Enfants à la rue : il y a urgence à agir !
Question de :
Mme Nathalie Oziol
Hérault (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Nathalie Oziol alerte Mme la ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement, sur le nombre inquiétant de familles sans-abri à Montpellier. À Montpellier, la situation du logement et de l'hébergement d'urgence pour les populations les plus précaires est désastreuse et les enfants en sont les premières victimes. Selon les déclarations de la première adjointe au maire de Montpellier lors d'une rencontre avec des parents d'élèves et associations mobilisés pour le droit au logement, ce sont 80 enfants scolarisés dans la ville qui vivent actuellement dans la rue. Ce chiffre peut lui-même être élargi aux 200 enfants qui vivent en situation de mal-logement, incluant logement insalubre, squat ou sans-abrisme. Plusieurs collectifs de parents d'élèves ont récemment interpellé Mme la députée pour l'alerter sur des cas de sans-abrisme pour des familles entières, dont les enfants sont scolarisés dans des écoles à Montpellier. Face à cette crise du logement et de l'hébergement qui s'accentue année après année, les réponses apportées ne sont pas suffisantes : le Gouvernement s'obstine dans une politique de réponse éphémère de court terme qui ne répond pas aux besoins structurels de cette crise. L'association UNICEF constate, en août 2024, « un abandon de tous les principes fondamentaux et juridiques de l'accueil, qui ne permettent même plus de protéger des femmes enceintes et des enfants de moins de trois ans ». À Montpellier, des associations témoignent qu'à partir des 3 ans de l'enfant, le 115 ne prendra plus en charge les mères isolées et les renverra à la rue car le service est saturé. Alors que tous les acteurs associatifs appellent à la construction de logements sociaux et à l'ouverture de places d'hébergement d'urgence, la réponse du Gouvernement est l'inaction. Mme la ministre répondait le 19 février 2025 à la question de Mme la députée Anaïs Belouassa Cherifi en indiquant qu'« un plan de lutte contre le sans-abrisme sera également mené, en collaboration avec le ministère du travail et de la santé, pour aller plus loin, agir sur le parcours de ces personnes et trouver des solutions leur permettant de sortir de l'hébergement d'urgence ». Face à l'aggravation de la situation du logement à Montpellier et face aux trop nombreux enfants sans-abri, elle l'interroge quant à la réponse du Gouvernement face à cette crise et lui demande des éléments concrets liés au plan de lutte contre le sans-abrisme annoncé par le Gouvernement.
Réponse en séance, et publiée le 16 juillet 2025
FAMILLES SANS ABRI À MONTPELLIER
Mme la présidente . La parole est à Mme Nathalie Oziol, pour exposer sa question, no 397, relative aux familles sans abri à Montpellier.
Mme Nathalie Oziol . « Un toit est un droit, pas d'enfant à la rue ! » Voilà ce que scandent depuis des mois, à Montpellier, des parents mobilisés pour alerter les autorités sur la situation de familles sans abri. En août 2024, le sixième baromètre « Enfants à la rue » réalisé par l'Unicef relevait une hausse de 120 %, par rapport aux chiffres de 2020, du nombre d'enfants sans solution d'hébergement à la suite de leur demande au 115.
À Montpellier, la situation du logement et de l'hébergement d'urgence est désastreuse et les enfants en sont les premières victimes. Selon les déclarations d'une élue locale, on y a officiellement recensé quatre-vingts enfants scolarisés vivant dans la rue. Ce chiffre peut être élargi pour inclure les 200 enfants qui vivent en situation de mal-logement, ce qui recouvre la vie dans un logement insalubre, dans un squat ou encore le sans-abrisme.
Trois écoles m'ont récemment interpellée pour m'alerter sur des cas de sans-abrisme concernant des familles entières, soumises ou non à une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Une famille composée de deux parents et de leurs trois jeunes enfants scolarisés vit à la rue et sous la menace d'un renvoi en centre de rétention administrative (CRA), le rejet par le tribunal administratif d'une demande de régularisation à titre exceptionnel ayant entraîné le renvoi de la famille hors de son hébergement d'urgence malgré l'état de santé alarmant d'une des enfants. Cette situation bafoue les principes de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE), dont la France est pourtant signataire.
