Paupérisation de l'éducation nationale dans le Val-d'Oise
Question de :
Mme Gabrielle Cathala
Val-d'Oise (6e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Gabrielle Cathala interroge Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur les besoins pour la rentrée scolaire 2025 dans le Val-d'Oise après une année scolaire 2024/2025 marquée par un manque important d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) et d'enseignants remplaçants. Le Val-d'Oise est un département marqué par un nombre important d'enseignants non remplacés par manque d'attractivité du métier. En février 2025, plus de 350 classes n'avaient pas d'enseignants pendant plusieurs semaines. En mai 2025, 150 classes étaient toujours dans l'attente de remplaçants. Pour certaines classes, les absences non remplacées ont duré jusqu'à 6 mois non consécutifs, impactant durablement la continuité pédagogique et l'apprentissage des jeunes écoliers. En outre, la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances garantit à chaque enfant en situation de handicap le droit d'être inscrit à l'école. Dans son rapport d'août 2022 sur « L'accompagnement humain des élèves en situation de handicap », le Défenseur des droits dressait un constat toujours valable aujourd'hui : le système scolaire en matière d'inclusion des élèves en situation de handicap est défaillant. Dans le Val-d'Oise, les élèves en situation de handicap scolarisés souffrent d'un manque important d'AESH, un métier indispensable pourtant précarisé comme jamais. Suite à une croissance non anticipée de notifications de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), la priorité a été donnée aux élèves pris en charge à 100 %, pénalisant les élèves nécessitant un accompagnement partiel ou ceux pouvant être mutualisés. L'insuffisance de places dans les instituts médico-éducatifs et de professionnels de santé dans le département ne fait qu'accentuer le problème, confiant à l'éducation nationale une responsabilité difficile à assumer au regard des moyens alloués. Elle l'interroge sur les solutions envisagées pour la rentrée 2025 dans le Val-d'Oise afin d'assurer la présence d'un enseignant devant chaque élève et ce tous les jours, ainsi que des AESH en nombre suffisant.
Réponse en séance, et publiée le 16 juillet 2025
MANQUE DE PERSONNEL ÉDUCATIF DANS LE VAL-D'OISE
Mme la présidente . La parole est à Mme Gabrielle Cathala, pour exposer sa question, no 396, relative au manque de personnel éducatif dans le Val-d'Oise.
Mme Gabrielle Cathala . Comme les collègues présents ici, je déplore l'absence de Mme Borne, la ministre de l'éducation nationale. Étant chargée du numérique et de l'intelligence artificielle, vous n'êtes peut-être pas la mieux placée pour répondre à nos questions, qui portent sur la situation de l'éducation.
Faute de remplaçants, 350 classes de primaire n'avaient pas d'enseignant dans le Val-d'Oise cet hiver. En mai, 150 classes étaient toujours concernées par ces absences. Les enfants victimes de ces non-remplacements sont placés dans des classes déjà trop chargées, dans un autre niveau, restent livrés à eux-mêmes chez eux ou sont gardés par leurs parents, qui doivent parfois arrêter de travailler pour les prendre en charge.
Mme Borne a annoncé pour la rentrée 2025 la suppression de 470 postes rien que pour le premier degré et la fermeture de 2 584 classes sur l'ensemble du territoire national – le tout sous le prétexte de la démographie, alors qu'il faudrait dix-neuf élèves par classe.
Dans le Val-d'Oise, cinquante-huit fermetures de classes sont prévues, dont plusieurs dans ma circonscription, à Montmagny, Saint-Gratien et Sannois.
Pour mieux saisir les origines de ce démantèlement et de ce mépris patent pour l'école publique, il suffit de s'attarder un instant sur les profils des ministres de l'éducation nationale qui se sont succédé sous Emmanuel Macron : M. Attal, millionnaire, créateur de Parcoursup, fut scolarisé à l’École alsacienne, tout comme les deux enfants de M. Ndiaye. Ceux de Mme Oudéa-Castéra étaient inscrits à Stanislas, dans des classes non mixtes ; son fils aîné a bénéficié d’un système de cooptation pour intégrer une classe préparatoire en contournant l'usine à gaz Parcoursup. Anne Genetet, médecin, dirigeait une entreprise de formation et de conseil en recrutement de domestiques à Singapour.
