Difficultés rencontrées par les agents pénitentiaires
Question de :
M. Emmanuel Blairy
Pas-de-Calais (1re circonscription) - Rassemblement National
M. Emmanuel Blairy interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur les très nombreuses difficultés rencontrées par les agents pénitentiaires. En mai 2024, 77 647 personnes sont détenues pour 61 737 places, illustrant une surpopulation carcérale critique. Ces agents doivent faire face à des problèmes de cohabitation dans les cellules, des tensions constantes, des insultes, des menaces et des agressions physiques. En 2020, on dénombrait 56 actes de violence contre le personnel pour 1 000 détenus, ce qui souligne la gravité de la situation. Les agents pénitentiaires sont également confrontés à des surcharges de travail en raison de la multiplication des dossiers, des mesures d'accompagnement et des prises en charge des détenus. Ils accomplissent avec courage leur mission de sécurisation, y compris lors du transport d'individus notoirement dangereux, malgré les risques élevés. La sécurité des agents doit rester une priorité absolue pour éviter que ne se reproduisent des drames comme celui du 14 mai 2024 à Incarville. Actuellement, les agents pénitentiaires ne sont pas équipés pour faire face à des commandos qui utilisent des armes de guerre. Face à cette nouvelle réalité, la réponse de l'État passera nécessairement par un effort d'investissement dans des équipements de sécurité adaptés et par la mise en place de formations spécifiques pour les agents. Par ailleurs, le parc immobilier pénitentiaire se détériore extrêmement vite, compliquant encore des conditions de travail déjà précaires. Les infrastructures vétustes nécessitent des rénovations urgentes pour permettre un environnement de travail sûr et salubre. Enfin, les agents font face à un sous-effectif chronique, qui exacerbe leur charge de travail individuelle et augmente les risques pour leur sécurité. Ce manque de personnel compromet l'efficacité des missions essentielles de surveillance et de réhabilitation des détenus. Leurs missions sont en péril, mettant en danger non seulement les agents, mais aussi l'ensemble du système pénitentiaire. Il est impératif de mettre en place sans délai des mesures efficaces pour remédier à la surpopulation carcérale, mettre à niveau la dotation d'équipements, rénover les infrastructures, assurer une formation continue et adéquate aux agents et recruter suffisamment de personnel pour répondre aux besoins croissants du système pénitentiaire. La situation actuelle ne peut perdurer sans compromettre gravement la sécurité et la dignité des agents pénitentiaires et, par extension, celle de la société tout entière. Par conséquent il lui demande quelles actions concrètes sont prévues pour améliorer réellement les conditions de travail du personnel tant sur le plan matériel que sécuritaire face à l'inaction et aux errements des différents gouvernements.
Réponse publiée le 8 avril 2025
Le ministère de la justice poursuit son engagement afin d'améliorer les conditions de travail des personnels pénitentiaires, ainsi que les conditions de détention des personnes placées sous main de justice (PPSMJ). Le service public pénitentiaire prend en charge les PPSMJ prévenues ou condamnées, en milieux ouvert et fermé. Elle contribue à l'insertion ou à la réinsertion des PPSMJ et concourt à la sauvegarde de l'ordre public. Pour autant, les décisions judiciaires dont elle assure l'exécution sont rendues dans le cadre des articles 64 et 66 de la Constitution du 4 octobre 1958 et relèvent de la seule compétence de l'autorité judiciaire. Au 7 mars 2025, le nombre de personnes écrouées détenues s'élevait à 82141 pour 62 385 places opérationnelles. Le programme immobilier pénitentiaire annoncé par le président de la République en 2018 prévoyait initialement la livraison de 15 000 places supplémentaires pour 2027. En fin d'année 2024, 22 établissements sur les 50 que prévoit le plan ont été livrés, pour un total d'environ 4 500 places nettes. Le calendrier de livraison du plan 15 000 fait actuellement l'objet d'un examen prioritaire pour permettre d'accélerer les projets de construction et de rénovation d'établissements. Un inspecteur général de la justice a d'ailleurs été chargé, depuis le 3 décembre dernier, de piloter la mission stratégique d'accélération du programme immobilier pénitentiaire. En parallèle, la direction de l'administration pénitentiaire, particulièrement vigilante à la régulation des effectifs des établissements les plus suroccupés, continue d'appliquer sa politique volontariste d'orientation des personnes détenues vers les établissements pour peine, y compris à faible reliquat de peine. Les actions de pilotage mises en œuvre permettent un suivi en temps réel des besoins et capacités d'accueil des établissements pénitentiaires. En outre, la mission d'urgence « mieux exécuter les peines », annoncée le 20 novembre dernier et composée de professionnels reconnus, a rendu ses conclusions le 10 mars 2025. Ces propositions seront examinées avec la plus grande attention dans les prochains jours. S'agissant des conditions de travail des personnels pénitentiaires, le protocole d'accord signé le 13 juin 2024 par le garde des sceaux et les organisations syndicales représentatives de l'administration pénitentiaire à la suite des événements tragiques du 14 mai 2024 comporte 33 mesures. Il a pour principal objectif d'apporter des réponses fortes et rapides aux besoins de sécurité et de protection des agents pénitentiaires dans l'exercice de leurs missions, notamment celles qu'ils réalisent à l'extérieur des établissements pénitentiaires. L'objectif du protocole est également d'améliorer la qualité et les conditions de vie au travail de ses personnels. En ce sens, l'ouverture d'un important chantier sur l'organisation du service et les cycles de travail, doit permettre d'assurer un meilleur équilibre entre les temps de vie professionnelle et personnelle. Par ailleurs, des réformes d'une ampleur inédite marquent la reconnaissance des métiers et des personnels de l'administration pénitentiaire. Les 31 000 agents du corps de commandement et du corps d'encadrement et d'application bénéficient de mesures de reclassement et de promotion historiques. Le décret n° 2023-1343 du 29 décembre 2023 modifie les modalités de versement de l'indemnité pour charges pénitentiaires (ICP) avec un effet rétroactif au 1er janvier 2024. Son application a donné lieu à la régularisation de l'ICP des personnels pénitentiaires sur leur rémunération du mois de mai. Cette indemnité doit progressivement s'élever à 3 835 € par an, soit 319,58 € par mois dès le mois de janvier 2026.
Auteur : M. Emmanuel Blairy
Type de question : Question écrite
Rubrique : Lieux de privation de liberté
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 8 avril 2025