Statut et moyens des gestionnaires de biens du patrimoine mondial de l'UNESCO
Question de :
Mme Sophie Pantel
Lozère (1re circonscription) - Socialistes et apparentés
Mme Sophie Pantel attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur la nécessité de clarifier le statut et les moyens donnés aux structures gestionnaires des sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. Ratifiée en 1975, la Convention du patrimoine mondial fixe le rôle de l'État dans la protection et la conservation des sites de la liste du patrimoine mondial. Il est de fait garant de la valeur universelle exceptionnelle (VUE) des sites, en collaboration avec d'autres structures gestionnaires dont le statut et les modes de gestion demeurent hétérogènes. Leur rôle, leurs responsabilités et les moyens nécessaires à leur fonctionnement ne sont pas clairement définis dans l'article L. 612-1 du code du patrimoine qui n'en fait qu'une mention simple. Ces structures assurent parfois seules le rôle de médiation, de conciliation, de coordination, d'animation, d'inventaire et de communication nécessaire à la protection et la valorisation des sites. Ainsi, la mission technique chargée de valoriser le bien Causses et Cévennes, qui représente le plus vaste paysage culturel de l'agropastoralisme méditerranéen en Europe (avec 3 000 km² protégés), dépend entièrement de l'engagement des quatre conseils départementaux concernés, dans un contexte financier particulièrement contraint. Ces organismes gestionnaires manquent également d'accompagnement et souffrent de délais importants lorsqu'ils se tournent vers les services de l'État. À titre d'exemple, le plan de gestion du bien Causses et Cévennes initié en 2020 et validé au niveau local en octobre 2023, est resté lettre morte faute de disponibilité des référents au niveau ministériel. Or les forums internationaux des gestionnaires du patrimoine mondial préconisent, notamment dans la déclaration de George Town (Malaisie, 2024), une véritable reconnaissance des compétences des structures gestionnaires à travers un statut propre et des moyens nécessaires. Mme la députée, relayant les préoccupations de l'entente interdépartementale des Causses et des Cévennes, demande ainsi à Mme la ministre de la Culture de clarifier la situation des structures gestionnaires des sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. Dans un premier temps, elle interroge sur les efforts mis en place pour la reconnaissance du rôle de gestion de ces structures, dont le statut juridique et le cadre d'intervention ne sont pas clairement définis et dont l'avis, aujourd'hui simplement consultatif, n'est pas considéré de manière systématique. Dans un second temps, elle interroge sur les moyens mis à la disposition des structures gestionnaires qui financent parfois seules certains sites alors même que l'État demeure le garant de leur préservation et diminue les dotations des collectivités territorialement compétentes. Enfin, elle l'interroge sur les moyens mis en place au sein des ministères de tutelle (culture, transition écologique) et des services déconcentrés afin d'accompagner les structures gestionnaires et assurer le traitement des procédures alors que le nombre de sites ne fait qu'augmenter et les exigences se renforcer.
Réponse publiée le 1er avril 2025
La France compte aujourd'hui 53 biens inscrits au Patrimoine mondial. Elle est l'un des pays dans le monde qui en possède le plus, derrière l'Italie et la Chine et devant l'Espagne. Cette responsabilité devant la communauté internationale incombe en premier lieu au ministère de la culture, aux côtés du ministère chargé de l'environnement, puisque la France possède 44 biens culturels, 7 biens naturels et deux biens mixtes, à la fois culturels et naturels. Cette responsabilité est également partagée avec les gestionnaires des biens qui sont, dans leur grande majorité, des collectivités territoriales. L'article L. 612-1 du code du patrimoine dispose en effet que « L'État et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs groupements assurent, au titre de leurs compétences dans les domaines du patrimoine, de l'environnement et de l'urbanisme, la protection, la conservation et la mise en valeur du bien reconnu en tant que bien du Patrimoine mondial ». L'État est donc aux côtés des collectivités, non seulement pendant la phase de candidature, qu'il accompagne jusqu'à son terme, mais aussi et surtout après l'inscription du bien sur la liste du Patrimoine mondial. En incitant les gestionnaires à doter chaque bien des outils réglementaires adéquats, qui se déclinent également dans la zone tampon qui l'entoure, et en accompagnant la rédaction du plan de gestion, les services centraux et déconcentrés de l'État assurent, aux côtés des collectivités qui en ont la charge, le maintien dans le temps de la valeur universelle exceptionnelle (VUE) de chaque bien inscrit, comme la France s'y est engagée en signant et en ratifiant la Convention du patrimoine mondial, culturel et naturel de 1972. Le rôle des services de l'État a été précisé dans une circulaire du 15 novembre 2023 portant sur la mise en œuvre, pour les biens culturels, de cette même convention. Cette circulaire rappelle que le plan de gestion d'un bien inscrit qui n'en possède pas ou qui souhaite le renouveler, est rédigé conjointement par les services de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) territorialement compétente, en lien, le cas échéant, avec la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), et par la ou les collectivité (s) gestionnaire (s) du bien, le cas échéant. Le document est ensuite arrêté par le préfet de région, avant sa transmission à l'UNESCO par l'administration centrale du ministère. La consultation de cette dernière en amont de l'arrêté du préfet n'est donc pas prévue. Dans le cas du bien « Les Causses et les Cévennes, paysage culturel de l'agro-pastoralisme méditerranéen », c'est donc au préfet de région Occitanie qu'il revient d'arrêter le document, une fois qu'il aura recueilli l'assentiment de tous les partenaires, avant que les services du ministère de la culture ne se chargent de le transmettre à l'UNESCO par voie diplomatique. La grande diversité des gestionnaires des biens inscrits, qui peuvent être des communes ou leur groupement, des conseils départementaux ou régionaux, des établissements publics et, dans certains cas, des fondations ou des propriétaires privés, les amène en général à déléguer la gestion du bien à une association ou à un groupement d'intérêt public. Ces derniers ne peuvent toutefois se substituer aux collectivités propriétaires des biens qui, dans la plupart des cas, ont porté la candidature au Patrimoine mondial et se sont engagées à en protéger et à en valoriser la VUE. Ces structures, qui peuvent ponctuellement recevoir un financement de la DRAC pour accompagner un projet, n'ont toutefois pas vocation à être soutenues de manière pérenne, pour leur fonctionnement, par le ministère de la culture. Le suivi des biens culturels inscrits au Patrimoine mondial, assuré au niveau national par la direction générale des patrimoines et de l'architecture et, au niveau régional, par les DRAC, qui ont désigné des correspondants en leur sein, est fréquemment cité par l'UNESCO comme un modèle d'administration efficace, permettant d'assurer une veille permanente, aux côtés des gestionnaires, du maintien de la valeur universelle exceptionnelle de chaque bien inscrit. Cette mission très importante, que le ministère de la culture s'efforce de mener en lien quotidien avec les gestionnaires, est détaillée dans la circulaire précitée. En ce qui concerne les biens naturels inscrits au Patrimoine mondial, leur suivi relève du ministère chargé de l'environnement.
Auteur : Mme Sophie Pantel
Type de question : Question écrite
Rubrique : Patrimoine culturel
Ministère interrogé : Culture
Ministère répondant : Culture
Dates :
Question publiée le 25 février 2025
Réponse publiée le 1er avril 2025