Assistantes maternelles face aux salaires impayés
Question de :
Mme Sophie Errante
Loire-Atlantique (10e circonscription) - Non inscrit
Mme Sophie Errante attire l'attention de Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi, sur les difficultés rencontrées par les assistantes maternelles en cas de non-paiement de leur salaire. Actuellement, les parents employeurs perçoivent la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), une aide définie à l'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale comme une prestation familiale. Toutefois, selon l'article L. 533-4 du même code, ces prestations sont insaisissables, sauf en cas de fraude avérée ou de fausse déclaration de l'allocataire. Ainsi, lorsqu'une assistante maternelle n'est pas rémunérée et engage une procédure judiciaire, les sommes allouées par l'État pour la garde des enfants ne peuvent être utilisées pour régler la dette salariale. Cette situation peut placer les assistantes maternelles dans une précarité alarmante. Même lorsque les prud'hommes statuent en leur faveur, les huissiers se retrouvent dans l'impossibilité d'exécuter les décisions de justice, laissant ces professionnelles sans recours. En plus de ne pas percevoir leur dû, elles doivent assumer des frais judiciaires élevés et se voient souvent privées de leurs documents de fin de contrat nécessaires à l'ouverture de leurs droits aux indemnités de chômage. De nombreuses assistantes maternelles finissant par renoncer à leur métier face à ces impayés, les organisations représentatives, syndicales et associatives ont statué en faveur de la création d'un fonds national de garantie des salaires, or il semble qu'aujourd'hui aucune mesure concrète n'ait encore été prise pour remédier à cette injustice. Elle lui demande donc quelles actions le Gouvernement envisage pour répondre à cette problématique.
Réponse publiée le 20 mai 2025
Le contrat de travail liant un particulier employeur à une assistante maternelle est encadré par le code de l'action sociale et des familles, le code du travail ainsi que par la convention collective nationale des particuliers employeurs et de l'emploi à domicile du 15 mars 2021. Ainsi, la loi (article L. 423-2, 14° du code de l'action sociale et des familles) prévoit que les dispositions du code du travail s'appliquent en ce qui concerne l'obligation de paiement du salaire, qui doit être remplie dans les délais légaux. Pour les salariés mensualisés, la rémunération est due une fois par mois. Pour les autres, le versement doit intervenir au moins deux fois par mois, avec un intervalle maximal de 16 jours. Tout retard ou défaut de paiement constitue un manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles et peut justifier une rupture du contrat à ses torts (Cass. soc., 26 oct. 2011, n° 10-17.396). Dès lors, en cas d'impayé, l'assistante maternelle peut saisir le conseil de prud'hommes pour obtenir la reconnaissance de la responsabilité de l'employeur. Si les faits sont avérés et suffisamment graves, la prise d'acte de la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. À défaut, elle sera assimilée à une démission. L'employeur encourt également une amende prévue pour les contraventions de la 3e classe (article R. 3246-1 du code du travail). Cependant, lorsqu'une assistante maternelle n'est pas rémunérée et engage une procédure judiciaire, les prestations d'accueil du jeune enfant versées par l'État sur le fondement de l'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale pour la garde des enfants ne peuvent être utilisées pour régler la dette salariale (article L. 533-4 du code précité), ce qui peut en effet engendrer une grande précarité et conduire à renoncer à exercer cette profession. Face à cette problématique, le Gouvernement a présenté en octobre 2023 un plan pour l'accueil individuel comprenant quatre axes : susciter des vocations, prévenir les départs, favoriser le développement des nouveaux modes d'exercice et mieux rémunérer et valoriser les personnels. Ce plan est fondé sur les travaux que le comité de filière « petite enfance » a menés en lien étroit avec les représentants des associations et des syndicats concernés. Plusieurs pistes pour lutter contre les impayés de salaire ont été étudiées, dont le maintien du salaire sur plusieurs mois ou la constitution d'un fonds de garantie. La solution retenue est la garantie par le service optionnel et gratuit Pajemploi+ non plus d'un mois, mais de deux mois de salaire, dès le second semestre de 2024. Alors qu'auparavant cette couverture se limitait à un mois de salaire, elle peut désormais aller jusqu'à deux mois en cas de défaut de paiement du parent employeur pour les professionnels affiliés à Pajemploi+, soit 51 % des assistantes maternelles déclarées en septembre 2024. Ce service assure le versement de la rémunération sur le compte bancaire du salarié dans un délai de quatre jours suivant la déclaration sociale de la famille et prélève parallèlement sur le compte bancaire des parents employeurs la somme restant à leur charge, qui peut s'élever à deux mois de salaire en cas d'impayé. Cette mesure est opérationnelle depuis octobre 2024. Par ailleurs, le Gouvernement, qui a étudié avec intérêt la proposition de créer un fonds de garantie dans le cadre du plan d'accueil individuel, continuera de suivre les travaux des partenaires sociaux à ce sujet, car c'est à ces derniers qu'appartient l'initiative de constituer un tel fonds. S'agissant de la remise des documents de fin de contrat nécessaires à l'ouverture de leurs droits aux indemnités de chômage, celle-ci constitue une obligation légale pour l'employeur. L'article R. 1234-9 du code du travail impose à ce dernier de fournir au salarié, dès la cessation du contrat, les attestations requises et de les transmettre sans délai à France Travail. Le non-respect de cette obligation est passible d'une amende (article R. 1238-7 du code du travail). En cas de refus ou de retard dans la remise des documents, l'assistante maternelle peut saisir le conseil des prud'hommes. Le bureau de conciliation et d'orientation peut alors contraindre l'employeur à délivrer les documents sous peine d'une astreinte financière. En outre, si ce retard cause un préjudice, une action en dommages et intérêts peut être engagée. Enfin, sur les frais de justice, les assistantes maternelles confrontées à des impayés doivent en effet souvent engager des procédures judiciaires, ce qui entraîne des frais non négligeables (honoraires d'avocat, frais d'huissier, frais de justice). Ces coûts peuvent aggraver la précarité des professionnelles concernées, d'autant plus qu'elles doivent attendre plusieurs mois, voire plusieurs années, avant d'obtenir une décision exécutoire. Pour alléger cette charge financière, les assistantes maternelles peuvent bénéficier, sous conditions de ressources, de l'aide juridictionnelle, qui prend en charge tout ou partie des frais de procédure. Par ailleurs, les syndicats et associations professionnelles peuvent accompagner ces démarches, notamment en offrant des conseils juridiques ou en mettant à disposition des modèles de courriers et de recours.
Auteur : Mme Sophie Errante
Type de question : Question écrite
Rubrique : Prestations familiales
Ministère interrogé : Travail et emploi
Ministère répondant : Travail et emploi
Dates :
Question publiée le 11 février 2025
Réponse publiée le 20 mai 2025