Question écrite n° 3778 :
Pass Culture, renforcer son efficacité en milieu rural

17e Législature

Question de : M. Eric Liégeon
Doubs (5e circonscription) - Droite Républicaine

M. Eric Liégeon appelle l'attention de Mme la ministre de la culture sur l'efficacité du pass Culture, en particulier en milieu rural. Dans son récent rapport du 17 décembre 2024 portant « premier bilan du pass Culture », la Cour des comptes souligne en effet les limites de ce dispositif qui peine à atteindre ses objectifs malgré un budget annuel très conséquent (267 millions d'euros de subventions - 210 millions du ministère de la Culture pour les achats effectués individuellement par les jeunes et 57 millions de l'éducation nationale pour l'utilisation collective impulsée par les enseignants). Parallèlement, les conclusions d'un récent rapport sénatorial sur l'accès à la culture en milieu rural font le constat de difficultés toujours persistantes d'accès à l'offre culturelle en zones rurales, notamment du fait de problématiques de mobilité et d'une offre plus limitée qu'en milieu urbain. Le rapport préconise trois axes d'actions : « aller vers » le public, le « faire venir» et développer une stratégie sur le long terme au niveau de l'État. Ainsi, il serait intéressant de se demander comment le pass Culture pourrait jouer sa part en allant mieux et plus vers les jeunes des territoires ruraux. En conséquence et afin de mieux répondre aux besoins culturels de ces jeunes, il l'interroge sur les mesures qu'elle entend prendre pour renforcer l'impact du pass Culture en milieu rural et en faciliter l'accès et la compréhension.

Réponse publiée le 1er avril 2025

La problématique de la mobilité des jeunes bénéficiaires du pass Culture vers les lieux de culture est bien identifiée, a fortiori dans le cadre du développement de la part collective du dispositif. Toutefois, la simple prise en charge des frais de transport dans le cadre de l'offre actuelle du pass Culture ne ferait que déplacer les effets des inégalités territoriales, sans y apporter de réponse : les jeunes ruraux consacreraient une part potentiellement importante de leur crédit pass Culture aux transports plutôt qu'à des pratiques artistiques et culturelles, au contraire des jeunes urbains… La problématique est globale et renvoie aux inégalités d'accès à l'offre culturelle au regard de l'aménagement des territoires et de l'organisation des mobilités au sens large. Fruit d'une coopération étroite entre les services de l'État (direction régionale des affaires culturelles Grand Est et rectorat de l'Académie de Reims), la région Grand Est, le département de la Haute-Marne et la société par actions simplifiée (SAS) pass Culture, une convention-cadre dénommée Caravelle, signée en 2023, illustre l'engagement conjoint des partenaires pour garantir l'accès de tous les jeunes haut marnais à une éducation artistique et culturelle de qualité, en prenant en charge leur déplacement. Il s'agit d'une expérimentation inédite au plan national, qui s'accompagne d'une étude visant à évaluer les effets de cette levée du frein des transports sur l'accès à la culture des élèves d'un département. Toutefois, dans un contexte qui évolue rapidement, marqué par des enjeux de développement durable et par les contraintes inédites qui ont pesé sur les déplacements depuis la crise sanitaire, la question de l'accès aux offres culturelles ne peut être posée uniquement en termes de déplacements vers des structures culturelles : la question de la mobilité des œuvres et des artistes, de l'accueil de spectacles ou d'expositions, de temps de pratique dans les établissements ou en immédiate proximité doit également être posée. C'est dans cette perspective que les services de l'État et les équipes de la SAS pass Culture analysent actuellement les usages constatés de cette part collective pour définir, en dialogue avec l'ensemble des acteurs, et notamment les collectivités territoriales, les évolutions qui pourraient permettre une appropriation équitable du dispositif sur tout le territoire national. Le ministère reste évidemment à l'écoute de tous les témoignages et expérimentations qui peuvent se mener au niveau territorial pour dégager des solutions concertées. Une attention particulière est également portée aux usages individuels du pass Culture, et notamment à ceux des jeunes vivant en milieu rural. Le taux de couverture de la part individuelle est de 84 % de la population à 18 ans, et parmi eux la part d'utilisateurs résidant en quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) est de 8 %, et 30 % en zone rurale. Le rapport de la Cour des Comptes précise qu'il s'agit là de proportions cohérentes avec les populations de jeunes résidant dans ces zones. Les jeunes résidant en zone rurale s'emparent donc du pass Culture dans les mêmes proportions que le reste des utilisateurs potentiels. On peut donc en déduire que bien qu'elles demeurent sans doute perfectibles, la notoriété et la facilité d'accès à l'application pass Culture sont aussi bonnes chez les jeunes résidant en zone rurale qu'ailleurs. Si leurs aspirations en termes de pratiques sont identiques à celles de leurs camarades urbains, force est de constater qu'ils se trouvent confrontés à une offre artistique et culturelle globalement moins importante et diversifiée que celle proposée dans les centres urbains, situation renforçant également leur dépendance aux parents pour leur accès à la culture. Pour pallier ce déséquilibre, le pass Culture travaille notamment à enrichir son catalogue d'offres de proximité (musées, bibliothèques, tiers lieux, maisons de la presse) et de pratiques artistiques. Par ailleurs, il œuvre à développer des réflexes d'utilisation de l'application spécifiques pour les jeunes ruraux : mise en avant des offres duo, valorisation des offres accessibles en transport en commun, etc. Pour le ministère de la culture, ce chantier rejoint la réflexion engagée dans les territoires par les directions régionales des affaires culturelles sur les projets culturels de territoires, les stratégies possibles de convergence à la fois des politiques interministérielles et de la contractualisation avec les collectivités territoriales, pour garantir une participation effective de tous les habitants à la vie culturelle, en levant notamment les freins géographiques. La part collective du pass Culture offre en l'espèce une opportunité de mener conjointement ce travail avec le ministère de l'Éducation nationale, pour une stratégie territoriale de l'État plus cohérente, et de véritables avancées en matière de continuité et de complémentarité de l'éducation artistique et culturelle sur les différents temps de vie des enfants et des jeunes. D'autre part, le ministère de la culture, la SAS pass Culture et l'ensemble des acteurs du monde de la culture de la région Grand Est construisent une expérimentation régionale de déploiement du pass à l'ensemble de la population. Cette version « universelle » de l'application n'offrira pas de financement aux utilisateurs mais leur permettra de géolocaliser l'offre culturelle près de chez eux et d'accéder plus facilement aux moyens de réservations associés. Encore en phase d'élaboration, une première version de cette application devrait voir le jour avant l'été 2025.

Données clés

Auteur : M. Eric Liégeon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Ruralité

Ministère interrogé : Culture

Ministère répondant : Culture

Dates :
Question publiée le 4 février 2025
Réponse publiée le 1er avril 2025

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