Présence de microplastiques dans l'eau
Question de :
M. Thierry Frappé
Pas-de-Calais (10e circonscription) - Rassemblement National
M. Thierry Frappé attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins, sur les récentes études scientifiques mettant en lumière la présence de microplastiques dans l'eau potable, qu'elle soit en bouteille ou issue du robinet. Une étude menée par des chercheurs toulousains, publiée dans la revue Plos Water, révèle que toutes les marques d'eau en bouteille analysées contiennent des quantités mesurables de microplastiques, avec des niveaux allant de 19 à 1 154 particules par litre. Plus préoccupant encore, 98 % des particules détectées mesurent moins de 20 microns et 94 % moins de 10 microns, seuils en dessous desquels elles peuvent potentiellement circuler dans le sang et affecter l'ensemble de l'organisme. Les études sur modèles animaux révèlent des impacts inflammatoires et oxydants inquiétants. Par ailleurs, les analyses ont montré que les polymères les plus présents dans l'eau, comme le polyéthylène et le polypropylène, ne proviennent pas directement des bouteilles elles-mêmes. Ces données suggèrent que la pollution plastique pourrait être liée à la contamination des ressources en eau ou aux processus industriels de mise en bouteille. Face à ces constats, M. le député s'interroge sur les mesures prévues par le Gouvernement pour renforcer les contrôles et analyses sur la présence de microplastiques dans les eaux consommées par les Français. Il souhaite également savoir si des études sont envisagées pour évaluer précisément les risques sanitaires associés à l'ingestion de ces particules, notamment les nanoparticules. Enfin, il appelle à une réflexion sur l'amélioration des normes européennes et nationales encadrant les seuils et méthodes de détection des microplastiques dans l'eau potable, ainsi que sur la mise en place de stratégies visant à réduire cette contamination à sa source. Dans un contexte où la pollution plastique ne cesse de croître, il est crucial de garantir la sécurité sanitaire des ressources en eau et de protéger la santé des citoyens. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer les initiatives qui seront prises en ce sens.
Réponse publiée le 1er juillet 2025
L'attention du ministre chargé de la santé est appelée sur la présence de microplastiques dans l'eau. Les microplastiques sont décrits comme des particules constituées de polymères de plastique d'une taille comprise entre quelques dizaines de nanomètres et quelques centaines de micromètres résultant de la dégradation, fragmentation, abrasion d'objets macroscopiques en plastique ou matériaux composites, dont la diffusion planétaire depuis le milieu du XXème siècle conduit à la contamination généralisée des différents compartiments environnementaux (eaux, air, sols) et à leur accumulation dans les chaînes alimentaires. La préoccupation récente autour des microplastiques n'est pas qu'environnementale et concerne également la nécessaire évaluation des risques sanitaires liés à une exposition interne ou externe à ces microparticules. En 2019, l'organisation mondiale de la santé a publié un état des recherches et des connaissances sur la présence des microplastiques dans les eaux de boisson et incitait à poursuivre et amplifier les travaux d'évaluation des risques pour la santé humaine. A ce jour, la réglementation européenne ne prévoit pas la recherche des microplastiques dans les eaux conditionnées ni dans l'eau du robinet. La directive (UE) 2020/2184 du Parlement européen et du conseil du 16 décembre 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (refonte) introduit à l'article 13, la notion de « liste de vigilance » couvrant les substances ou composés qui constituent un sujet de préoccupation car ils sont susceptibles d'être présents dans les eaux destinées à la consommation humaine et pourraient poser un risque potentiel pour la santé humaine. Une valeur indicative pour chacune des substances ou chacun des composés inscrit à la liste de vigilance est prévue et, lorsqu'il y a lieu, une méthode d'analyse possible qui n'entraîne pas de coûts excessifs. Les microplastiques devraient faire partie de cette liste de vigilance. A cette fin, la commission européenne a élaboré un acte délégué pour l'analyse des microplastiques dans l'eau potable qui est encore en cours de validation : Register of Commission Documents - C (2024) 1459. A ce jour, cet acte n'est pas entériné par le Parlement européen et le conseil de l'Union européenne. La méthode analytique préconisée dans cet acte délégué nécessite le prélèvement d'un volume de 1000 litres (versus 1,5 litre en général pour une analyse du contrôle sanitaire classique), ce qui pose des problèmes techniques et questionne également au regard du contexte de raréfaction de la ressource en eau. Une fois la méthode analytique définie, les microplastiques pourront être ajoutés à la liste des paramètres soumis au mécanisme de vigilance et la Commission européenne devra définir une valeur sanitaire associée. S'agissant de l'industrie des eaux conditionnées, celle-ci exploite des ressources en eau souterraine dont la pureté originelle doit être démontrée par l'exploitant. Ainsi, les eaux conditionnées doivent être non contaminées à l'émergence par des résidus des activités humaines. La mise sur le marché des eaux minérales naturelles et des eaux de source est soumise au respect des principes de la directive 2009/54/CE du Parlement européen et du conseil du 18 juin 2009 relative à l'exploitation et à la mise dans le commerce des eaux minérales naturelles (refonte) et aux règlements européens qui encadrent l'hygiène des denrées alimentaires (règlement n° 852/2004 du Parlement européen et du conseil du 29 avril 2004 et le règlement n° 1935/2004 du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 2004 concernant les matériaux et objets destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires). Les matériaux des emballages et des systèmes de fermeture (bouchons) utilisés pour le conditionnement des eaux embouteillées doivent démontrer leur innocuité vis-à-vis de la denrée alimentaire qu'ils contiennent. Enfin, plus globalement, la stratégie européenne sur les matières plastiques vise à limiter l'utilisation intentionnelle de microplastiques. C'est dans ce cadre que s'inscrit le projet de règlement en cours d'élaboration relatif à la prévention des pertes dans l'environnement de granulés plastiques - les matières premières industrielles utilisées pour fabriquer des produits en plastique. Ce texte vise à améliorer la manipulation des granulés plastiques à tous les stades de la chaîne d'approvisionnement, ce qui pourrait réduire les pertes de granulés plastiques dans l'environnement jusqu'à 74 %. Ainsi, le ministère chargé de la santé s'attachera, en lien avec les autres ministères concernés, à faire évoluer la réglementation française pour protéger les consommateurs dans le respect des réglementations européennes et au regard des connaissances scientifiques et techniques.
Auteur : M. Thierry Frappé
Type de question : Question écrite
Rubrique : Pollution
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Dates :
Question publiée le 11 février 2025
Réponse publiée le 1er juillet 2025