Précarité des accompagnants d'élèves en situation de handicap
Question de :
Mme Aurélie Trouvé
Seine-Saint-Denis (9e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Aurélie Trouvé alerte Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur la situation des plus de 130 000 accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) exerçant en France. Au mois de novembre, lors d'une rencontre avec les enseignants de l'école Anatole France du Pré Saint-Gervais, commune de sa circonscription, Mme la députée a pris connaissance des tensions quotidiennes engendrées par le manque d'accompagnants d'élèves en situation de handicap depuis la rentrée scolaire 2024. Les données réunies par les représentants de parents d'élèves le démontrent : à titre d'exemple, dans cette école, seules 47 % des 330 heures notifiées par la maison départementale des personnes handicapées étaient assurées au 15 octobre. Par ailleurs, l'école accueille un dispositif d'unité localisée pour l'inclusion scolaire (Ulis). L'enseignante du dispositif, bien que volontaire (elle doit en être remerciée), n'est pas formée. Il y a une seule AESH pour dix élèves qui devraient pourtant avoir une présence individualisée ; plusieurs de ces élèves appellent donc à leurs côtés des professionnelles qui devraient intervenir auprès d'autres élèves, en classe ordinaire. Ces problématiques ne sont pas propres à l'école Anatole France : les mêmes dysfonctionnements ont été remontés par la communauté éducative des 6 autres écoles publiques du Pré Saint-Gervais. À l'école Rosa Parks, ce sont près de 140 h qui sont notifiées auprès de différents élèves de l'école et seulement 69 heures sont couvertes, soit environ 49 %. À l'école Nelson Mandela, ce sont près de 803 heures qui sont notifiées auprès de différents élèves de toutes les écoles de la commune, dont des élèves inscrits en Ulis et seulement 464 heures sont couvertes, soit environ 58 %. Au niveau du département, l'intersyndicale estime que 50 % des élèves sont sans AESH. Aujourd'hui, un assistant d'éducation (AED) ou un AESH travaillant en collège d'éducation prioritaire ne perçoit que 64 % de la prime REP/ REP+. Les difficultés des AESH ont des conséquences directes sur les élèves en situation de handicap, qui se retrouvent parfois sans accompagnement adéquat. Au-delà de l'impact sur les AESH, c'est donc la question de l'accès à l'école publique pour les enfants en situation de handicap qui est posée. Les AESH portent plusieurs revendications : création d'un corps de fonctionnaire de catégorie B, augmentation significative des rémunérations et indexation sur l'inflation, reconnaissance d'un temps complet sur la base d'un accompagnement élève de 24 heures, recrutement à hauteur des besoins, abandon des pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL), instauration d'un véritable plan de formation continue. Il s'agit là de mesures strictement nécessaires alors que le salaire moyen d'un AESH est d'environ 850 euros net par mois et que la majorité d'entre eux sont à temps partiel. Les contrats à temps partiel sont d'autant plus problématiques et précarisants que la direction des services départementaux de l'éducation nationale (DSDEN) opère une harmonisation de contrats pour les mettre en conformité avec le dernier cadre de gestion établi en juin 2019. Celui-ci distingue un nombre d'heures effectives en présence de l'enfant et des heures d'activités connexes (préparation, réunion, formation). Avec cette grille de lecture, 70 % de quotité de travail d'avant 2019 équivalent à 27 h 25 d'heures hebdomadaires avec l'élève : ce sont ces 3 h 25 de différence avec le temps de classe en premier degré que l'administration veut économiser aujourd'hui. Pour « assurer une équité de traitement entre tous nos personnels », argumente la DSDEN. Ces activités dites connexes ne sont plus considérées comme des heures de travail, ce qui engendre une baisse du temps de travail des AESH. Certains se retrouvent obligés d'accepter des propositions de contrat à 60 % sous peine de licenciement pour « refus de modification substantielle d'un élément du contrat de travail ». Face à cette détresse, plusieurs réponses politiques ont été esquissées. La loi du 16 décembre 2022 a permis une avancée avec l'accès au CDI après 3 ans de CDD. Cependant, cette loi ne traite pas de la question du salaire. Le Gouvernement a par ailleurs promis la création de 2 000 postes d'AESH pour soutenir l'école inclusive. Cette mesure vise à répondre à l'augmentation des besoins d'accompagnement des élèves en situation de handicap. Cependant, les syndicats et les AESH eux-mêmes soulignent que ces créations de postes sont insuffisantes pour pallier le manque existant. Dans les Côtes-d'Armor par exemple, il manquerait 180 AESH et la création de 2 000 postes n'en créerait qu'une vingtaine. Cette promesse n'aurait pu se concrétiser : pour cela, il aurait fallu que le Gouvernement parvienne à revenir comme il l'avait annoncé, sur la suppression de 4 000 postes d'enseignants prévue dans le projet de loi de finances pour 2025. Or ces suppressions ont été maintenues dans la version du texte votée par le Sénat. La loi du 27 mai 2024 a transféré la responsabilité de la rémunération des AESH pendant la pause méridienne de la commune à l'État. Toutefois, la mise en œuvre de cette loi a causé des problèmes et des baisses de temps de travail pour certains AESH. Enfin, Mme la ministre a elle-même annoncé engager une « grande consultation sur le temps scolaire » qui pourrait impacter l'organisation des journées des AESH, tout comme elle a promis de mettre « à l'agenda social » des discussions pour pouvoir proposer un « vrai parcours professionnel » aux AESH. Tout cela restant de l'ordre de l'annonce, sans mesure concrète, elle lui demande quelles dispositions elle compte proposer afin de répondre à la détresse des AESH.
Auteur : Mme Aurélie Trouvé
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Date :
Question publiée le 4 février 2025