Filière de la chimie
Question de :
Mme Marie-Noëlle Battistel
Isère (4e circonscription) - Socialistes et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 6 mars 2025
FILIÈRE DE LA CHIMIE
Mme la présidente . La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.
Mme Marie-Noëlle Battistel . Le 7 juillet dernier, monsieur le premier ministre, je vous interrogeais sur le placement en redressement judiciaire de l’entreprise Vencorex, au Pont-de-Claix. Je vous alertais alors sur le risque d’effet domino sur la plateforme voisine de Jarrie, sur la fermeture partielle de l’entreprise Arkema et, au-delà, sur l’avenir de toute la filière française de la chimie, dans laquelle 6 000 emplois directs et indirects sont en péril.
L’annonce à ses salariés, par Arkema, de la fermeture totale de l’entreprise vient aujourd’hui confirmer nos craintes. Arkema vous en avait-elle informé ?
Ce n’est donc plus seulement une alerte, mais l’annonce d’un désastre social et industriel.
Vous nous avez répondu, la semaine dernière, que vous écartiez la nationalisation temporaire que nous proposions, et qu’aucune autre solution ne semblait envisageable.
M. Stéphane Peu . Il faut nationaliser !
Mme Marie-Noëlle Battistel . Les parlementaires isérois et drômois ont pourtant tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences de ces fermetures pour notre souveraineté industrielle, mais aussi militaire.
La fermeture d’Arkema et de Vencorex ferait chuter de 14 % la production de chlore. Ce secteur, pourtant stratégique, financé à hauteur de 80 millions d’euros par l’État, se retrouverait définitivement dépendant des importations.
Vencorex est un sous-traitant clé de la dissuasion nucléaire française. Son produit phare, un sel de haute qualité, est le seul que la direction générale de l’armement a validé pour la fabrication des carburants des missiles nucléaires et des boosters de la fusée Ariane 6.
L’hydrogène produit par Arkema, quant à lui, est essentiel à la fabrication des drones militaires.
Si ces entreprises venaient à s’effondrer, nous nous retrouverions très rapidement au bord d’une rupture critique de nos capacités d’approvisionnement, qui fragiliserait notre défense et notre autonomie.
Lundi, à cette tribune, vous avez affirmé, à juste titre, qu’il était nécessaire d’ouvrir le parapluie nucléaire français pour protéger l’Europe – parapluie dont vous vous apprêtez pourtant à scier le manche, en laissant mourir ces entreprises stratégiques.
Face à cette catastrophe annoncée, et alors même que nous devons, plus que jamais, protéger notre souveraineté industrielle, énergétique et militaire, continuez-vous à écarter la nationalisation temporaire de Vencorex, et maintenez-vous qu’aucune autre solution n’est envisageable ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique . Je salue votre engagement, ainsi que celui des autres élus isérois, sur ce dossier difficile et à propos duquel le ministre de l’industrie, Marc Ferracci, a déjà eu l’occasion de vous répondre, hier, lors du débat sur la souveraineté industrielle. Il annonce aujourd’hui, avec le commissaire européen Stéphane Séjourné, un plan de soutien à la filière automobile : l’industrie, vous le voyez, est une de nos priorités.
L’entreprise Vencorex, vous l'avez rappelé, a été placée en redressement judiciaire en septembre dernier, après que l’actionnaire, qui avait investi 400 millions d’euros, a annoncé renoncer à poursuivre.
M. Inaki Echaniz . On le sait, tout ça !
M. Éric Lombard, ministre . Vencorex a été fragilisée par une très vive concurrence et par un taux d’utilisation des capacités mondiales qui, de l’ordre de seulement 60 %, l’a évidemment mise en grande difficulté.
L’État, au cours des dix derniers mois, s’est mobilisé sans relâche pour une approche industrielle, territoriale et sociale, se penchant sur le cas des salariés et travaillant à soutenir l’activité industrielle au Pont-de-Claix.
Nous avons eu, avec le premier ministre et le ministre de l’industrie, plusieurs réunions de travail.
M. Boris Vallaud . Mais quel est votre calendrier ?
Mme Dieynaba Diop . Concrètement ?
M. Éric Lombard, ministre . Nous étudions toutes les solutions, nous envisageons toutes les possibilités.
En l’absence d’offre de reprise, après dix mois de recherches acharnées, il n’y a malheureusement pas de modèle économique pour cette société – et la nationalisation d’une entreprise sans modèle économique ne saurait être une solution.
M. Boris Vallaud . Pour des questions qui touchent à la souveraineté, il y a des solutions !
M. Éric Lombard, ministre . Vous mentionnez les questions sensibles liées au nucléaire et à la défense. Les travaux conduits avec les ministères concernés ont permis de sécuriser des ressources alternatives en approvisionnements critiques, pour le sel comme pour le chlore – pour ArianeGroup comme pour Framatome.
M. Inaki Echaniz . Ce n’est pas sérieux !
M. Éric Lombard, ministre . Le contexte géopolitique donne évidemment à ces questions une grande importance.
Enfin, nous accompagnons individuellement chaque salarié. Leurs compétences sont recherchées et un bassin industriel se développe au Pont-de-Claix. Nous continuerons à les soutenir.
M. Boris Vallaud . C’était un faire-part de décès !
Mme la présidente . La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.
Mme Marie-Noëlle Battistel . Vous ne m’avez rien appris, puisque je suis ce dossier de très près. Accepteriez-vous d’accompagner les salariés dans un éventuel projet de reprise de leur entreprise ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Auteur : Mme Marie-Noëlle Battistel
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 mars 2025