Question écrite n° 4033 :
Décret modifiant les conditions d'accès au poste de directeur en crèche

17e Législature

Question de : M. Romain Daubié
Ain (2e circonscription) - Les Démocrates

M. Romain Daubié attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur les conséquences potentiellement préoccupantes du projet de décret visant à aligner les exigences de qualification du personnel des micro-crèches sur celles des structures d'accueil de plus grande taille. Les micro-crèches sont de petites structures pouvant accueillir jusqu'à 12 enfants et ont été conçues pour répondre à des besoins spécifiques. Elles sont très présentes en zones périurbaines et rurales. Elles répondent aux besoins des parents ayant des horaires de travail décalés et constituent un travail de proximité pour les salariés. De ce fait, ces organismes jouent un rôle central dans l'offre de garde d'enfant, particulièrement dans le département de l'Ain. Le projet de décret en cours d'examen au Conseil d'État prévoit de supprimer les dérogations dont les micro-crèches bénéficient, qui avaient pour but initial de faciliter l'installation et l'ouverture de ces structures, en recrutant des personnes titulaires de CAP. Le décret viserait la mise en place d'une obligation de détention d'un diplôme de niveau 1 pour tout personnel à la direction de l'une de ces structures ainsi que pour les personnes ayant sous leur responsabilité au moins 3 berceaux. Dès lors, bien que cette initiative vise à renforcer la sécurité et la qualité d'accueil suite à des faits divers ayant suscité une vive émotion, elle soulève des inquiétudes quant à sa faisabilité et son impact sur le terrain. En effet, le décret exigerait le recrutement du personnel diplômé d'État à partir du 1er janvier 2026, signifiant qu'un nombre de personnel suffisant doive être formé avant la fin de l'année 2025. Cet objectif paraît difficilement atteignable compte tenu de la pénurie actuelle de professionnels qualifiés dans le secteur de la petite enfance. Le sujet de l'équilibre économique des micro-crèches ne doit pas être occulté. En conséquence, cette mesure aurait comme effet de compromettre le maintien de l'ouverture de nombreuses micro-crèches. En l'espèce, il apparaît indispensable, pour la faisabilité du projet, d'instaurer des mesures de transition, telles que l'accélération de la validation des acquis de l'expérience (VAE) qui prend aujourd'hui entre 12 et 18 mois pour aider le personnel déjà en poste à obtenir les formations requises, ou des dérogations et aménagements pour les zones les plus rurales qui sont de facto les plus en besoin de ces structures. C'est pourquoi il souhaite l'interroger sur les mesures qu'elle compte mettre en place pour permettre aux micro-crèches de s'adapter à ces nouvelles exigences, à défaut de report ou d'une phase dérogatoire de transition.

