Utilisation du compte personnel de formation pour financer un permis moto
Publication de la réponse au Journal Officiel du 17 juin 2025, page 5292
Question de :
M. Mathieu Lefèvre
Val-de-Marne (5e circonscription) - Ensemble pour la République
M. Mathieu Lefèvre interroge M. le ministre de l'intérieur sur l'utilisation du compte personnel de formation (CPF) pour financer un permis A2, dit « permis moto ». Alors que le CPF est un droit individuel financé par l'entreprise et qu'il permet aux salariés de bénéficier d'un soutien financier dans le cadre de leur formation moto par la loi n° 2023-479 du 21 juin 2023, le décret n° 2024-444 du 17 mai 2024 revient sur les conditions de financement de celui-ci. En effet, il est à présent interdit d'utiliser son CPF pour financer un permis de conduire de catégorie A1, A2, B1 ou B pour tous ceux qui disposent déjà d'un permis de conduire en cours de validité en France. Le décret est pourtant contraire aux principes d'égalité et de non-discrimination puisqu'il interdit le financement d'un second permis de conduire créant une rupture d'égalité d'une part, entre les salariés déjà titulaires d'un premier permis de conduire et ceux qui souhaiteraient l'obtenir pour la première et d'autre part, entre les salariés qui ont pu bénéficier du CPF pour leur formation avant le 19 mai 2024, date d'application du décret et ceux qui ne peuvent depuis plus y avoir recours. De surcroît, cette décision prise sans concertation avec les professionnels de l'enseignement de la conduite ou les usagers est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation puisqu'aucun risque sérieux de déstabilisation du dispositif du CPF n'est avéré et ne justifie une telle décision. Si deux recours ont été déposés devant le Conseil d'État, il lui demande d'abroger le décret pour permettre à nouveau le financement du permis moto via le CPF.
Réponse publiée le 17 juin 2025
Le Compte personnel de formation (CPF) a constitué une formidable avancée en rendant effectif le droit individuel à la formation créé il y a plus de vingt ans. Le CPF permet à chaque individu de maintenir son employabilité et de sécuriser son parcours professionnel en finançant des formations certifiantes, mais également des actions de formation levant des freins à l'emploi, notamment ceux relatifs à la mobilité. Il est mobilisé par des publics, jusqu'à présent, sous-représentés parmi les bénéficiaires d'actions de formation, à savoir les non-cadres et les demandeurs d'emploi. La loi du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l'obtention du permis de conduire a permis d'étendre au 1er janvier 2024 le financement du permis de conduire au titre du CPF à l'ensemble des catégories, reconnaissant ainsi la liberté de choix du mode de transport. Le législateur a renvoyé au pouvoir réglementaire le soin de définir les conditions et modalités d'éligibilité au CPF de l'ensemble de ces permis. Dans ce cadre, les services du ministère du travail, de la santé et des solidarités ont saisi, après consultation des partenaires sociaux, la commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle d'un projet de décret qui conserve la condition relative à l'objet professionnel de la formation qui préexistait à la loi du 21 juin 2023. Le décret n° 2024-444 portant application de l'article 3 de la loi n° 2023-479 du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire est entré en vigueur le 18 mai 2024 pour les nouvelles préparations souscrites sur MonCompteFormation. S'agissant des préparations aux examens des permis du groupe léger (voiture, moto, quadricycles lourds à moteur) et considérant que le frein à la mobilité professionnelle est levé lorsque le titulaire est déjà détenteur d'un permis de conduire, l'encadrement prévu par ce nouveau décret concentre la mobilisation des droits CPF issus de la contribution des employeurs au bénéfice des titulaires de CPF ne détenant pas déjà un permis de conduire du groupe léger. Cette modalité préserve la possibilité, pour les titulaires déjà détenteurs d'un permis de conduire du groupe léger, de mobiliser leur CPF pour une préparation à une autre catégorie du groupe léger, mais uniquement avec des droits issus de financeurs tiers. Le texte réglementaire préexistant à la loi du 21 juin 2023 disposait que le titulaire du compte devait justifier du fait que l'obtention du permis de conduire lui permettait de contribuer à la réalisation d'un projet professionnel ou de favoriser la sécurisation du parcours professionnel. A cet égard, les permis de conduire du groupe lourd (bus, transport routier ainsi que les remorques associées) restent éligibles au CPF sans restriction, car répondant de fait à un objet professionnel. Ce nouveau décret renforce également les modalités de contrôle autorisées par le partage des données du fichier national des permis de conduire. En début d'année 2024, en l'absence d'encadrement réglementaire, les services de la Caisse des dépôts et consignations ont constaté des demandes exponentielles de financement des préparations au permis de conduire moto, équivalant à la moitié de la dépense constatée en 2023 pour les seuls permis de conduire voiture. Ainsi, 122 000 titulaires de CPF ont initié une préparation à la catégorie du permis de conduire A2 financée par leur CPF, alors que la délégation à la sécurité routière a constaté en 2022 seulement 148 000 inscriptions au passage de cette même catégorie. En 2025, pour la même période et après la mise en œuvre de cet encadrement, seulement 763 dossiers de préparation au permis moto ont été souscrits avec un financement CPF. Dans un contexte de finances publiques contraint, le financement de permis de conduire à vocation autre que professionnelle ne saurait être encouragé, au risque de compromettre durablement la soutenabilité financière du CPF, identifié par l'ensemble des partenaires sociaux comme un outil à fort potentiel pour accompagner les transitions professionnelles des salariés.
Auteur : M. Mathieu Lefèvre
Type de question : Question écrite
Rubrique : Formation professionnelle et apprentissage
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Travail et emploi
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 19 mai 2025
Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 17 juin 2025