Puis ce fut Mme Borne, ou Mme 49.3, qui reconnaît elle-même ne pas être spécialiste des questions d'éducation, qui fait travailler les enseignants jusqu'à 64 ans, qui a amputé le budget de l'éducation nationale de centaines de millions d'euros par 49.3 quand elle était première ministre, avant de le priver cette année de 320 millions d'euros. La même Mme Borne n'a rien à redire lorsqu'un rapport sénatorial dénombre 7,5 millions de demi-journées d'absence pour l'année scolaire 2023-2024 – nul besoin d'avoir fait Polytechnique pour savoir ce que cela signifie : les élèves perdent jusqu'à 7 % de leur temps d'apprentissage dans le second degré en raison du non-remplacement des enseignants en arrêt maladie. Mme Borne minimise par ailleurs le racisme et l'homophobie à Stanislas et les mensonges de M. Bayrou au sujet d'un scandale à caractère pédocriminel dans un établissement privé. On comprend que, pour détourner l'attention, elle préfère s'acharner à rompre le contrat d'association entre l'État et le lycée musulman Averroès – pourtant rétabli par la justice – ou qu'elle suspende une enseignante dont le seul tort est d'avoir organisé avec ses élèves une minute de silence en mémoire des victimes du génocide en cours à Gaza.
Plus de la moitié des ministres du gouvernement illégitime actuel sont millionnaires – jamais un gouvernement n'en a compté autant. Pour ses membres et leurs soutiens, pas d'inquiétude : les portes des écoles privées les plus sélectives ou des écoles publiques les plus prestigieuses leur resteront toujours ouvertes. Qu'il semble facile de prendre des décisions qui détruisent à petit feu l'école républicaine, surtout dans les quartiers populaires, quand ses propres enfants n'y mettent pas les pieds !
Accepteriez-vous de donner des cours à une classe surchargée dans le Val-d'Oise pour 1,2 smic – ce que gagnent les enseignants du ministère de l'éducation nationale en début de carrière ? Ces derniers gagnaient 2,2 fois le montant du smic en 1980. On comprend qu'aujourd'hui, certains n'aient pas envie de rester. Accepteriez-vous de prendre en charge plusieurs enfants en situation de handicap, à Deuil-la-Barre ou ailleurs, pour à peine 900 euros par mois – ce que reçoivent les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) de ma circonscription, alors que ces personnes prennent en charge jusqu'à cinq élèves par semaine et par école dans des classes différentes, qu'elles sont contraintes de cumuler plusieurs emplois ou de travailler à la cantine le midi, qu'elles se voient poussées au burn-out et à la démission ? Pensez-vous que l'on puisse payer un loyer et vivre dignement avec 900 euros par mois tout en ayant envie d'aller au travail le matin pour prendre en charge des enfants en situation de handicap ?
Pourquoi condamnez-vous à la souffrance tous ces professionnels essentiels – majoritairement des femmes ? Combien de temps utiliserez-vous encore l'argument fallacieux de la natalité pour supprimer des classes et des postes ? Quand dégèlerez-vous le point d'indice des enseignants et augmenterez-vous drastiquement leur salaire ? Quand créerez-vous un corps de fonctionnaires pour les AESH afin qu'elles perçoivent un salaire de fonctionnaire de catégorie B à temps plein ? La rentrée de septembre 2025 sera-t-elle aussi catastrophique que celle de 2024 ?
Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du numérique.
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique . La ministre d'État Élisabeth Borne, retenue, m'a confié le soin de vous répondre.
L'éducation nationale met tout en œuvre pour faire de l'école inclusive une réalité. Le mois dernier, la ministre de l'éducation nationale a ainsi lancé, aux côtés du ministre de la santé, les assises de la santé scolaire, dont les travaux accordent une place centrale aux élèves à besoins particuliers. Nous n'avons pas attendu pour agir : depuis 2017, près de 35 000 postes d'AESH ont été créés. Cet effort se poursuivra à la rentrée scolaire 2025 avec la création de 2 000 emplois supplémentaires et le maintien de 4 000 postes d'enseignants dans le budget, malgré la censure dont votre groupe est comptable.
Dans l'ensemble des académies, 90 502 AESH pourront accompagner les élèves à la rentrée prochaine. En ce qui concerne le Val-d'Oise, leur nombre a augmenté de 52 % depuis 2017, pour plus de 1 900 recrutements au total. Le déploiement en parallèle des pôles d'appui à la scolarité permet d'identifier des réponses rapides, efficaces, adaptées aux familles.
S'agissant enfin du problème de non-remplacement de certains professeurs dans votre département, sachez que pour la seule année 2024-2025, le ministère y a déployé 400 contractuels. Cet effort se poursuivra naturellement à la rentrée prochaine, avec la création de 50 postes destinés au renforcement des brigades de remplacement du Val-d'Oise. Aussi puis-je réaffirmer l'engagement total du gouvernement en faveur de la santé scolaire, qui nous permet de réaliser l'école inclusive.
Auteur : Mme Gabrielle Cathala
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 10 juin 2025