Réponse publiée le 18 mars 2025

Ce projet de décret, en cours d'examen par le Conseil d'Etat, a notamment pour objet d'aligner les normes d'encadrement des micro-crèches sur les crèches classiques de taille similaire (petites crèches). Il revient sur les dérogations qui s'appliquaient aux micro-crèches et demande que la structure compte au moins un professionnel diplômé d'Etat de rang 1 et la possibilité pour ce professionnel d'accueillir seul jusqu'à 3 enfants. Le texte prévoit qu'un directeur exerce des fonctions de direction pour un maximum de 2 établissements. La priorité de cette mesure est la qualité de l'accueil des enfants et la mise en place des garanties nécessaires pour que l'accueil soit respectueux de leurs besoins et de leurs droits. Cette qualité d'accueil est également la condition primordiale pour restaurer l'attractivité des métiers : les professionnels ne pourront venir et rester dans le secteur de la petite enfance que s'ils sont en mesure d'exercer leur profession d'une façon qui soit conforme à leurs valeurs et à leur formation. La pénurie ne pourra pas se résoudre en dégradant les conditions d'accueil et les conditions de travail pour être en mesure de recruter et de maintenir l'offre : cette dynamique suivie au cours des quinze dernières années a montré toutes ses limites et a conduit à la crise que nous connaissons aujourd'hui. Tout a été mis en place depuis deux ans pour s'engager dans un mouvement positif afin de rétablir la qualité d'accueil comme corollaire et préalable de la réponse aux défis de la pénurie de professionnels. Plusieurs rapports des inspections générales, tant le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de 2023 sur la qualité d'accueil et la prévention de la maltraitance dans les crèches que le rapport IGAS-Inspection générale des finances (IGF) sur les micro-crèches de 2024, ont souligné au cours des deux dernières années que les conditions d'encadrement dérogatoires prévues pour les micro-crèches n'étaient pas suffisantes pour garantir cette qualité d'accueil et permettre un accompagnement adéquat des professionnels dans l'exercice de leur métier. Les conclusions de ces rapports, fruits de plusieurs mois d'investigations approfondies des inspections générales, ont été saluées par l'ensemble du secteur pour leur pertinence et leur fidélité à la réalité quotidienne des professionnels et des enfants qu'ils accueillent. Le Gouvernement agit en conformité avec ces recommandations. Les enfants qui sont accueillis dans les micro-crèches et dans les petites crèches sont les mêmes : il n'y a aucune raison acceptable que les conditions prévues pour l'encadrement ne soient pas similaires. Les catégories administratives n'ont pas à avoir d'influence sur la façon dont sont accompagnés les enfants.  Ces orientations ne signifient nullement que l'Etat abandonne les micro-crèches : il finance ces établissements en versant aux parents le complément mode de garde et en accordant aux entreprises qui y réservent des berceaux des crédits d'impôt et des exonérations sociales. A ce jour, le montant global de financement public pour un berceau en micro-crèche prestation d'accueil du jeune enfant peut aller jusqu'à près de 22 000 euros par an (rapport IGAS-IGF). L'Etat agit en faveur des professionnels, qui sont confrontés quotidiennement aux difficultés induites par des conditions d'encadrement fragiles, pour leur donner la même qualité de conditions de travail et d'accompagnement que les salariés de crèches classiques. S'agissant de fonctions de directeur, les professionnels titulaires de diplômes d'Etat, notamment les éducateurs de jeunes enfants et les infirmiers puériculteurs, sont formés pour assurer la direction des structures, accompagner et former leurs équipes, animer le projet pédagogique de l'établissement. Ils permettent à tous les professionnels de la structure de travailler en confiance et en sécurité avec un encadrement formé. Il est de la responsabilité des gestionnaires et des employeurs d'accompagner les professionnels titulaires d'un certificat d'aptitude professionnelle ou d'un diplôme d'auxiliaire de puériculture dans leur parcours de carrière et de leur permettre d'acquérir les diplômes et certifications nécessaires pour progresser vers des emplois de direction.  Pour accompagner cette réforme, des mesures dérogatoires sont prévues pour les personnels déjà en poste et les nouvelles normes ne s'appliqueront aux recrutements qu'à partir du 1er septembre 2026, afin de laisser le temps nécessaire pour s'organiser et pour préserver les structures existantes. Des travaux sont également en cours pour faciliter l'accès à la validation des acquis de l'expérience pour les professsionnels. Le Gouvernement reste néanmoins vigilant quant au modèle économique global de ces crèches. C'est dans cette optique qu'une réforme du financement de l'accueil du jeune enfant est d'ores et déjà engagée. Les élus seront associés à cette démarche et ses effets se concrétiseront pleinement dans la prochaine convention d'objectifs et de gestion de la caisse nationale des allocations familiales, afin de favoriser la création et le maintien de places dans un cadre financier plus sécurisé.

Données clés

Auteur : M. Romain Daubié

Type de question : Question écrite

Rubrique : Professions et activités sociales

Ministère interrogé : Travail, santé, solidarités et familles

Ministère répondant : Travail, santé, solidarités et familles

Dates :
Question publiée le 11 février 2025
Réponse publiée le 18 mars 2025

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