Obligation de fermeture hebdomadaire pour les boulangers
Question de :
Mme Géraldine Grangier
Doubs (4e circonscription) - Rassemblement National
Mme Géraldine Grangier attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur une réglementation datant de 1919, qui impose aux boulangeries et dépôts de pain une obligation de fermeture hebdomadaire. Cette disposition, conçue à l'époque pour préserver le repos hebdomadaire des travailleurs, pourrait aujourd'hui faire l'objet d'une réflexion approfondie afin de mieux tenir compte des réalités économiques et sociales contemporaines. À ce jour, 50 départements autorisent par arrêté préfectoral l'ouverture des boulangeries sept jours sur sept, tandis que 45 départements maintiennent encore une fermeture hebdomadaire obligatoire. Dans le département du Doubs, un arrêté préfectoral du 4 mars 1997 impose cette fermeture hebdomadaire, en application de l'article L. 3132-29 du code du travail. Cet article, à portée générale, confère aux préfets le pouvoir de réglementer les fermetures hebdomadaires dans différents secteurs d'activité, y compris la vente de pain. Cette mesure, initialement conçue pour garantir une journée de repos aux artisans boulangers travaillant souvent seuls ou en famille, a joué un rôle essentiel à son époque. Cependant, les évolutions des modes de vie, des attentes des consommateurs et de l'organisation des entreprises de boulangerie justifient aujourd'hui d'évaluer si cette disposition reste adaptée. Dans certains cas, elle peut limiter les possibilités de développement des entreprises ou fragiliser la présence de commerces de proximité, particulièrement dans des territoires où ces derniers jouent un rôle crucial. Permettre l'ouverture des boulangeries sept jours sur sept offrirait une option supplémentaire aux artisans qui souhaiteraient mieux répondre aux attentes de leurs clients et optimiser leur compétitivité. Il est important de souligner que cette mesure ne remettrait pas en cause la possibilité, pour ceux qui le souhaitent, de continuer à observer une fermeture hebdomadaire. Elle viserait simplement à leur offrir plus de flexibilité, tout en assurant une équité avec d'autres acteurs économiques, comme les grandes surfaces, qui ne sont pas soumises à de telles restrictions. Cette ouverture facultative pourrait également bénéficier aux jeunes en recherche de contrats adaptés pour financer leurs études, ainsi qu'aux employés qui verraient leur pouvoir d'achat augmenter grâce aux majorations salariales appliquées le dimanche. En tout état de cause, cette possibilité reposerait sur le volontariat, tant pour les employeurs que pour les salariés, permettant ainsi une adaptation aux spécificités et aux besoins de chacun. En permettant cette ouverture, le Gouvernement valoriserait le dynamisme des artisans boulangers, qui sont également des chefs d'entreprise engagés dans leurs territoires. Une telle mesure pourrait renforcer l'attractivité des métiers de l'artisanat, encourager l'emploi et contribuer à la revitalisation des territoires. Par ailleurs, elle répondrait à une demande croissante des consommateurs, soucieux d'avoir accès à des produits frais et locaux au quotidien. Mme la députée souhaite donc connaître la position de Mme la ministre concernant cette obligation de fermeture hebdomadaire imposée aux boulangeries. Elle l'interroge sur les éventuelles démarches envisagées pour réviser l'article L. 3132-29 du code du travail, afin d'adapter cette réglementation aux réalités actuelles, tout en maintenant une concurrence équitable au sein du secteur. Enfin, elle souhaiterait savoir comment elle entend réduire les disparités entre les départements, afin de promouvoir une égalité territoriale et d'assurer aux boulangers des conditions équitables, quel que soit leur lieu d'implantation.
Réponse publiée le 20 mai 2025
Les arrêtés de fermeture constituent un outil de régulation de la concurrence entre grandes surfaces commerciales et petits commerces artisanaux. Ainsi, le Conseil d'Etat a pu rappeler dans une décision de 2003 (CE, 28 mai 2003, n° 247120) que les dispositions de l'article L. 221-17 du code du travail, figurant désormais à l'article L. 3132-29 du code du travail, visent à préserver la concurrence entre l'ensemble des établissements qui exercent la même profession. La chambre criminelle de la Cour de cassation a par ailleurs précisé dans un arrêt du 6 juillet 1996 que l'obligation de fermeture résultant d'un arrêté pris sur le fondement des dispositions précitées s'impose tant aux établissements employant des salariés qu'à ceux qui n'en emploient pas ou aux commerçants travaillant avec l'aide des seuls membres de leurs familles. Au surcroît, la Cour de cassation a jugé qu'un arrêté de fermeture peut également s'appliquer aux établissements autorisés de plein droit, en application des dispositions de l'article L. 3132-12 du code du travail, à déroger à la règle du repos dominical (voir en ce sens : Cass. soc., 11 mai 2017, n° 15-25195). En outre, un arrêté préfectoral de fermeture ne peut être pris qu'en cas d'accord intervenu entre les organisations syndicales de salariés et des organisations d'employeurs d'une profession et d'une zone géographique déterminées. Cet accord devant correspondre, pour la profession, à la volonté de la majorité indiscutable des établissements qui exercent cette profession. Les modifications apportées à l'article L. 3132-29 du code du travail par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 ont par ailleurs eu pour objet d'impulser un mouvement d'actualisation desdits arrêtés, en précisant les conditions de vérification de la volonté des commerçants à l'instauration d'une fermeture hebdomadaire. Cette réglementation locale peut ainsi être modifiée et doit même être abrogée lorsque la majorité des membres de la profession ne souhaite plus imposer un jour de fermeture hebdomadaire au sein de la zone géographique concernée. Il est donc ainsi donné la possibilité de vérifier si les arrêtés de fermetures en vigueur demeurent adaptés et conformes à la volonté de la majorité de la profession. Dès lors, en raison des préoccupations toujours d'actualité auxquelles la règlementation sur les arrêtés de fermeture vise à répondre et des évolutions permises par la loi du 6 août 2015, il n'est pas envisagé de remettre en cause le principe des arrêtés de fermeture qui permet à une profession de s'autoréguler, localement, selon un principe majoritaire.
Auteur : Mme Géraldine Grangier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Commerce et artisanat
Ministère interrogé : Travail, santé, solidarités et familles
Ministère répondant : Travail et emploi
Dates :
Question publiée le 11 février 2025
Réponse publiée le 20 mai 2025