Question orale n° 398 :
Lutte contre la pollution aux PFAS dans les cultures destinées à l'alimentation

17e Législature

Question de : M. Gabriel Amard
Rhône (6e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

M. Gabriel Amard interroge Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur ses intentions de prendre des mesures concrètes pour lutter contre la pollution aux PFAS dans les cultures destinées à l'alimentation. La loi du 27 février 2025 visant à protéger la population des risques liés aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS) interdit ces polluants persistants dans les cosmétiques, les vêtements, les chaussures et les farts pour les skis à partir de 2026. Or des produits phytosanitaires contenant des PFAS sont toujours utilisés dans l'agriculture, en France, telles que le diflufenican (autorisé dans certains secteurs comme le désherbage chimique de champs) et le flufénacet (interdit le 12 mars 2025 mais avec une période de transition de dix-huit mois), soit les deux plus gros pesticides à base de PFAS en Europe et en France selon un rapport du collectif Générations Futures de novembre 2023 (mis à jour depuis), ou encore des substances moins connues mais toutes aussi dangereuses comme le béflubutamide, le flonicamide, le flurochloridone et bien d'autres. Du fait de leur utilisation dans l'agriculture, les pesticides contenant des PFAS se retrouvent dans les assiettes. De plus, l'épandage de boues d'épuration sur les cultures destinées à l'alimentation, contenant des PFAS, est pratiqué. La direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement a réalisé en mars 2023 des analyses dans les boues en provenance de la station d'épuration de Givors, en aval des rejets industriels. Celles-ci ont indiqué une présence élevée de PFAS, notamment de PFOS, un des polluants éternels les plus dangereux pour la santé, interdit depuis 2009 dans l'Union européenne à travers le règlement sur les polluants organiques persistants (POP). Pourtant, aucun arrêté préfectoral n'a été pris en 2023 suite aux analyses de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) pour cesser cet épandage qui participe à la dissémination des polluants éternels de la vallée de la chimie dans l'environnement et dans l'alimentation. Ainsi, ce sont 517 tonnes qui ont été répandues sur des champs de l'agglomération lyonnaise en 2023 selon le syndicat mixte d'assainissement pour la station d'épuration de Givors (SYSEG). Cela a des conséquences sur la santé : l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a indiqué en 2020 que l'exposition aux polluants persistants avait un lien direct avec des taux élevés de cholestérol, une diminution du poids à la naissance, des perturbations du fonctionnement du foie et une moins bonne réponse aux vaccins pour les enfants. L'agence européenne pour l'environnement affirme quant à elle que les polluants persistants peuvent entraîner « des problèmes de santé tels que des lésions hépatiques, des maladies thyroïdiennes, de l'obésité, des problèmes de fertilité et des cancers ». Des types de PFAS comme l'acide perfluorooctanoïque (PFOA) et l'acide perfluorooctane sulfonique (PFOS) sont respectivement considérés comme cancérogènes et cancérogènes probables par le Centre international de recherche contre le cancer. Toujours selon l'EFSA, les produits de la mer, les œufs et les viandes sont les aliments contribuant le plus à l'exposition au PFOS et au PFOA. L'Académie des sciences tire les mêmes conclusions que l'EFSA : « la viande, les œufs et les produits de la mer représentent une voie de contamination significative » précise-t-elle dans son nouveau rapport daté de mars 2025. Elle ajoute qu'aujourd'hui, plusieurs PFAS à longue chaîne (PFOA, PFOS, PFNA, PFHxS) sont systématiquement mesurés dans le sérum sanguin des populations humaines des pays industrialisés, dès la vie in utero. Leur omniprésence, même chez des personnes non exposées professionnellement, suggère que la principale source de contamination provient de l'usage généralisé des PFAS dans les produits de consommation (alimentation) et par les industries (agriculture). Toujours selon ce rapport, en France, l'exposition aux PFAS a été évaluée dans le cadre du programme Esteban, qui a mesuré 17 PFAS, sur la période 2014-2016, dans le sérum d'enfants et d'adultes. Le PFOA et le PFOS, principaux contributeurs à l'imprégnation, ont été détectés chez 100 % des participants, parmi lesquels la moitié est contaminée au-delà du seuil de sécurité actuellement admis, formulé par la Commission allemande de biosurveillance humaine (HBM). Par ailleurs, M. le député souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur le décret n° 2025-431 du 14 mai 2025 relatif à la transmission des informations sur les services publics d'eau et d'assainissement et sur l'article L. 1321-9 du code de la santé publique, qui devait initialement préciser de nouveaux paramètres destinés à enrichir le rapport annuel sur la qualité de l'eau. Or non seulement ce décret abandonne l'ensemble des critères annoncés, vidant ainsi de sa substance la réforme attendue, mais il a également été adopté sans consultation du Conseil d'État. Il est impératif de rappeler que le Parlement ne saurait être écarté du processus : une telle mesure relève d'un débat démocratique en bonne et due forme, inscrit à l'ordre du jour et non d'un simple décret d'application. Enfin, l'un des seuls moyens efficaces connus à ce jour, pour dépolluer les milieux des PFAS consiste à les capter grâce à des charbons actifs. Or Mme la ministre de la transition écologique l'a confirmé, il n'existe actuellement aucune filière de régénération des charbons actifs en France, obligeant les opérateurs à les stocker ou à les exporter à l'étranger. Dans ce contexte, il souligne également que les macérats issus de la potabilisation, qui sont souvent contaminés par les PFAS, mériteraient d'être mentionnés au même titre que les charbons actifs dans les dispositifs de traitement et de suivi. Il demande aussi à ce que le traitement des déchets liés à ces opérations de dépollution n'aboutisse pas à une destruction dans les filières classiques de gestion des déchets ménagers. En effet, les déchets ménagers ultimes, lorsqu'ils sont incinérés, le sont généralement à des températures allant de 800 à 900 degrés celsius, tandis que selon le rapport de l'Académie des sciences, la destruction efficace des molécules de PFAS nécessiterait des températures d'au moins 1 400 degrés. Le traitement actuel est donc insuffisant pour neutraliser ces substances. Dans ce contexte, il l'interroge sur ses intentions de doter la France des moyens nécessaires, techniques et financiers pour faire face à la pollution par des polluants persistants, notamment dans l'eau et dans les cultures destinées à l'alimentation.

Données clés

Auteur : M. Gabriel Amard

Type de question : Question orale

Rubrique : Environnement

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 juin 2025

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