Je salue et je félicite les parents, les collectifs, les associations, les syndicats qui se mobilisent par solidarité, fraternité et humanisme et qui créent des réseaux d'entraide pour éviter le pire. Je déplore les cas où l'État manque à son rôle et se défausse de toute responsabilité. À Montpellier, pour qu'une famille à la rue dont les enfants étaient scolarisés en ville obtienne une réponse, il a fallu plusieurs mois de mobilisation, des rassemblements, des marches, des pétitions, des conférences de presse et même l'occupation de l'école par plusieurs familles. C'est uniquement grâce à la mobilisation extraordinaire de parents et de leur réseau associatif que le sujet est remonté et que la famille en question a enfin reçu une proposition d'hébergement.
Face à cette crise du logement et de l'hébergement qui s'accentue année après année, les solutions proposées sont insuffisantes. Le gouvernement s'obstine dans une politique de soutien éphémère, de court terme, qui ne répond pas aux besoins structurels de cette crise. L'Unicef constate « un abandon de tous les principes fondamentaux et juridiques de l'accueil, qui ne [permet] même plus de protéger des femmes enceintes et des enfants de moins de 3 ans ». À Montpellier, des associations témoignent que le 115 ne prend plus en charge les mères isolées dès lors que leur enfant atteint l'âge de 3 ans, et les renvoie à la rue à cause de la saturation du service.
Alors que tous les acteurs associatifs appellent à la construction de logements sociaux et à l'ouverture de places d'hébergement d'urgence, la réponse du gouvernement est l'inaction. Mme Valérie Létard a évoqué un plan de lutte contre le sans-abrisme ; où en est-on ? Qu'est-il prévu ? Pourquoi des enfants dorment-ils toujours à la rue en France en 2025 ?
Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ruralité.
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité . Votre question n'en est pas tout à fait une ; c'est plutôt une déclaration à charge. Elle porte sur un sujet important. En la matière, il serait bon de rester factuel et de tenir compte de l'action du gouvernement.
En 2017, le plan « logement d'abord » a été lancé pour lutter contre la précarité. Grâce à l'action du gouvernement, 650 000 personnes ont accédé à un logement depuis le 1er janvier 2018. Les crédits qu'y consacre l'État ont atteint 3 milliards d'euros en 2024. Cet effort a permis de financer un parc d'hébergement qui s'établit désormais à 203 000 places. Pour renforcer l'efficacité de ces dispositifs, les effectifs des services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) ont doublé depuis 2017.
Toutefois, certains territoires restent confrontés à des difficultés liées au marché de l'immobilier. C'est le cas de Montpellier. L'État agit résolument dans le département : 1 184 nouvelles places d'hébergement y ont été ouvertes depuis 2017, soit une augmentation de 84 % qui a permis de porter le parc départemental à 2 592 places.
Il convient aussi de souligner le travail partenarial inédit entre l'État, la ville, le département, la métropole et la Fondation pour le logement des défavorisés en matière de résorption des bidonvilles, car cette problématique est prégnante dans le territoire. Plusieurs sites ont été résorbés au cours des derniers mois et un autre le sera encore cet été.
Mme la présidente . La parole est à Mme Nathalie Oziol.
Mme Nathalie Oziol . J'ai pris bonne note de votre réponse. Permettez-moi de répéter ce que dit l'Unicef et que résume en ces termes Public Sénat : « L'augmentation est alarmante. Au moins 2 043 enfants vivent à la rue en France, d'après le baromètre réalisé par l'Unicef et la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) le 19 août [2024]. Un chiffre en augmentation de 120 % par rapport à 2020. » Ce sont des observateurs spécialisés qui le disent ! « Certains sont scolarisés, d'autres n'ont pas encore l'âge d'entrer à l'école : 467 d'entre eux ont en effet moins de trois ans. Et le chiffre est probablement sous-estimé, car le décompte s'appuie sur les demandes que le 115 n'a pas pu satisfaire. Or beaucoup n'essayent même plus d'appeler tant ils savent que leur requête n'a presque aucune chance d'aboutir. » Voilà la réalité de ce pays, voilà ce qu'est la France en 2025, voilà le résultat de votre inaction gouvernementale.
Auteur : Mme Nathalie Oziol
Type de question : Question orale
Rubrique : Logement
Ministère interrogé : Logement
Ministère répondant : Logement
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 10 juin 2025