Question au Gouvernement n° 438 :
Arrestation de Mohamed Amra et conditions de détention des condamnés pour narcotrafic

17e Législature

Question de : M. Christophe Blanchet
Calvados (4e circonscription) - Les Démocrates

Question posée en séance, et publiée le 5 mars 2025


ARRESTATION DE MOHAMED AMRA ET CONDITIONS DE DÉTENTION DES CONDAMNÉS POUR NARCOTRAFIC

Mme la présidente . La parole est à M. Christophe Blanchet.

M. Christophe Blanchet . Le 1er novembre 2024, Sarah Garcia a donné la vie à une petite fille, fruit de l’amour avec son mari, Arnaud. Malheureusement, cette petite fille ne connaîtra jamais son père car celui-ci, avec son coéquipier Fabrice Moello, a été sauvagement assassiné le 14 mai par des tueurs du narcotrafic venus libérer leur complice, un criminel multirécidiviste, Mohamed Amra. Aujourd’hui, nous pensons aux familles d’Arnaud et de Fabrice, à leurs amis, à leurs coéquipiers et à tout le personnel pénitentiaire qui, chaque jour, exerce une mission essentielle au péril de sa sécurité. (Applaudissements sur tous les bancs, de nombreux députés s'étant levés.)

Après des mois de cavale, nous saluons les efforts déployés par tous ceux qui, en France et en Europe, ont contribué à mettre fin à cette fuite.

Mais l’heure des comptes et du décompte a sonné. Il est légitime de s’interroger sur la manière dont ce fugitif a pu financer une telle cavale pendant aussi longtemps. D’où provenait cet argent ? Par quels réseaux et complicités a-t-il pu se cacher aussi longtemps ? Nous avons nos idées, mais savons-nous aujourd’hui combien il lui reste ? Combien pourrait-il encore utiliser pour continuer à nuire, même derrière les barreaux ?

Étant donné le profil de ces criminels et leur capacité à exercer une influence depuis l’intérieur des prisons, notamment grâce aux ressources financières issues du narcotrafic, comment garantir la protection de tous ceux qui sont à leur contact au quotidien ? Comment assurer que le personnel pénitentiaire ne soit ni menacé, ni infiltré, ni corrompu sous la pression de ces réseaux criminels ?

Il est fondamental que ces individus, une fois derrière les barreaux, n’aient plus aucune influence à l’extérieur et qu’ils ne puissent, en aucun cas, organiser leurs trafics depuis leur cellule ou menacer les gardiens et leurs familles.

Monsieur le garde des sceaux, comment garantissez-vous à cette petite fille de 5 mois et demi que justice sera rendue, à sa famille, aux familles des victimes, à tous les membres du personnel pénitentiaire et à notre société tout entière ? Comment assurez-vous qu’ils seront protégés et que ces criminels ne pourront plus jamais nuire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, EPR et DR.)

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Gérald Darmanin, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice . Je sais que vous êtes très proche des agents pénitentiaires de votre circonscription, en particulier de cette famille, frappée par le drame qui a touché toute la République, le 14 mai dernier. Avec le ministre de l'intérieur, je salue les enquêteurs qui ont travaillé durant neuf mois sous l'autorité des magistrats pour retrouver Mohamed Amra et ses complices. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR et Dem. – M. Stéphane Peu applaudit aussi.)

Je puis vous assurer que nous saurons, l'État et la justice, faire entendre que lorsque l'on touche à un agent pénitentiaire, un policier, un gendarme, un magistrat, un agent public, on doit répondre de ce crime le plus grave en étant condamné à une peine que j'espère extrêmement ferme.

Nous devrons demain prendre des mesures pour que plus jamais une telle affaire ne se reproduise, que plus jamais l'administration pénitentiaire ne pleure des époux, des épouses, des parents.

C'est pour cette raison qu'avec le ministre de l'intérieur, nous souhaitons nous inspirer de la législation italienne antimafia, pour durcir, à partir d'une proposition de loi adoptée au Sénat, la législation contre la criminalité organisée, en particulier le régime de détention des personnes les plus dangereuses. Nous voulons pouvoir isoler 500, 600 voire 700 personnes sur 82 000 détenus car elles représentent une réelle menace en ce qu'elles sont capables, depuis la prison, de corrompre, menacer, diriger des points de deal, récupérer des dizaines de millions d'euros, faire exécuter des contrats sur des agents de l'État, des avocats, des journalistes, des policiers, des magistrats, des femmes et des hommes politiques.

Comme en Italie, nous allons nous réveiller, et j'espère que d'ici quelques heures, la commission des lois, puis votre assemblée la semaine prochaine, votera ce nouveau régime de détention qui prévoit, ce qui est inédit dans notre histoire carcérale, d'isoler les personnes les plus dangereuses dans des prisons de haute sécurité, dont je vous parlerai plus en détail demain, de prévoir des fouilles systématiques, d'autoriser leur audition par le juge d'instruction par visioconférence, de les empêcher de téléphoner vingt-quatre heures sur vingt-quatre, bref de faire de ces lieux d'incarcération des cages de Faraday pour que jamais plus l'administration pénitentiaire n'ait à déplorer d'orphelins. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR et Dem.)

Données clés

Auteur : M. Christophe Blanchet

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mars 2025

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