IGF) sur les micro-crèches de 2024, ont souligné au cours des deux dernières années que les conditions d'encadrement dérogatoires prévues pour les micro-crèches n'étaient pas suffisantes pour garantir cette qualité d'accueil et permettre un accompagnement adéquat des professionnels dans l'exercice de leur métier. Les conclusions de ces rapports, fruits de plusieurs mois d'investigations approfondies des inspections générales, ont été saluées par l'ensemble du secteur pour leur pertinence et leur fidélité à la réalité quotidienne des professionnels et des enfants qu'ils accueillent. Le Gouvernement agit en conformité avec ces recommandations. Les enfants qui sont accueillis dans les micro-crèches et dans les petites crèches sont les mêmes : il n'y a aucune raison acceptable que les conditions prévues pour l'encadrement ne soient pas similaires. Les catégories administratives n'ont pas à avoir d'influence sur la façon dont sont accompagnés les enfants.  Ces orientations ne signifient nullement que l'Etat abandonne les micro-crèches : il finance ces établissements en versant aux parents le complément mode de garde et en accordant aux entreprises qui y réservent des berceaux des crédits d'impôt et des exonérations sociales. A ce jour, le montant global de financement public pour un berceau en micro-crèche prestation d'accueil du jeune enfant peut aller jusqu'à près de 22 000 euros par an (rapport IGAS-IGF). L'Etat agit en faveur des professionnels, qui sont confrontés quotidiennement aux difficultés induites par des conditions d'encadrement fragiles, pour leur donner la même qualité de conditions de travail et d'accompagnement que les salariés de crèches classiques. S'agissant de fonctions de directeur, les professionnels titulaires de diplômes d'Etat, notamment les éducateurs de jeunes enfants et les infirmiers puériculteurs, sont formés pour assurer la direction des structures, accompagner et former leurs équipes, animer le projet pédagogique de l'établissement. Ils permettent à tous les professionnels de la structure de travailler en confiance et en sécurité avec un encadrement formé. Il est de la responsabilité des gestionnaires et des employeurs d'accompagner les professionnels titulaires d'un certificat d'aptitude professionnelle ou d'un diplôme d'auxiliaire de puériculture dans leur parcours de carrière et de leur permettre d'acquérir les diplômes et certifications nécessaires pour progresser vers des emplois de direction.  Pour accompagner cette réforme, des mesures dérogatoires sont prévues pour les personnels déjà en poste et les nouvelles normes ne s'appliqueront aux recrutements qu'à partir du 1er septembre 2026, afin de laisser le temps nécessaire pour s'organiser et pour préserver les structures existantes. Des travaux sont également en cours pour faciliter l'accès à la validation des acquis de l'expérience pour les professsionnels. Le Gouvernement reste néanmoins vigilant quant au modèle économique global de ces crèches. C'est dans cette optique qu'une réforme du financement de l'accueil du jeune enfant est d'ores et déjà engagée. Les élus seront associés à cette démarche et ses effets se concrétiseront pleinement dans la prochaine convention d'objectifs et de gestion de la caisse nationale des allocations familiales, afin de favoriser la création et le maintien de places dans un cadre financier plus sécurisé.

Données clés

Auteur : M. Hervé Saulignac

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enfants

Ministère interrogé : Travail, santé, solidarités et familles

Ministère répondant : Travail, santé, solidarités et familles

Dates :
Question publiée le 4 février 2025
Réponse publiée le 18 mars 2025

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