Délais interminables d'obtention d'un RDV avec un médecin spécialiste
Publication de la réponse au Journal Officiel du 1er juillet 2025, page 5868
Question de :
M. Emmanuel Fernandes
Bas-Rhin (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Emmanuel Fernandes alerte M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins, sur les interminables délais d'obtention d'un rendez-vous avec des médecins spécialistes. En effet, selon une étude récente menée par l'Union régionale des professionnels de santé du Grand Est (URPS ML), obtenir un rendez-vous avec un médecin spécialiste relève du miracle. Près de trois quart des demandes de rendez-vous dans la région Grand Est n'aboutissent pas dans l'année et le délai moyen constaté pour obtenir un premier rendez-vous va de 4 à 6 mois. Concernant les cas dits « semi-urgents », c'est-à-dire les symptômes qui peuvent occasionner une suspicion de cancer, une prise en charge rapide (de moins de 7 jours) permet de diminuer grandement le risque de mortalité. Or on constate que cette prise en charge n'est effective dans ces délais que dans 4 % des cas en dermatologie et 6 % en ORL. Cette pénurie de médecins spécialistes ne provient pas des professionnels eux-mêmes. On constate que les spécialistes travaillent en moyenne 55 heures par semaine. La cause est en réalité bien plus profonde : la mauvaise gestion pendant des décennies du numerus clausus, la création d'un numerus apertus qui ne résout rien en empêchant le redoublement en première année de PASS, les départs en retraite massifs non remplacés ou encore le manque d'attrait général pour ces professions pourtant essentielles créent une situation alarmante pour le pays. Par ailleurs, c'est un sujet évoqué régulièrement depuis des années, la situation est aggravée par une répartition inégale des spécialistes. Si la situation dans les villes est déjà compliquée, elle est absolument catastrophique dans les zones rurales. Dans ce contexte, il souhaite savoir quelles mesures concrètes et structurelles elle entend prendre pour garantir un accès à toute la population à des soins spécialisés le plus rapidement possible et pour permettre l'implantation de médecins spécialistes dans les territoires sous-dotés.
Réponse publiée le 1er juillet 2025
L'accès aux soins est au cœur du pacte Républicain. Dans de nombreux territoires, malgré les mesures engagées par le Gouvernement, des inégalités d'accès à un médecin, en particulier à un médecin spécialiste. Plusieurs mesures ont déjà été mises en œuvre afin de favoriser l'accès aux soins dans les territoires. Le numerus clausus a été supprimé et remplacé par un nombre minimum obligatoire de médecins à former pour chaque université (numerus apertus). Les dispositifs d'aide à l'installation des médecins ont été refondus afin d'encourager l'installation en zones sous-denses. Les dispositifs d'aller-vers sont encouragés, notamment par le déploiement de médicobus, la mise en place de consultations avancées et le soutien à l'ouverture de cabinets médicaux secondaires en zones sous-denses, l'instauration d'une 4e année de médecine générale avec des stages prioritairement en zone sous-dense et la généralisation de l'accès à la télémédecine. Plusieurs réformes s'inscrivent en outre dans l'objectif de gagner du temps médical : focalisation des médecins sur les tâches à plus haute valeur ajoutée, délégation de compétences et partage de tâches avec les autres professions de santé, développement de la pratique avancée, incitation des médecins en fin de carrière à poursuivre leur activité. Pour aller plus loin, le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre un pacte de lutte contre les déserts médicaux et pour l'accès aux soins, annoncé par le Premier ministre le 25 avril 2025. Ce pacte s'inspire des travaux parlementaires réalisés ces derniers mois, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. Il est également le fruit d'échanges avec des professionnels de terrain, des représentants de patients et des élus locaux réunis depuis plusieurs semaines par le ministre chargé de la santé. Il se décline en quatre propositions centrales, construites avec les acteurs de terrain, mises en œuvre dans un calendrier précis, et suivies dans la durée. Le Pacte visera d'abord à diversifier l'origine géographique et sociale des étudiants en permettant à plus de jeunes d'accéder aux études de santé, sur l'ensemble du territoire, en ouvrant la 1ère année des études en santé dans chaque département, en mobilisant les internes et les docteurs juniors sur l'ensemble du territoire et en augmentant les places dans les études en santé en fonction des besoins de santé de la population, ce qui signifie la suppression du « numerus apertus » et la fixation d'un nombre de places minimal à ouvrir dans chaque université. La proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par la territorialisation et la formation, portée initialement par Yannick Neuder alors député, a été adoptée conforme au Sénat le 18 juin 2025, mettant fin à toute forme de numérus, en s'appuyant prioritairement sur les besoins de santé pour définir les besoins de formation. Retour des étudiants partis se former en Europe après évaluation, extension des passerelles pour réintégrer le second cycle des études de médecine sont des mesures issues de cette PPL qui augmenteront le nombre d'étudiants en formation et qui seront travaillées avec les doyens et les universités. Ce plan introduit également un principe d'une solidarité territoriale de l'ensemble de la communauté médicale, afin de développer l'offre de soins dans les territoires les plus critiques. Désormais, les médecins devront consacrer jusqu'à 2 jours par mois à des consultations dans les zones « rouges », c'est-à-dire celles les plus en difficulté. Les Agences régionales de santé (ARS) en lien étroit avec les préfets, et les élus de ces territoires, sont chargées d'identifier des “zones rouges”, à l'échelle de l'intercommunalité, au sein desquelles une permanence médicale devra être mise en place en absolue priorité. Ce mécanisme pourra être étendu progressivement aux médecins spécialistes, concomitamment au développement de dispositifs de zonages spécialistes conduits notamment par l'institut de recherche et documentation en économie de la santé. L'élaboration de zonages pour les médecins spécialistes permettra également de les intégrer aux dispositifs incitatifs d'aide à l'installation. En parallèle, une solidarité territoriale portée par les établissements de santé sera mise en place, par le biais de consultations hors les murs de médecins spécialistes vers les territoires les plus en tension. Les ARS lèveront les freins administratifs à leur mise en œuvre et faciliteront les conditions d'accueil et d'exercice avec les élus et les collectivités territoriales. Le Pacte participera en outre à moderniser les organisations et unir les compétences pour soigner plus de patients, par la suppression des certificats médicaux ne reposant sur aucun fondement juridique ou médical, le déploiement de plus d'assistants médicaux aux compétences élargies, la mobilisation de l'ensemble des compétences du système de santé et l'utilisation des potentiels du numérique et de l'intelligence artificielle dans le domaine de la santé. Enfin, le pacte visera, en partenariat avec les élus locaux, à créer des conditions d'accueil attractives pour les étudiants et professionnels de santé dans tous les territoires. Toutes ces mesures concrètes sont de nature à renforcer l'accès aux soins dans tous les territoires.
Auteur : M. Emmanuel Fernandes
Type de question : Question écrite
Rubrique : Médecine
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 28 avril 2025
Dates :
Question publiée le 25 février 2025
Réponse publiée le 1er juillet 2025